Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
T

toile peinte

On désigne ainsi, par opposition aux tableaux, aux peintures murales ou aux grandes compositions qui ornent les murs de manière permanente, des œuvres exécutées sur un support textile de grand format.

   De ce genre de tentures, très en vogue au Moyen Âge, seul un petit nombre d'entre elles nous sont parvenues. Les plus célèbres sont conservées au musée de Reims. Selon la tradition, les toiles peintes auraient servi de modèle de tapisserie à la manière des cartons, mais il est également vraisemblable qu'elles servaient, comme de véritables décors de théâtre, à la représentation des mystères joués sur le parvis des églises, notamment aux XVe et XVIe siècles. D'autres, destinées à l'ornementation des édifices, étaient tendues sur des châssis ou suspendues comme des bannières sur les façades des maisons ou en travers des rues, à certaines occasions : fêtes religieuses, entrées solennelles dans les villes. Certaines enfin, qui imitaient les tapisseries, servaient sans doute au décor intérieur des palais. D'une manière générale, l'exécution de la plupart des toiles peintes reste sommaire : dessin au trait noir sur fond blanc et couleurs a tempera sans apprêt.

Toledo (Juan de)

Peintre espagnol (Lorca v. 1615 – Madrid 1665).

Né dans le royaume de Murcie, fils de peintre et formé par son père, il connut un destin nomade et quelque peu hors série. Il fut soldat en Italie et y atteignit le grade de capitaine de cavalerie. Il se serait lié d'amitié à Rome avec Cerquozzi, le « Michel-Ange des batailles », et aurait appris de lui à peindre des sujets guerriers, bien que ses œuvres fassent plutôt songer à Salvator Rosa et aux peintres de l'Italie du Sud. Rentré en Espagne, il s'installa d'abord à Grenade et y conquit le succès par ses tableaux de batailles, terrestres et navales. Il séjourna ensuite à Murcie, collaborant avec Gilarte à la chapelle du Rosaire de S. Domingo, y peignant sans doute la grande Bataille de Lépante en ne laissant à Gilarte que la partie décorative. Il se fixa enfin à Madrid, où il termina sa vie. Le Prado (avec 6 tableaux de combats navals entre Espagnols et Turcs, de débarquements, de naufrages), les musées de Murcie et de Porto, le Bowes Museum à Barnard Castle, la coll. Harrach à Vienne l'accréditent – avec la turbulence de ses figurines adroitement groupées et leur lumière un peu glauque – comme un peintre habile et sensible, le meilleur d'Espagne en ce genre. Mais on ne doit pas oublier que Toledo fut dans sa période madrilène un excellent peintre de tableaux religieux. Ses œuvres du couvent des Mercédaires d'Alarcón à Madrid (Immaculée du grand retable, Saint Pierre Nolasque) marquent sa place au tournant du XVIIe s. entre le style encore un peu raide des disciples de Carducho et les prémices du baroque.

Toma (Gioacchino)

Peintre italien (Galatina, Lecce, 1836 – Naples 1891).

Afin d'étudier le dessin et la peinture, il se rend à Naples en 1854, où, pour vivre, il exerce différents métiers. Il participe aux mouvements révolutionnaires de 1859 et rejoint Garibaldi en 1860. Il participe en 1861 à l'Exposition nationale de Florence en exposant Un prêtre révolutionnaire. Marqué par ses aînés, F. Palizzi et D. Morelli, Toma traite l'événement historique (Luisa Sanfelice en prison, 1874, Rome, G. A. M.) comme un fait quotidien ; sous son pinceau, cet événement devient un épisode de la vie humaine, libéré de toute gêne de composition. On trouve dans ses toiles, à travers la pureté des accents chromatiques, une lumière dont le rendu est nettement dérivé du XVIIIe s. (Il Viatico dell'orfana, 1877, Rome, G. A. M.). Les paysages et les portraits qu'il exécute après 1880 présentent un traitement plus libre, qui le rapproche des Macchiaioli ou de G. De Nittis, surtout dans ses études de plein air. Il a laissé un recueil de Mémoires, Souvenirs d'un orphelin, publié à Naples en 1898. Ses œuvres sont conservées à Naples (Capodimonte) ainsi qu'à la G. A. M. de Rome. Une exposition a été consacrée à Toma (Lecce, Museo Provinciale) en 1996.

