Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Parmesan (Francesco Mazzola, dit il Parmigianino, en français le)

Peintre italien (Parme 1503  – Casalmaggiore 1540).

Fils d'un peintre estimable, Filippo Mazzola, et recueilli à la mort de celui-ci (1503) par ses oncles Michele et Pier Ilario Mazzola, peintres, le jeune Parmesan, manifestant une extraordinaire précocité, peignit sa première œuvre en 1519, un Baptême du Christ (probablement le tableau des musées de Berlin). L'église S. Giovanni Evangelista de Parme conserve ses premières fresques (4e, 1re, 2e chapelle à gauche de la nef), influencées par Corrège, mais témoignant aussi de recherches coloristes et dynamiques puisées à d'autres sources (Anselmi, Pordenone). Sa première peinture certaine (1521), le Mariage mystique de sainte Catherine (Bardi, église S. Maria), d'une élégance de lignes qui rappelle son prodigieux talent de dessinateur et d'une préciosité raffinée, prélude à une série de tableaux religieux (Repos pendant la fuite en Égypte, Londres, Courtauld Inst. ; Sainte Catherine, Francfort, Städel. Inst. ; Sainte Famille, Prado). À la demande du comte Galeazzo San Vitale, qui lui inspira un magnifique portrait (Naples, Capodimonte), Parmesan décora à fresque, en 1523, le boudoir de Paola Gonzaga à Fontanellato (Diane et Actéon), ensemble d'une exquise élégance qui rivalise avec la Camera di San Paolo de Corrège.

   En 1524, laissant inachevées les peintures des orgues de l'église de la Steccata, il partit pour Rome, emportant avec lui quelques œuvres, comme son Portrait dans un miroir (Vienne, K. M.), tour de force de perspective d'un esprit essentiellement maniériste. On sait peu de chose de cet important séjour, où il copia les antiques, admira Michel-Ange et surtout Raphaël, rencontra Perino del Vaga, Sebastiano del Piombo et Rosso, avec qui il peignit dans un palais de la via Giulia. Il exécuta alors de petits tableaux précieux (Mariage mystique de sainte Catherine, Londres, N. G. ; Repos pendant la fuite en Égypte, Rome, Palais Doria), probablement quelques portraits (Lorenzo Cybo, Copenhague, S. M. f. K.) et la monumentale Vision de saint Jérôme (Londres, N. G.). Le sac de Rome l'obligea à se réfugier à Bologne, où il déploiera (1527-1530) une intense activité : le Saint Roch (basilique S. Petronio), dont la savante arabesque plaisait tant à Vasari, annonce des compositions plus ambitieuses, comme la majestueuse Madone avec sainte Marguerite (Bologne, P. N.), ou recherchées, comme la Vision de saint Zacharie (Offices), à l'exquis paysage ou d'un charme raffiné et étrangement sensuel (Madone de la rose, Dresde, Gg), autant d'œuvres qui faisaient dire à ses contemporains que la grâce de Raphaël revivait en lui. C'est probablement de ce moment que date le délicat et minuscule Mariage mystique de Sainte Catherine inachevé du Louvre. Il peignit aussi une Conversion de saint Paul (Vienne, K. M.). En 1530, Parmesan participe aux fêtes du couronnement de Charles Quint à Bologne et peint de mémoire son portrait (anc. coll. Cook). De cette époque datent, d'ailleurs, un assez grand nombre de portraits qui témoignent du style des artistes de sa génération à l'élégance raffinée et aux accents typiquement maniéristes (Offices ; Rome, Gal. Borghèse ; Naples, Capodimonte ; Parme, l'Esclave turque, G. N. ; Vienne, K. M. ; Hampton Court).

