Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
S

Solario (Antonio) , dit lo Zingaro

Peintre italien (documenté entre 1502 et 1514).

Bien que d'origine et de formation vénitienne (il se qualifie lui-même de Vénitien dans ses signatures), il a beaucoup travaillé hors de cette ville ; on le trouve à Naples v. 1495 (mais la date de sa présence à Naples demeure discutée), où il exécute des fresques (Scènes de la vie de saint Benoît) dans le cloître de S. Severino e S. Sossio et plus tard (v. 1502) à Fermo, qui conserve une grande Pala (Madone et quatre saints) à S. Maria del Carmine. Solario séjourna d'ailleurs plusieurs années dans les Marches (Osimo, 1504) et peut-être en 1518 à Montecassino. On a même émis l'hypothèse qu'il se serait rendu en Angleterre, où il aurait peint en 1514 le Triptyque Withypoll (centre avec la Sainte Famille et Paul Withypoll à la City Art Gal. de Bristol, volets avec des Saintes à la N. G. de Londres). Son style, ferme et précieux, se rattache à la manière vénitienne de Giovanni Bellini, d'Alvise Vivarini et de Carpaccio, toujours marquée par l'influence d'Antonello, avec un accent nordique flamand prononcé. Ses recherches rejoignent ainsi celles des Lombards contemporains (il a peut-être séjourné à Milan). On lui doit des Madones (musée de Budapest ; Copenhague, S. M. f. K. ; Naples, Capodimonte ; Londres, N. G. ; Milan, Castello Sforzesco), Salomé (1511, Rome, Gal. Doria Pamphili) et Hérodiade (id.).

Soldati (Atanasio)

Peintre italien (Parme 1896  –Milan 1953).

Il étudie d'abord l'architecture puis se tourne vers la peinture et fait partie à Milan du groupe d'artistes de la galleria Il Milione où il expose en 1931. À partir de 1930, Soldati s'oriente vers l'abstraction, dont il est un des premiers représentants en Italie. Il suit alors un processus régulier de simplification de l'image qui reste toutefois influencée par l'art de Paul Klee. En 1935, il participe à l'association Abstraction-Création à Paris. Après la guerre, il est avec Gino Dorfles et Bruno Munari l'un des fondateurs du M. A. C. (Movimento Arte Concreta). Ses œuvres sont alors très proches de celles de Magnelli et de Herbin (Composition, 1952). Il prend part à la Biennale de Venise, où une salle lui est consacrée en 1952, et à la Quadriennale de Rome. Ses œuvres, dont une grande partie ont été détruites pendant la guerre, sont conservées dans les galeries d'art moderne de Rome et de Milan, ainsi que dans des collections privées milanaises.

Solimena (Francesco)

Peintre italien (Canale di Serino 1657  – Barra [Naples] 1747).

Tout en se distinguant de Luca Giordano, il est, avec lui, le plus remarquable représentant de la peinture baroque à Naples. Ayant reçu sa première formation de son père, Angelo, dans un climat naturaliste issu de Guarino, il est bientôt influencé par le style pictural de Luca Giordano. Il exécute d'abord plusieurs œuvres en collaboration avec son père (coupole de la cathédrale de Nocera), puis, v. 1680, il peint des fresques avec des Scènes de la vie des saintes Thècle, Archelaa et Suzanne dans l'église S. Giorgio à Salerne. Ces fresques et celles qu'il exécuta peu après dans le chœur de S. Maria Donnaregina à Naples (Saints André et Augustin, Saints Matthieu et Janvier, Triomphe de saint François, Scènes de la vie de saint François) constituent le meilleur de son œuvre de jeunesse. Déjà, sa personnalité s'affirme nettement au sein des différentes expériences du baroque local, recherchant les possibilités de fusion entre le chromatisme de Giordano et le néo-caravagisme plastique de Mattia Preti, auxquels peut s'ajouter l'audace des perspectives des " machines " de Lanfranco.

