Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Courmes (Alfred)

Peintre français (Bormes-les-Mimosas, Var, 1898  – Paris 1993).

Après un séjour en sanatorium, Courmes rencontre Roger de La Fresnaye en 1919 et s'établit à Paris en 1925, exposant régulièrement aux Salons des indépendants et d'automne. Si l'on excepte quelques toiles cubistes des débuts (Nature morte cubiste au pinceau, 1921, coll. part.), il pratique une peinture d'un illusionnisme très typique des années 35-40 (touche invisible, plans de couleur miroitants, etc.). Il peint des portraits (Mlle Courmes, 1921, Peggy Guggenheim, 1926, Musée national de la coopération franco-américaine de Blérancourt), mais ne dédaigne pas une certaine caricature dans des thèmes populistes (l'Étrangleur à la casquette rose, 1925). Surtout, il excelle dans le détournement humoristique et généralement sexuel de thèmes issus de la religion ou de la culture savante. Inaugurée durant les années 1930 avec un Saint Sébastien (1934-35, Paris, M. N. A. M.) pour une part vêtu en matelot (avec béret, fixe-chaussettes, etc.), cette série prend une ampleur particulière après les années 60 : la Pneumatique Salutation Angélique (1968, la Vierge en midinette abordée par le Bibendum Michelin), ou encore Pourquoi... ? Toujours faire la brouette ! (1978, Œdipe et le Sphinx) utilisent toutes les ressources de l'irrévérence et du rapprochement verbal (Holopherne heureux à en perdre la tête, 1987). Courmes reçoit au demeurant quelques grandes commandes de l'État (la France heureuse, décor pour la Délégation française à Ottawa, 1937 ; le Toucher, décor pour la Manufacture nationale de Sèvres, 1937). Ses œuvres sont principalement dans les collections privées, mais aussi au M. N. A. M. et au F. N. A. C. de Paris et au musée d'Issoudun ; le musée de Roubaix lui a consacré une rétrospective (1989).

Courtin (Pierre)

Graveur et peintre français (Rebréchien, Loiret, 1921).

Premier à imposer une conception de la gravure comme sort visuel et tactile, il commence à apprendre la gravure avec le buriniste Soulas, en 1939, à Orléans et vient, en 1942, à Paris. Ayant réalisé son premier burin abstrait en 1944 et après avoir travaillé quelque temps avec Jacques Villon, il devient imprimeur d'estampes chez l'imprimeur taille-doucier Leblanc, en 1947, et y fait de nombreux tirages pour Villon et pour R. Vieillard jusqu'en 1951. S'isolant au Mesnil-le-Roi (Yvelines), il s'occupe uniquement de ses propres gravures. Sociétaire de la Jeune Gravure contemporaine depuis 1949, il devient en 1950 membre du comité du Salon de mai, où il expose chaque année. Il fait sa première exposition particulière en 1951, à Paris, chez Colette Allendy. Courtin se veut graveur pur, c'est-à-dire que, pour lui, graver, c'est " inciser profondément le métal avec un outil tranchant et sans l'aide d'aucun acide rongeur, creuser plus ou moins dans l'épaisseur d'une plaque de zinc, de cuivre ou de toute autre matière dure " et obtenir ainsi une troisième dimension, " réelle, mesurable, sensible au toucher ". Ainsi, " la gravure ressemble à un petit bas-relief ". Les gravures de Courtin, quand elles ne sont pas uniques comme le livre des Images pour Eluard, comportent fort peu d'épreuves, chacune de celles-ci, rarement semblables, constituant un original. Par sa conception rigoureuse et l'usage exclusif du burin, Courtin a rendu à la gravure ses vertus originelles. Son exposition en 1962 à la gal. Berggruen (Paris) l'a consacré parmi les premiers graveurs contemporains. Il a commencé à peindre en 1966 (huiles, gouaches, détrempes sur toile ou sur panneau) : dans un espace à deux dimensions prennent place symétriquement des motifs décoratifs et symboliques plus ou moins dérivés des cultures archaïques (Grand Omniscient, 1966, gouache). L'artiste est représenté au M. N. A. M. de Paris.

Courtin (Jacques-François)

Peintre français (Sens 1672 [?]  – Paris 1752).

Élève de Louis Boullogne (av. 1700), il fut académicien (Loth et ses filles, 1710, Paris, E. N. S. B. A.) et exécuta le dernier may de Notre-Dame (Saint Paul ressuscitant Eutyque, 1707, Toulouse, église Saint-Étienne). On lui doit des scènes de genre (le Jeu de bilboquet, coll. part.), dont certaines ont été popularisées par la gravure (le Billet doux ; Jeune Fille au masque).

Courtois (Guillaume) , dit Guglielmo Cortese

Peintre français (Saint-Hippolyte, Doubs, 1628  – Rome 1679).