Tomasello (Luis)

Artiste argentin actif à Paris (Plata 1915).

Dans la brillante pléiade des Argentins de Paris, Tomasello fait figure de grand aîné. Se formant à Buenos Aires, il fait un voyage d'étude en Europe dès 1951 et choisit de vivre à Paris à partir de 1957 tout en restant en contact étroit avec les milieux artistiques sud-américains. Lui-même dit ce qu'il doit à ce qu'il dénomme avec d'autres l'« art concret » et, singulièrement, à Mondrian. Il s'en distingue vite par ses recherches tridimensionnelles mais aussi par l'usage sériel de volumes réels. Ce faisant, il rencontre, « inexorablement » dit-il, la couleur par le biais de la lumière, dont l'incidence est différente sur chacune des faces d'un cube. Tomasello distingue la « couleur-sensation » de ce qui la génère, la « couleur-vision ». Quelle que soit l'importance de la lumière et du mouvement dans les œuvres de Tomasello (Atmosphère chromoplastique, 1967), l'« objet-plastique » demeure à mi-chemin entre la peinture et la sculpture sans s'identifier au relief (Atmosphère chromoplastique no 307, 1973). Il peut être intégré à l'architecture mais cela est une possibilité, non une finalité. Très vite reconnu, soutenu par la gal. Denise René, Tomasello a, dès 1962, une exposition personnelle au musée des Beaux-Arts de Buenos Aires, qui acquiert plusieurs œuvres. Tomasello est particulièrement bien représenté dans les musées nord-américains (Albright Knox Art Gal. de Buffalo, New York University) ainsi qu'en Hollande, au musée Kröller-Müller d'Otterlo, et à Paris (Objet plastique no 686, 1990, M. N. A. M.). Après avoir été une des vedettes de l'exposition « la Lumière et le Mouvement » en 1967, Tomasello est revenu en 1976 au musée d'Art moderne de la Ville de Paris, qui lui a consacré une rétrospective. Le musée Réattu à Arles l'a exposé en 1981. Une nouvelle rétrospective lui a été consacrée (Galleria Civica : Palazzo Todeschini) en 1995.

Tomlin (Bradley Walker)

Peintre et illustrateur américain (Syracuse, New York, 1899 – New York 1953).

Ayant acquis le titre de « bachelor » en peinture à l'université de Syracuse, il se rend à Paris en 1923 et s'inscrit à l'Académie de la Grande Chaumière, où il apprend à connaître Cézanne, Van Gogh et Gauguin. À son retour à New York, il exécute quelques natures mortes, dans le sillage des précisionnistes Sheeler et Demuth, avant d'être initié par Motherwell aux techniques automatiques du surréalisme. Mais ses toiles restent marquées par l'expérience cubiste. En passant vers la fin des années quarante à l'expressionnisme abstrait, Tomlin trouve enfin son style propre : abandonnant son néo-cubisme pour une véritable pictographie géante, il divise sa toile en petits espaces carrés, sorte de grille sous-jacente sur laquelle viennent s'inscrire, en contrepoint, ses graphies blanches ou sombres (Numéro 20, 1949, New York, M. o. M. A.). Les années qui précèdent sa mort marquent le point culminant de l'expressionnisme abstrait : utilisant le flou, Tomlin compose alors de vastes toiles où formes et lignes, soudain brisées, s'agencent selon une dynamique interne (Numéro 10, 1952-1953, Utica, Munson-Williams-Proctor Inst.).