   En 1530, apprenant le départ de Parme de Corrège, il revint dans sa ville natale à l'apogée de son génie. Merveilleux dessinateur, coloriste raffiné, esprit original, il était tout désigné pour y jouer un grand rôle. Mais une inquiétude grandissante, une recherche incessante de perfection formelle (l'Amour, Vienne, K. M.) le poussèrent à abandonner, sans en être satisfait, ses œuvres les plus belles, comme la Madone au long cou (Offices). Cette évolution explique en partie ses démêlés avec le chapitre de l'église de la Steccata : il travailla plusieurs années (1530-1534), comme en témoignent de multiples dessins, à la grandiose réalisation du décor de la voûte, y disposant symétriquement d'élégantes figures féminines, fasciné par une volonté d'harmonie et de rythme d'une cadence presque abstraite. Les portraits de cette époque reflètent cette angoisse spirituelle et formelle (Comte et Comtesse de San Secondo, 1532-1535, Prado, et surtout la mystérieuse Antea, 1535-1537, Naples, Capodimonte).

   Pour fuir les représailles du chapitre de la Steccata, où il travaille entre 1531 et 1539 et dont il n'avait pas respecté les exigences, Parmesan se réfugia à Casalmaggiore, n'abandonnant pas ses recherches et atteignant parfois à un style étrangement dépouillé (la Vierge avec saint Étienne et saint Jean-Baptiste, Dresde, Gg ; Lucrèce, Naples, Capodimonte).

   Il y mourra prématurément. Son influence fut très importante, à laquelle contribua le grand succès de ses admirables dessins (le musée du Louvre en possède une superbe série ; on peut en voir également de beaux exemples à la G. N. de Parme, dans la coll. Devonshire à Chatsworth, au British Museum, aux Offices, à l'Albertina, à Windsor Castle et au musée de Budapest), diffusés à profusion par les graveurs.

Parmiggiani (Claudio)

Artiste italien (Luzzara 1943).

Ses premières œuvres datent du début des années 60 et lui confèrent une place singulière dans le contexte italien de l'Arte povera. Il se fait connaître à partir de 1962 avec ses " récits d'objets " surréalistes et néodada. Avec Deserto (1964), il présente une paire de chaussures, recouverte de taches de peinture et posée dans un globe terrestre coupé en deux. À l'instar de ses dessins, qu'il suspend généralement au stade de l'esquisse, Parmiggiani s'en tient souvent à des gestes élémentaires de collecte, de choix, de disposition et d'assemblage. Sa prédilection pour les toiles blanches ou monochromes (depuis 1970) et son recours régulier à des formes de Ready Made l'apparentent à une démarche plutôt conceptuelle. Mais ses références constantes à l'histoire de l'art ou son emploi fréquent (depuis 1958) de moulages de sculptures antiques le rattachent plus à un certain " idéalisme classique ". Il réalise ainsi des installations qui obéissent à une certaine mise en scène. L'Annunciazione (1975) appartient à cette catégorie d'œuvres que l'artiste appelle " théâtre du silence ". Sur un dallage en damier noir et blanc, tout droit issu d'un intérieur de Vermeer, Parmiggiani dresse face à face une plaque de cuivre et un miroir qui réfléchit la lumière. Ses œuvres récentes manipulent l'association idée-forme dans un sens encore plus symbolique et littéraire (Iconostases, à partir de 1985). Il froisse des cartes géographiques pour les métamorphoser en cerveau (Verso bizancio, 1985) ou en vague marine (Sans titre, 1986). On voit aussi apparaître des thèmes nouveaux, où le son (paroles, musiques...) est le personnage central : Il bosco guarda e ascolta (1986). Par ces jeux de détournements et de permutations d'identité, Parmiggiani fait appel à l'imagination ludique du spectateur et crée un œuvre plastique plein de spiritualité. Il est présent aux Biennales de Paris (1977) et de Venise (1982), et a exposé à Milan (gal. Christian Stein, 1988), à Boston (gal. Lario Diacono, 1988), à Paris (gal. Durand-Dessert, 1989), et des œuvres monumentales anciennes et récentes (Omaggio del sol e della luna alla luce, 1988-89) ont été présentées à l'Institut culturel italien de Paris en 1993. La villa Arson de Nice et le Museum Moderner Kunst de Vienne lui ont consacré en 1987 une rétrospective, et une exposition nouvelle a été présentée (Genève, M. A. M. ; Dijon, M. B. A.) en 1996.