Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Fernández (Alejo)

Peintre espagnol (Cordoue v.  1475  – Séville 1545 ou 1546).

Cet artiste vraisemblablement d'origine germanique (un document mentionne " Maestro Alexo, pintor alemán ") domine l'école andalouse du premier tiers du XVIe s. Gendre du peintre cordouan Pedro Fernández, il réside jusqu'en 1508 à Cordoue ; de cette période datent le Christ à la colonne (musée de Cordoue) et le triptyque de la Cène (Saragosse, basilique du Pilar), qui témoignent de recherches nouvelles, situant les personnages dans de vastes perspectives architecturales. Cette étape semble s'achever avec l'installation du peintre à Séville, où l'appelèrent les chanoines de la cathédrale et où il se fixa définitivement. L'étude de la figure humaine l'emporte sur la traduction de l'espace dans sa première grande œuvre : le retable de la cathédrale (Rencontre à la Porte Dorée, Nativité de la Vierge, Adoration des mages, Présentation au Temple), où des réminiscences gothiques se manifestent dans les sources d'inspiration (gravure de Schongauer pour l'Adoration des mages), dans la richesse du décor et la minutie des détails. Comme ses contemporains castillans, Fernández puise son inspiration à des sources flamandes et italiennes ; le traitement des draperies et de certains visages présente des affinités avec le style de Quentin Metsys et des maniéristes anversois, et aussi avec les peintres de la dernière génération du quattrocento. On a remarqué le caractère " bramantesque " de certaines de ses architectures figurées (Flagellation du Christ, Prado). Les commandes affluent à l'atelier de Fernández, qui compose des retables selon une nouvelle ordonnance, groupant les divers personnages, précédemment juxtaposés, autour d'une figuration centrale (1520, Séville, retable de la chapelle de Maese Rodrigo ; Marchena, retable de l'église S. Juan). Le thème favori de l'artiste est la Vierge à l'Enfant, toujours empreinte de douce mélancolie (Vierge à la rose, Séville, église S. Ana ; Vierge allaitant, couvent de Villasana de Mena, détruit en 1936). La technique soignée de ses premières peintures ne se retrouve pas dans les œuvres de la fin de sa vie, où le dessin moins sûr, les proportions et les attitudes souvent incorrectes trahissent l'intervention de collaborateurs (Pietà, 1527, cathédrale de Séville). La Vierge des navigateurs (v. 1535, Alcázar de Séville), abritant sous son ample manteau navigateurs, marchands et capitaines, reprend le thème médiéval de la Vierge de miséricorde, renouvelé par l'épopée des conquistadores.

Fernandez (Luis)

Peintre espagnol (Oviedo 1900  – Paris 1973).

L'œuvre de Fernandez est marquée par le milieu des surréalistes, qu'il rencontre à Paris en 1924. Avant 1945, son œuvre passe par l'Abstraction géométrique et le Surréalisme ; par la suite elle est influencée par Picasso. Fernandez rencontre Breton, Eluard, Char et se lie avec des artistes aussi différents que Mondrian, Picasso, Pevsner, Arp, Giacometti, Brancusi.

   Dessinateur, sculpteur et peintre, Fernandez s'intéresse particulièrement aux maîtres anciens du XVIe et du XVIIe s., dont il s'inspire pour réaliser des œuvres que le critique Christian Zervos qualifiera de postcubistes. Les natures mortes, les paysages et les portraits, empreints de gravité, caractérisent l'œuvre de Fernandez : Crânes (1964), Portrait du résistant (1944), Paysage bordelais (1948). De telles œuvres renouvellent une tradition classique de la peinture espagnole. Un peintre comme Victor Brauner, un poète comme Char, auteurs de textes sur la peinture de l'artiste, n'y sont pas demeurés insensibles.

   Les œuvres de Luis Fernandez sont présentes dans les collections du Fonds national d'Art contemporain de Paris, du musée d'Art moderne de Saint-Étienne et dans de nombreuses collections particulières (De Ménil, Houston).

