Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Kolář (Jiří)

Poète tchèque et auteur de collages (Protivin  1914-Prague 2002).

Après avoir passé par le Surréalisme, cet autodidacte a trouvé sa source d'inspiration dans les manifestations de la civilisation urbaine. Dans les années 40, il fit partie du groupe Quarante-Deux et développa la poétique du " folklore urbain " (recueils le Limbe et autres poèmes, les Journées dans l'année). Kolář a progressivement abandonné la poésie verbale pour s'acheminer vers une " poésie évidente ", fondée essentiellement sur le collage, qui offre cette possibilité de " méditation pure " qu'avant lui Kurt Schwitters avait pour la première fois exploitée. Dans les années 60, il imagine une vingtaine de types de collages à 2 ou à 3 dimensions, les plus originaux étant sans conteste le " khiasmage " et le " déployage ". Le " khiasmage " est composé d'un grand nombre de fragments de pages de vieux livres, de textes en caractères latins, arabes ou hébraïques, de signes chinois, de xylogravures, de partitions, d'horaires de train, de pages du Petit Larousse illustré, souvent agencés en formes géométriques de caractère emblématique (Cercle, 1966, musée de Prague). Le " déployage ", qui représente le pôle maniériste de Kolář, est réalisé à partir de reproductions d'œuvres d'art, de clichés, découpés en bandes ou en carrés et restitués dans un ordre nouveau. Fondé sur les principes de la variation et de la permutation, le déployage crée des anamorphoses qui ne délient pas seulement des portraits de Bronzino ou d'Ingres mais des lieux, tels que l'Arc de triomphe ou l'île Saint-Louis.

   Par leur caractère constructif, ces papiers collés se situent souvent aux confins de l'Abstraction géométrique, mais ils conservent leur pouvoir poétique. Kolář est représenté notamment à Paris (M. N. A. M.), au musée du XXe Siècle de Vienne ainsi que dans de nombreuses coll. part. Une exposition lui a été consacrée (Madrid, Centro de Arte Reina Sofia) en 1996.

Kölderer (Jörg)

Peintre et architecte autrichien (Tyrol, seconde moitié du XV e s.  – Innsbruck 1540).

Kölderer est moins important comme personnalité proprement créatrice que comme chef d'un atelier qui travailla pour l'empereur Maximilien, et dont les productions principales sont les Miniaturen mit dem Triu[m]phzug Maximilians (Albertina), peintes sur parchemin. Ces miniatures, certainement exécutées par plusieurs artistes, devaient servir de projets pour des gravures sur bois et doivent avoir été achevées en 1512. On y décèle une forte affinité stylistique avec les œuvres contemporaines d'Altdorfer, ce qui put faire supposer que le jeune Altdorfer avait été influencé par l'atelier de Kölderer. Le fait que des œuvres signées K. S. (Darstellungen von Geschützen, Waffen und Landsknechten, " Représentations de canons, d'armes et de lansquenets "), suivant deux graphies (Vienne, B. N., et Munich, Staatsbibl.), montrent un style plus archaïque et très descriptif, laisse supposer que c'est Altdorfer, au contraire, qui a suscité ce nouveau style de miniatures. Il ne reste pratiquement rien des travaux d'architecture de Kölderer, qui, après la mort de Maximilien, dirigea l'édification de son tombeau.

Kolig (Anton)

Peintre autrichien (Neutitschein, Moravie, 1886  – Nötsch, Carinthie, 1950).

Il fréquente de 1904 à 1906 l'École des arts décoratifs et de 1906 à 1912 l'Académie des beaux-arts de Vienne. En 1911, il participe, ainsi que Kokoschka, Faistauer, Wiegek et d'autres, à la seconde exposition du Neukunstgruppe, manifestation de l'art moderne autrichien organisée dans les salles du Hagenbund. Klimt, l'ayant remarqué, lui fait accorder une bourse, qui lui permet de séjourner à Paris de 1912 à 1914.

   Après la Première Guerre mondiale, l'artiste s'installe à Nötsch. De 1928 à 1943, il est professeur à l'Académie de Stuttgart. Kolig subit tout d'abord l'influence de Klimt. Un très beau portrait, la Femme de l'artiste avec des fleurs (1913, Vienne, Österr. Gal.), révèle un talent comparable à celui de Corinth. Le Général Seibt (1918, id.) s'apparente à l'Expressionnisme pittoresque qui caractérise les premières œuvres de Kokoschka et de Boeckl. L'année 1922 marque un retour au calme. Conformément à une évolution sensible dans toute l'Europe, Kolig semble séduit par l'art monumental, et ses tableaux, aux contours appuyés et au coloris toujours vif, acquièrent un nouveau relief : Portrait de famille (1928, id.) ; Grand Nu au miroir, 1926, Vienne (1928) ; Autoportrait (1941, Salzbourg, Residenzgal.). À partir de 1944, le coloris devient particulièrement intense, lumineux et contrasté. Le style figuratif s'exprime désormais de façon elliptique, et le langage est celui d'un visionnaire. Le nu masculin est un des thèmes qui l'a le plus souvent inspiré : ainsi dans de très nombreux dessins d'un graphisme rapide (exposition Vienne, Albertina, 1985). Il a aussi traité le nu masculin dans des scènes allégoriques exécutées à la fin de sa vie (la Civilisation III, 1947). Dans les fresques qu'il a peintes en 1925 pour le crématorium de Vienne et en 1930 pour l'hôtel de ville de Klagenfurt, ainsi que dans les tapisseries qui ornent le Festspielhaus de Salzbourg (1926), semble revivre un certain esprit baroque. Une exposition rétrospective de son œuvre a eu lieu en 1981 à Graz, Kunstlerhaus.

Kollwitz (Käthe)

Artiste allemande (Königsberg 1867  – Moritzburg, Saxe, 1945).

Ayant eu une vie ravagée par deux guerres (la première lui prit son fils ; la seconde, son petit-fils) et le nazisme, qui l'exclut de toutes les instances officielles et ne lui laissa mener, sous une perpétuelle menace, qu'une vie très retirée, K. Kollwitz se fit d'abord connaître comme dessinateur et graveur dans des affiches pour les enfants misérables de l'Allemagne vaincue en 1918 (Nos enfants ont faim ou Aidez les Russes, 1921), au moment où l'Union soviétique était ravagée par la famine. Elle avait auparavant appris la sculpture à Paris au début du siècle. Sa première grande œuvre fut le Monument qu'elle éleva à la mémoire de son fils Peter, tué en 1914, auquel elle travailla de 1914 à 1932 et qui a pris place au cimetière d'Essen, près de Dixmude. Elle travaille secrètement durant l'époque nazie, et c'est son sentiment maternel qui l'inspire le plus (Pietà, 1938, et surtout sa Tour des mères, 1937). À cette œuvre comme à ce qui fut son dernier travail, une série de huit gravures, la Mort, s'applique ce qu'elle écrivait en 1941 : " Voici mon testament... plus jamais de guerre. " On a souvent rapproché K. Kollwitz de Barlach. Tous deux sont en effet profondément allemands et russophiles. Mais elle exprime avec une plus grande sobriété des sentiments viscéralement féminins d'horreur devant l'injustice. Très célébrée par l'ex-République démocratique allemande, abondamment montrée dans les pays de l'Europe de l'Est, K. Kollwitz l'a été trop peu en dehors du bloc communiste. Une importante exposition au musée de Hambourg lui a cependant été consacrée en 1982.