Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Taunay (Nicolas-Antoine)

Peintre français (Paris 1755 – id. 1830).

Fils d'un chimiste et peintre émailleur, Taunay entre tout jeune dans l'atelier de Lépicié, puis travaille chez Brenet et chez Casanova. Il peint des paysages sur nature avec ses camarades Demarne, Bidauld, Bruandet et Swebach ; en 1776, il voyage avec Demarne en Dauphiné et en Suisse. Agréé à l'Académie en 1784, il obtient par faveur du comte d'Angiviller d'être pensionnaire à Rome, où il reste jusqu'en 1787. Il est membre de l'Institut à sa fondation, en 1795. C'est en 1816 qu'il part pour le Brésil, accompagné par sa famille, avec une mission d'artistes et de savants français ; il fonde à Rio de Janeiro l'Académie des beaux-arts (le musée de Rio conserve aujourd'hui une belle série de ses tableaux). Il est de retour en France en 1824. Sa production, très importante, comporte essentiellement des paysages animés de figures : scènes historiques contemporaines (Bonaparte recevant des prisonniers sur le champ de bataille, 1801 ; Entrée de l'armée française à Munich, 1808, Versailles ; les Français en Italie, 1798 et 1804, Versailles et Louvre), scènes d'histoire de France (Henri IV et Sully, 1822, musée d'Évreux), scènes religieuses (Prédication de saint Jean-Baptiste, 1818, préfecture de Nice) ou simplement sujets anecdotiques (parades, charlatans, concerts), souvent traités dans un goût hollandisant à la Demarne. Taunay a donné aussi de brillants portraits (Van Spaendonck, Versailles). Beau coloriste, il a le goût des tableaux clairs et lumineux où les tons bleutés sont animés par des notes de vermillon ou de jaune clair. Il campe avec adresse ses petits personnages, indiqués d'une touche grasse, tout à la fois ferme et alerte.

Teige (Karel)

Peintre tchèque (Prague 1900 – id. 1951).

Karel Teige a été l'un des principaux animateurs de l'avant-garde à Prague entre les deux guerres. Il a effectué des études d'histoire de l'art à l'université ainsi que de peinture à l'École des beaux-arts de Prague. En 1922 et plus tard en 1924, il effectuera des séjours à Paris, de même qu'en 1925 à Moscou et à Leningrad, d'où il reviendra profondément influencé par les films soviétiques et l'art constructiviste. Dès ce moment-là, il participe à la revue Život, publiée à Prague avec une orientation proche de l'Esprit nouveau. Teige est alors lié avec le Dadaïsme : il publie ensuite, en compagnie de Jaromir Krejcar, la revue Pasmo, qui va paraître en 1926 à Prague : Karel Teige est à l'époque un artiste constructiviste qui se consacre à la typographie dans un esprit influencé par l'art soviétique, ainsi que par l'esthétique du néo-plasticisme. Ses œuvres sont proches de celles de Jan Tschichold, en Allemagne, ou encore de Piet Zwart, aux Pays-Bas. Il publie à Prague, en 1927, la revue Red, qui se poursuivra jusqu'en 1931 et constituera l'un des organes importants de la diffusion des idées nouvelles dans le centre de l'Europe. En 1930, Karel Teige a l'occasion de séjourner au Bauhaus de Dessau. Par la suite, il changera de manière et deviendra un artiste surréaliste qui utilisera la technique du photomontage.

teinte

Terme utilisé jusqu'à la fin du XVIIIe s. pour désigner l'aquarelle. Couleur résultant du mélange de plusieurs couleurs. Couleur considérée sous le rapport de sa qualité (par ex. toute la gamme des bleus : cobalt, outremer, Prusse). Diversité des nuances d'une même couleur.