   Dans ce sens, Solimena renouvelle la leçon de Giordano, qui, dans l'interprétation plus libre qu'il donnait de la fonction structurale de la lumière, pouvait tendre et aboutir à une désagrégation totale de la forme. Cette évolution le conduit des grandes fresques (Scènes de la vie de saint Paul ; au plafond : Vertus et Anges) de la sacristie de S. Paolo Maggiore (1689-90) à celles (Scènes de la vie de saint Nicolas de Bari) de S. Nicola alla Carità (Naples, 1697 ; il avait déjà peint auparavant, pour cette église, deux de ses meilleurs tableaux d'autel, les Saints François de Sales, François d'Assise et Antoine de Padoue et la Vierge avec saint Pierre et saint Paul) et à la vaste production de tableaux de chevalet et de " pale " d'autel de cette période. Toutes ces œuvres, construites avec une rigoureuse puissance volumétrique, libèrent de vifs effets de lumière et de couleur. Solimena réalise ici la plus large synthèse de toutes les dominantes de la tradition picturale napolitaine. Dans les premières œuvres, où l'influence de Preti est évidente, on avait distingué une orientation personnelle vers une éloquence " classiciste " qui aurait pu caractériser sa production postérieure et marquer un moment " négatif " dans son évolution, par cette tendance à académiser le baroque. Il est certain d'ailleurs qu'il eut des contacts à la fin du siècle avec les milieux artistiques romains, notamment avec celui qui était soumis au classicisme de Maratta, et qu'à cette époque il s'intéressa plus particulièrement aux sources classicisantes de la peinture émilienne, de Dominiquin à Reni. Ce retour rationaliste au " bon goût ", qui eut son équivalent littéraire dans le mouvement de l'Arcadie au XVIIIe s., caractérise l'œuvre entière de Solimena du début du siècle à 1730-1735. Toute cette période est marquée par l'unité de ton que donne un purisme formel absolu. Ce fut une époque d'intense production. Solimena exécute des commandes pour des églises de Naples (Gesù Vecchio, S. Anna dei Lombardi, S. Maria Donnalbina, S. Domenico Maggiore, Gerolomini, chartreuse de S. Martino) et pour des collectionneurs napolitains ou des églises de la région (Aversa, Monte Cassino, Capoue) ; il envoie également de nombreuses œuvres dans les plus grandes villes d'Italie et d'Europe (Allégorie pour Louis XIV, 1700, Ermitage, transformé au cours du XVIIIe s. en Allégorie pour Catherine II ; Enlèvement d'Orythie, 1700, Rome, Gal. Spada ; Rébecca et Jacob, Rébecca et Éléazar, Venise, Accademia ; Deborah et Barach, Judith, Corni-gliano, villa Bombrini ; Massacre des Justiniens à Scio, 1715, pour la salle du Conseil de Gênes, perdu et connu par la grande esquisse de Capodimonte ; quatre toiles à sujets bibliques, Turin, Gal. Sabauda ; importantes séries de toiles au K. M., au Belvédère et dans la coll. Harrach à Vienne ; Annonciation, 1733, Venise, S. Rocco). Les meilleures réalisations de cette époque sont ses peintures à fresque, et en particulier celle qui se trouve au-dessus du portail de l'église du Gesù Nuovo à Naples avec Héliodore chassé du Temple (1725 ; modèle au musée de Toledo, U. S. A. et tableau de même sujet au Louvre). Cette période de l'activité de Solimena eut une influence considérable sur les peintres locaux, de De Mura à Bonito et à Celebrano, influence qui sera à l'origine de l'orientation académisante du XVIIIe s. napolitain, qui trouve son point d'aboutissement dans les modes du Néo-Classicisme naissant. Mais, à partir de 1732-33, Solimena retourne, de façon inattendue, au " ténébrisme " véhément de sa première maturité ; des empâtements aux larges accords chromatiques contrastés le libèrent de la manière précédente.

   Solimena donne à ce moment — par l'intensité du coloris et la pénétration psychologique — quelques-uns des meilleurs portraits de la peinture napolitaine : Autoportrait (Naples, museo di S. Martino), Portrait d'un chevalier de l'ordre de Saint-Janvier (Naples, coll. Gaetani) et le Portrait de la princesse impériale de Lusciano (Naples, coll. Pisani). Son œuvre influença toute la peinture napolitaine de l'époque ainsi que la sculpture et l'architecture. Outre celles qui sont citées, les peintures de l'artiste, fort nombreuses, sont conservées dans plusieurs autres églises de la région de Naples, à Capodimonte, au museo di S. Martino et dans les coll. part. napolitaines ainsi que dans d'autres musées (Brera ; Rome, G. N. ; Dresde, Gg ; musée de Budapest ; Londres, N. G. ; Liverpool, Walker Art Gal. ; Oxford, Ashmolean Museum ; musée de Cleveland ; Metropolitan Museum ; musées de Chambéry, de Montargis, de Toulouse, du Havre ; Mauritshuis ; musée de Cordoue ; Prado ; Escorial). L'Albertina, le British Museum et le museo di S. Martino de Naples conservent des séries de dessins de Solimena.