Dictionnaire de la danse 1999Éd. 1999
H

Anne Heinel, [Friedricke Anna, dite ] (1753-1808).

Danseuse allemande.

Élève de Lepy et de J. G. *Noverre, elle danse à Stuttgart et Vienne avant de débuter en 1767 à l'*Académie royale de musique à Paris. Elle y fait l'essentiel de sa carrière jusqu'en 1781, mais passe plusieurs saisons au King's Theatre de Londres (1771-1773). Elle triomphe dans les opéras de C. W. *Gluck, les ballets de Noverre (*Médée et Jason, 1776 ; Apelles et Compaspe, 1776 ; les *Horaces, 1777) et de M. *Gardel. Danseuse virtuose, réputée pour ses *pirouettes multiples, elle n'en excelle pas moins selon Noverre dans le style *noble. Le baron de Grimm compare ses talents à ceux de G. *Vestris, qu'elle épouse en 1792.

NL

HELLERAU.

Nom porté successivement par trois institutions de formation.

1. Hellerau.

« Cité-jardin » fondée en 1910, près de Dresde, sous l'impulsion de l'industriel Karl Schmidt et du mécène Wolf Dohrn.

Conçu comme « un espace de vie dans lequel le travail, l'habitat, la formation et la culture iront de pair », Hellerau incarne cette utopie jusqu'en 1914 et doit sa renommée internationale à l'Institut conçu pour É. *Jaques-Dalcroze par l'architecte Henry Tessenow, le scénographe A. *Appia et l'éclairagiste Alexandre von Salzmann. En 1912-1913, démonstrations et spectacles musicaux y sont présentés : la nouveauté du style attire le monde artistique de l'époque, musiciens, peintres, écrivains, et personnalités du spectacle tels M. *Reinhardt, K. *Stanislavski, S. *Diaghilev. L'acteur Georges Pitoëff y découvre que le rythme est à la base de l'art scénique. Adeptes influents de la première heure, S. *Volkonski répand la méthode *Dalcroze en Russie, Percy Ingham la fait triompher en Grande-Bretagne, Jean d'Udine l'introduit en France. D'autres élèves, telles S. *Perrottet, M. *Wigman et M. *Rambert, marqueront le monde de la danse. La guerre interrompt l'activité de Hellerau. Jaques-Dalcroze restera en Suisse, où il est rentré.

2. Neue Schule Hellerau.

École créée en automne 1915.

À la suite du départ de Jaques-Dalcroze se constitue, en 1915, une Association Hellerau pour l'éducation rythmique et musicale, qui donne naissance à la Nouvelle école de Hellerau pour le rythme, la musique et la culture corporelle, sous la direction de Kurt von Bockmann. La vraie reprise n'a lieu toutefois qu'en 1919, sous la direction de Christine Baer-Frisell, puis d'Ernest Thomas Ferand, élèves de Jaques-Dalcroze. C'est dans ce cadre que R. *Chladek entreprend sa formation en 1921, alors que V. *Kratina dirige le groupe de danse et que la Pragoise Jarmila Kröschlová est en charge de la technique corporelle, « langage de l'âme passant à travers le corps ». Cette deuxième période prend fin avec le transfert de l'École en Autriche.

3. Hellerau-Laxenburg.

École installée au château de Laxenburg, près de Vienne (1925-1939).

Fidèle, au départ, à l'esprit de Hellerau, cette nouvelle École s'en éloigne progressivement sous l'influence de la danse *moderne. Le fossé se creuse avec Jaques-Dalcroze, qui dénonçe le « culte du mouvement pour le mouvement, de l'élan pour l'élan » comme n'étant pas le fait d'une *rythmique éducative, et déplore l'abandon de la musique comme principe pédagogique premier. Parmi les professeurs, on retrouve les danseuses Kratina, élève directe de Jaques-Dalcroze, et Chladek, diplômée de la Neue-Schule Hellerau qui revendiquera toujours ses racines dalcroziennes. Les démonstrations sont à caractère essentiellement chorégraphique : en 1923 y sont notamment présentés le *Prince de bois (mus. B. *Bartók) et la Danse des morts de Kratina. L'École de Laxenburg remporte de beaux succès lors de compétitions chorégraphiques internationales. Les années 1932-1933 sont marquées par de grands spectacles, tel *Médée, joué au théâtre grec de Syracuse. La Seconde Guerre mondiale entraîne la dissolution de l'école.

