Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
S

Sutherland (Graham)

Peintre britannique (Londres 1903  – id.  1980).

Élève du Goldsmith College de Londres, Sutherland se spécialisa dans la gravure à l'eau-forte et au burin, qu'il enseigna dans la première partie de sa carrière. Il ne commença à peindre à l'huile qu'en 1935, un an après son premier séjour dans le Pembrokeshire. En 1936, il exposa avec les surréalistes anglais et, son inspiration stimulée par la conception surréaliste de l'" objet trouvé ", il peignit une série de paysages du pays de Galles qui firent immédiatement de lui, avec Nash et Piper, un maître du néo-romantisme anglais. L'attitude mystique et panthéiste devant la nature, qui était celle de William Blake et de Samuel Palmer, se retrouve dans son œuvre, dont le sentiment poétique intime était tout à fait en harmonie avec la sensibilité anglaise de l'époque (Entrée d'un sentier, 1939, Londres, Tate Gal.).

   En 1937, Sutherland s'installa à Trottiscliffe, village du Kent où il habite toujours, bien que, depuis 1947, il passe une partie de l'année dans le midi de la France. Durant la guerre, Sutherland exerce comme peintre de guerre officiel, décrivant les bombardements en Galles du Sud et à Londres. En 1946, la commande d'une grande crucifixion pour l'église St. Matthew de North-ampton le pousse à traiter la figure humaine et trouve des répondants dans la série des Têtes d'épines et des Arbres d'épines.

   Par la suite, ses séjours dans le sud de la France, où, en 1955, il achète la villa Blanche à Menton, l'amènent à utiliser des couleurs plus vives dans une thématique méditerranéenne de palissades, de palmes et de vignes (Grande Pergola de vigne, 1948, British Council). Sutherland a également peint une série de portraits ; le premier dont il reçut la commande, en 1949, fut celui de Somerset Maugham (Londres, Tate Gal.), suivi notamment par ceux de Churchill, d'Adenauer, d'Edward Sackville-West (1954, coll. part.), du Prince de Fürstenberg (1959, château de Donaueschingen, coll. de Fürstenberg), de Lord Beaverbrook, de Paul Sacher et d'Helena Rubinstein.

   Après l'achèvement de l'immense Christ en gloire (1954-1957) pour la nouvelle cathédrale de Coventry, Sutherland développe, au cours des années 60, une thématique variée : paysages du sud de la France, fontaines, formes mécaniques biomorphiques, animaux. Retournant en 1967 dans le Pembrokeshire, il est de nouveau fasciné par les paysages et multiplie les vues des petits estuaires de Sandy Haven et du Picton (Estuaire avec oiseaux, 1971-72, Picton Castle Trust), où, en 1976, est inaugurée la Graham Sutherland Gallery. Parallèlement, il réalise deux suites de lithographies, les Abeilles et le Bestiaire d'Apollinaire. Sutherland expose régulièrement depuis 1938 ; des expositions rétrospectives lui ont été consacrées à la Biennale de Venise et au M. A. M. de la Ville de Paris (1952), à la Tate Gal. de Londres (1953, 1982), à la Biennale de São Paulo (1955).

   Il est représenté à New York (M. O. M. A.) par un ensemble significatif de toiles, ainsi qu'au musée de Bâle, à Berlin (N. G.), à Bruxelles (M. R. B. A.), à Paris (M. N. A. M.), à Buffalo (Albright-Knox Art Gal. : Arbres épineux, 1945).

Suvée (Joseph-Benoît)

Peintre français d'origine flamande (Bruges 1743  – Rome 1807).

Formé à Bruges, Suvée arriva à Paris en 1762 et entra dans l'atelier de Bachelier. En 1771, il remporta devant David, qui devait lui en garder rancune, le grand prix de l'Académie avec son Combat de Minerve contre Mars (musée de Lille ; esquisse au musée de Rouen) et partit l'année suivante pour l'Italie, où il devait rester jusqu'en 1778, visitant tour à tour Rome, Naples, la Sicile, Malte et Venise. À son retour, il devait prendre une place de premier plan parmi les peintres d'histoire et succéder en 1792 à Ménageot à la tête de l'Académie de France à Rome, mais il ne put occuper son poste avant 1801. C'est lui qui eut la responsabilité du transfert du siège de l'Académie du palais Mancini, dit aussi " palais de Nevers ", à la Villa Médicis, où l'Académie se trouve encore.

   Ses tableaux d'histoire (Mort de l'amiral Coligny, 1787, musée de Dijon ; Cornélie, mère des Gracques, 1795, Louvre) ou d'églises (Naissance de la Vierge, 1779, église Notre-Dame-de-l'Assomption, Paris) comme ses sujets mythologiques (Dibutade ou l'Origine du dessin, 1791, musée de Bruges ; Fête à Palès, 1783, musée de Rouen) sont le fait d'un artiste habile, mais froid. Suvée essaie, non sans adresse, de s'adapter à la formule néo-classique, qui peu à peu l'emporte, mais reste en fait fermement attaché à la formule académique que Pierre et d'Angiviller avaient imposée à la peinture du temps de Louis XVI.

Svanberg (Max Walter)

Peintre et graveur suédois (Malmö 1912-? 1994).

À partir de 1930, il fréquenta diverses académies privées de Malmö et de Stockholm. Vers 1940, il fut de plus en plus attiré par le Surréalisme et devint un membre actif du groupe Minotaure, qu'il fonda avec E. Nemes, A. Yunkers et C.O. Hultén, et des Imaginistes, groupe fondé à Malmö en 1943 et dont il se détacha dix ans plus tard. L'art de Svanberg a pour thème exclusif l'exaltation de la femme. Dans certaines des premières œuvres, on peut déceler l'influence de Salvador Dalí. Bientôt, cependant, Svanberg trouva son style personnel dans des dessins à l'encre de Chine, filigranés et comportant un décor dont les répétitions de symboles sexuels évoquent Beardsley. En réaction contre un Surréalisme orthodoxe, agresseur du " beau ", il entreprit, en 1943, des compositions aux couleurs d'une violence exotique, dans une technique hétéroclite et raffinée où pastel gras, tempera, aquarelle, applications et mosaïque de perles interviennent. Son univers est peuplé d'étranges personnages, où la femme et l'oiseau dessinent des constellations nées de suggestions oniriques. Ce mysticisme érotique est souligné par les titres poétiques des peintures : le Collier de perles de la conversation imaginative, pastel gras et gouache (1953) ; Le cœur de la beauté ricane (1957) ; Étrange Gestation, en trois phases, aquarelle (1960) ; Amours joueurs de la constellation possédée, aquarelle (1963).

   À partir de 1960, Svanberg a également utilisé le collage d'images découpées pour illustrer ses visions érotiques, notamment les suites Hommage des constellations étranges à G. en dix phases (1963-64), la Chasteté et la Tentation, en dix phases (1964). Il a illustré, à l'encre de Chine et à l'aquarelle, les Illuminations de Rimbaud, en 1958. En 1959, M.W. Svanberg, seul, représente la Suède à l'exposition du Surréalisme international organisée par Breton à la gal. Cordier.