   On emploie le mot teinte en parlant des couleurs, indépendamment des effets et des combinaisons du clair et de l'obscur, alors que le ton est le degré de saturation ou de luminosité d'une teinte et désigne la valeur relative des couleurs selon une échelle allant du plus clair au plus foncé. Une teinte peut avoir plusieurs tons, qui constituent une gamme. Une teinte rompue est une teinte qui a été additionnée de noir ou de bleu ; une teinte plate est une teinte occupant une certaine surface et ayant partout la même nuance et la même intensité. La demi-teinte est un ton intermédiaire entre l'ombre et la lumière.

Télémaque (Hervé)

Peintre haïtien (Port-au-Prince, Haïti, 1937).

Après des études avec Julian Levi à l'Art Student's League de New York (1957-1960), Télémaque arrive à Paris en 1961. Par son imagerie, il instaure entre l'objet et sa représentation, entre celle-ci et le nom de l'objet et, enfin – par les titres de ses toiles –, entre ces noms et leur résonance symbolique toute une série de rapports dont l'ambiguïté, évoquant Magritte, n'est pas la moindre marque (Dérive no 1, 1984). Un montage méticuleux organise de multiples déplacements de significations par la mise en rapport d'objets apparemment hétéroclites (Banania no 3, 1965). Au pseudo-réalisme de sa technique de représentation vient parfois se joindre un objet réel, mouchoir ou chaussure (Attendre, 1965 ; le Mal des hauteurs, 1966), ou, au contraire, doublement faux : un poids représenté découpé et séparé de la toile, à laquelle il reste lié (Errer, 1966, Paris, M. N. A. M.). Par une utilisation systématique de l'allégorie et du symbole (la Scène [l'Homme à la cicatrice], 1970), les toiles de Télémaque se présentent comme des miroirs qui renvoient au spectateur l'image de ses contradictions (À son habitude, il ne regarda point, 1989). Le collage de papiers couleur découpés, commencé en 1967, devient l'activité majeure (exp. musée d'Art moderne de la Ville de Paris en 1976). Ainsi, il propose dès les années soixante des collages mettant en scène des objets choisis pour leur caractère obsessionnel ou autobiographique (Études pour nouvelles de France, 1988). Les images, cloisonnées, sont réunies sous un même cadre avec l'adjonction de papiers-calque et d'objets rapportés : œillets, étiquettes, spirales (exp. gal. Maeght, 1979). Les collages (le Propre et le Figuré, 1982, Paris, M. N. A. M.) offrent des compositions plus abstraites. Ses collages (1967-1991) ont été présentés à Paris en 1991, et ses tableaux récents, en 1993 (gal. Jacqueline Moussion).

Tempel (Abraham Van den)

Peintre néerlandais (Leeuwarden v. 1622/1623 – Amsterdam 1672).

Fils du peintre d'histoire Lambert Jacobsz, dont il fut l'élève, ainsi que celui de Joris Van Schooten, il se maria et s'inscrivit à la gilde des peintres à Leyde en 1648, puis s'établit à Amsterdam à partir de 1660. Proche de Nicolaes Helt-Stockade, avec qui on le confond parfois, ainsi que de Jan Van Noordt, il subit très fortement l'influence de Barthalomeus Van der Helst et, comme ce dernier, laissa de grands portraits d'apparat conventionnels, mais d'une facture raffinée ; il rend avec habileté le brillant des étoffes de luxe et utilise une riche et délicate polychromie, tandis que les fonds de ses tableaux, donnant sur des parcs et de riches balustrades ou colonnes, ajoutent une agréable note décorative : l'Amiral Jan Van Amstel et sa seconde épouse (1671, Rotterdam, B. V. B.). Citons aussi les portraits de famille du Rijksmuseum (1671) et de la Kunsthalle de Hambourg (la Famille Muyssart, 1672), le Portrait de femme (1662, Louvre), le Couple (musées de Berlin).

   Peintre d'histoire, Tempel s'est exprimé dans un style emphatique, aux formes rondes, dérivé de celui de Salomon de Bray et de Jacob Adriaensz Backer (3 monumentales toiles allégoriques, 1650/1651, musée de Leyde). Michiel Van Musscher et Carel de Moor furent au nombre de ses élèves.