MLB

Bibliographie. A. Berchtold, « Émile Jaques-Dalcroze et son temps», Émile Jaques-Dalcroze, l'homme, le compositeur, le créateur de la rythmique (sous la dir. de F. Martin), La Baconnière, Neuchâtel, 1965 ; Chladek, « Von Hellerau bei Dresden nach Laxenburg bei Wien », in Ausdruckstanz (sous la dir de G. Oberzaucher-Schüller), Wilhelmshaven Noetzel, 1992 ; H. J. Sarfert, Hellerau. Die Gartenstadt und Künstlerkolonie. Hellerau-Verlag. Dresden, 1995.

Fée HELLÈS (1886-1982).

Éducatrice par le mouvement, française d'origine russe.

Elle étudie la philosophie et la biologie végétale à Saint-Pétersbourg. Hospitalisée pour une pleurésie, c'est par nécessité et instinct de survie qu'elle imagine les bases de sa méthode, la « réadaptation au rythme instinctif », tandis qu'I. *Duncan, qu'elle voit danser, lui permet de constater la « fusion du psychisme et du physique quand le mouvement part de l'intérieur ». Elle s'installe en France en 1929. Collaboratrice du psychologue Henri Wallon, elle est lauréate du prix Garnier de l'Académie de médecine de Paris en 1940 pour son étude sur l'Immunité naturelle acquise et l'hygiène de l'enfance vue sous l'angle du développement psycho-moteur de l'enfant. Convaincue que « l'harmonie du mouvement est une condition primordiale à l'équilibre de l'être humain et à sa santé », elle fonde le centre Harmonie et Vie (1957). Sa méthode fait appel à des coordinations fines dont l'exécution, rythmée par la respiration, implique conscience et détente. J. *Babilée, Y. *Berge, J. *Charrat, Denise Coutier, L. *Darsonval, J. *Solane figurent parmi ses élèves, ainsi que Maurice Martenot, l'inventeur des ondes Martenot.

CF

Bibliographie. Hellès, Ses écrits, Danse ma joie, Meudon-Bellevue, 1994.

sir Robert , HELPMANN [HELPMAN R., dit ] (1909-1986).

Danseur, chorégraphe et directeur de compagnie australien.

Il se forme en Australie avec la compagnie d'A. *Pavlova et commence très tôt à danser, notamment dans des *comédies musicales. En 1933, il intègre le *Vic-Wells Ballet, où il reprend les rôles d'A. *Dolin, dont celui de Satan dans *Job, et interprète le *Lac des cygnes et *Giselle avec A. *Markova. Souvent décriée par la suite, sa technique est pourtant très adaptée au *Spectre de la rose et à son rôle d'Arlequin dans le *Carnaval (1934, M. *Fokine). Ses talents dramatiques ou romantiques lui valent bientôt l'adoration du public, tout comme son accompagnement attentif de la jeune M. *Fonteyn dans les classiques du XIXe siècle, culminant dans la *Belle au bois dormant (1939, N. *Sergueïev) du Sadler's Wells. Son remarquable don comique émerge pour la première fois en 1934 dans The Jar de N. de *Valois. Rétrospectivement, on peut affirmer que le Sadler's Wells Ballet n'aurait pas survécu à la guerre sans Helpmann : interprète irremplaçable, il se révèle aussi un chorégraphe majeur dès *Hamlet (1942), sa deuxième œuvre pour la compagnie après *Comus (1942). *Miracle in the Gorbals (1944), très controversé, est suivi d'Adam Zero (1946, mus. A. *Bliss), première création présentée à la Royal Opera House après sa réouverture. Le public apprécie beaucoup Elektra (1963, mus. Malcolm Arnold), pourtant éreinté par la presse. Il donne ses dernières créations pour l'*Austalian Ballet, dont il est codirecteur puis directeur de 1965 à 1975. Acteur classique brillant, il interprète Hamlet aussi bien comme comédien que comme danseur, et il dirige une compagnie de théâtre en Australie (1955). Il produit aussi des opéras et travaille pour le cinéma, notamment pour les *Chaussons rouges (1948). Excellant dans toutes les danses de scène, à l'exception de la pure virtuosité, il est célèbre pour son accompagnement attentif de jeunes danseuses. Quelques jours avant sa mort, il interprète encore le Roi rouge de *Checkmate, rôle qu'il a créé en 1937.