Frère de Jacques Courtois, il vint tôt à Rome et y demeura. Sa formation se fit dans l'atelier de Pierre de Cortone, dont l'influence marqua sa peinture tout au long de sa carrière ; c'est dans une manière " cortonesque ", animée et sonore, que G. Courtois, employé par Bernin, produisit nombre de décors dans les églises édifiées sous le pontificat d'Alexandre VII Chigi. Ses premiers travaux connus sont ceux de l'église S. Mario (1653). Il travailla ensuite à Saint-Jean-de-Latran, puis au palais du Quirinal (Bataille de Josué, 1656-57). Des années 1660 datent le tableau d'autel de la chapelle Chigi à Castelgandolfo (1662), la décoration de l'abside de l'église de l'Ariccia, les deux tableaux de la chapelle Cesi (Rome, S. Prassede), ceux aussi de la G.N., Gal. Corsini, de Rome (Adorations des mages et des bergers, jadis attribuées à Passeri). Son Bon Samaritain du musée de Besançon, proche de Mola et tout romantique d'effet, évoque irrésistiblement Delacroix. La personnalité de Guillaume Courtois, bien distincte de celle de son frère aîné, avec qui il collabora parfois (fresques de la chapelle Prima Primaria, Collegio Romano de Rome) et dont le style reste plus nerveux et précis, n'a été que récemment remise au premier plan ; ses tableaux, brillamment colorés et fortement contrastés, servis par une touche large et une matière savoureuse, et ses dessins, souvent attribués jusque-là à Lanfranco (Rome, Düsseldorf), font de lui, avant peut-être Ciro Ferri et Lazzaro Baldi, un des plus brillants élèves de Pietro da Cortona.

Courtois (Jacques) , dit il Borgognone

Peintre français (Saint-Hippolyte, Doubs, 1621  – Rome 1675).

Arrivé vers l'âge de quinze ans en Italie, Courtois y fera toute sa carrière. Un temps soldat dans les troupes espagnoles, il étudie ensuite la peinture sous des maîtres obscurs, passe à Bologne, où il rencontre le Guide et l'Albane, à Florence, où il travaille avec Asselijn, puis à Sienne, où les sources le disent élève d'Astolfo Petrazzi. Vers 1640, il arrive à Rome, où il peint à fresque un plafond au couvent de S. Croce in Gerusalemme. Il fréquente le milieu des " Bamboccianti " ; sous l'influence de Cerquozzi et probablement de Salvator Rosa, dont la première Bataille connue est datée 1637, Courtois se spécialise dans la peinture de batailles, dont il deviendra le plus célèbre représentant en Europe, alors que son frère Guillaume, dans l'orbite de Pierre de Cortone, se consacrera plutôt à la peinture religieuse.

   Bien que la chronologie soit peu sûre (Courtois n'a presque jamais signé ou daté ses œuvres), ses premiers tableaux connus (Rome, Gal. Doria Pamphili et Gal. Capitoline) le montrent très proche des Bamboccianti comme Van Laer, Miel ou Cerquozzi, peignant avec timidité et précision, dans des mises en page traditionnelles où le groupe principal est placé sur un premier plan surélevé et la bataille reléguée au fond. Dans les années 1650, Courtois voyage ; il est employé à deux reprises (1652 et 1656-57) par Mathias de Médicis, gouverneur de Sienne (4 grandes Batailles, Florence, Pitti), séjourne à Fribourg (1654-55), à Venise (peintures pour le palais Sagredo, en partie conservées dans la coll. Derby et à la Gg de Dresde). De retour à Rome, il entre dans l'ordre des Jésuites (décembre 1657) et continue à peindre des œuvres religieuses (fresques au Collegio Romano, 1658-1660 ; Martyre des quarante pères jésuites, Rome, Quirinal) et surtout des batailles, d'un format souvent important et librement exécutées (plusieurs à Munich, Alte Pin.). On lui doit la formule nouvelle du genre : au lieu des vues à vol d'oiseau minutieusement topographiques, au lieu des combats en frise, que la Renaissance avait empruntés aux bas-reliefs antiques et qu'affectionnaient encore A. Falcone et même S. Rosa, c'est une escarmouche de cavalerie à l'intérieur de laquelle le spectateur est entraîné. Courtois excelle à placer ces combats dans de larges paysages où la fumée des pistolets se fond dans des nuages délicatement colorés, qui peuvent même devenir le véritable sujet du tableau (Paysage avec voyageurs, Vaduz, coll. Liechtenstein). Il est aussi l'auteur de quelques estampes, de beaux dessins à la plume et au lavis de bistre (Louvre, British Museum, presque tous signés d'une croix). Si le nom de Courtois, à cause de son influence sur le développement du genre en France (Joseph Parrocel) et en Italie (Monti, Simonini), est facilement accolé à toute peinture de bataille, ses œuvres authentiques sont d'une haute qualité et justifient l'immense réputation qu'il eut de son temps et qu'attestent encore ses biographes du XVIIIe s., Pascoli et Dezallier d'Argenville.