Fernández (Pedro)

Peintre espagnol (Murcie, actif en Italie v. 1503 à 1518, documenté à Gérone de 1519 à 1521)

. Originaire de Murcie, cet artiste partit vers 1500 pour l'Italie, où il a été longtemps connu sous le nom conventionnel de Pseudo-Bramantino, identifié avec le peintre Pietro Ispano ou Pietro Frangione cité dans des documents napolitains. Après une première étape de formation en Lombardie qui lui permit de connaître les peintures de tradition léonardesque et les compositions de Bramantino, il séjourna entre 1508 et 1516 à Naples (Bustes de prophètes de la chapelle Caraffa à San Domenico Maggiore, Retable de Santa Maria delle Grazie de Caponapoli, démembré entre la Norton Simon Foundation de Pasadena, le musée Capódimonte de Naples et une coll. part., Chemin du Calvaire de San Domenico Maggiore) et à Rome (Vision du bienheureux Amedeo Mendez de Silva, Gal. Barberini ; Stigmatisation de saint François, Turin, Gal. Sabauda). Avant son retour en Espagne, lors d'un second séjour en Italie du Nord (1516-1518), il dut exécuter le Polyptyque de la Vierge de Bressanoro (église de Castelleone et musée de Crémone), œuvre d'une grande force plastique, soulignée par un éclairage violent et un vif chromatisme. De cette époque datent également les panneaux de Saint Blaise (Barcelone, M. A. C.) et Saint Grégoire (Cambridge, Fogg Art Museum).

   Entre 1519 et 1521, Pedro Fernández est cité à Gérone dans le contrat du Retable de sainte Hélène (cathédrale de Gérone) et pour deux autres ensembles à Flaçà et Llançà (disparus). Après avoir assimilé la culture des principaux foyers de la Renaissance italienne, Fernández, à son retour en Catalogne, revient à des formules plus typiquement espagnoles, mais son influence est notable sur les artistes de la première Renaissance catalane.

Ferrari (Defendente) , dit Defendente Ferrari da Chivasso

Peintre italien (documenté en Piémont de 1509 à 1535).

Par rapport à celui de son maître, Martino Spanzotti, qui exerça une très forte influence sur ses débuts, son style est marqué par une persistance du goût gothique, qui finira par rejoindre le Maniérisme. Sa petite Adoration nocturne (1510, Turin, Museo Civico) révèle déjà une tendance au récit populaire, un ton d'émotion pathétique et des rapports avec le graphisme des gravures sur bois. Des œuvres comme l'Adoration de l'Enfant avec des saints (1511) de l'église S. Giovanni à Avigliana, et l'Adoration de l'Enfant avec un donateur (1511, musées de Berlin), les très remarquables retables de la cathédrale d'Ivrea (Adoration de l'Enfant Jésus avec sainte Claire, 1519 ; Adoration avec saint Vermondus et un prélat, 1521) marquent les étapes de son évolution, qui atteignit son stade final en 1535 dans le triptyque de S. Giovanni d'Avigliana (Madone et l'Enfant avec les Saints Crépin et Crépinien). Son style et son iconographie sont fixés. Il utilise volontiers des effets luministes ; les rouges dominent dans son chromatisme ; ses paysages rappellent ceux des peintres nordiques (Saint Jérôme en prière, 1520, Turin, Museo Civico ; triptyque de l'Adoration des mages à l'Instituto Rosmini de Stresa, 1523 ; grand retable de la Gal. Sabauda à Turin). Ces caractères sont encore plus évidents dans les prédelles ou les panneaux narratifs, de facture infiniment délicate, qui sont conservés à Turin (Museo Civico ; Gal. Sabauda), à la cathédrale de Cuneo (Scènes de la vie de saint Antoine abbé) et à l'ancien couvent de S. Girolamo de Biella (1523, panneaux des stalles). L'œuvre de Defendente, assez abondante, est principalement conservée en Piémont : à Turin (Gal. Sabauda, Museo Civico, Accad. Albertina, cathédrale) et dans les églises et les musées de la région de Turin (Avigliana, Buttigliera Alta, Carmagnola, Caselle Torinese, Ciriè, Feletto Canavese), à Ivrea, à la Sagra di S. Michele et à Suse, à Vercelli (Museo Borgogna). Hors d'Italie, elle est représentée au musée de Bourg-en-Bresse (Nativité de saint Jean ; Déposition), au Fogg Art Museum de Cambridge (Mass.) [Adoration de l'Enfant ], au Rijksmuseum (la Vierge, sainte Anne et l'Enfant, 1528), au musée de Denver (le Christ chez Marthe et Marie), au Metropolitan Museum (Deux Saints), à la N. G. de Londres (Saints) et à la Staatsgal. de Stuttgart (le Christ et les docteurs, 1526). La distinction, longtemps malaisée, entre les œuvres de Spanzotti et celles de Defendente Ferrari est aujourd'hui plus claire, depuis que les historiens ont su individualiser la manière, plus brillante et plus gothique, de Defendente et celle de Spanzotti, liée à la Renaissance lombarde. Defendente eut plusieurs élèves et imitateurs, en particulier Girolamo Giovenone, et exerça une influence indéniable sur la peinture piémontaise du XVIe s.