Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
G

Griffa (Giorgio)

Peintre italien (Turin 1936).

Avocat de son métier, il commence à pratiquer la peinture vers le milieu des années 60, au moment où l'offensive néodadaïste et l'art du comportement ont remplacé la réflexion picturale. Sa première exposition se tient à Turin, gal. Martano, en avril 1968, où il présente des toiles brutes, épaisses, monochromes ou blanches (Main libre, 1968). D'abord tendues sur un châssis, celui-ci sera éliminé en 1969. Ce qui distingue bientôt le travail de Griffa, c'est le refus du discours idéologique qui accompagne, en Italie comme en France, la résurgence de la peinture justement à partir de 1968. " Je ne représente rien, je peins ", dit Griffa, en insistant sur la mise en évidence de ce processus très simple : étaler de la couleur sur la toile. Et si le choix de la toile et celui du format importent peu, à l'encontre de nombreux peintres actuels, les couleurs et les instruments à peindre sont en revanche l'objet d'une attention extrême.

   À partir de 1970, bandes obliques, puis horizontales, encoches polychromes, inscrivent ainsi sur la toile souple qui les reçoit comme les vestiges, les traces d'un geste spécifique, actualisé. Il insiste alors sur le moment de la facture, une facture picturale grâce à laquelle il est possible de récupérer une mémoire historique (Lavagna Beuys, 1982 ; Mémoire collective, 1984). Griffa a exposé à Paris en 1970 à la gal. Sonnabend et en 1973 et 1974 à la gal. D.-Templon. Une rétrospective a eu lieu à la Städtische Kunsthalle de Düsseldorf (1978) et au Kunstverein de Brunswick (1980). Il a participé à la Biennale de Venise en 1978 et 1980.

Griffier (Jan)

Peintre néerlandais (Amsterdam 1652 ou 1656  – Londres 1718).

Ce peintre de paysages fit son apprentissage à Amsterdam chez le peintre Roelant Roghman et s'installa v. 1667 à Londres, où il eut pour maître Jan Looten. Il vécut désormais en Angleterre, sauf entre 1695 et 1705, années au cours desquelles il travailla à Rotterdam et fit le tour de la Hollande en bateau. Les perspectives de Griffier sur des fleuves bordés de collines sont toujours animées d'un grand nombre de figures, embarcations et constructions (Vue du Rhin, Bonn, Rheinisches Landesmuseum ; Louvre, en dépôt à Compiègne ; deux Paysages, musée de Bordeaux ; le Passage de la douane, musée de Strasbourg). Ces vues perspectives s'inspirent manifestement des paysages fluviaux de Herman Saftleven, d'Utrecht. La richesse de la composition et la ligne d'horizon élevée de ces tableaux leur confèrent également un caractère archaïsant qui évoque les paysages flamands du début du XVIIe s., notamment ceux de Jan Bruegel. L'œuvre de Griffier eut beaucoup de succès en Angleterre, où l'artiste jouissait de la protection du duc de Beaufort. Un tableau de lui au musée de Bucarest résume bien toutes ses qualités : une Vue de Londres à partir de Greenwich, v. 1710-1715.

 
Ses fils Robert (Londres 1688 – id. [ ? ] 1750) et Jan II (Londres, apr. 1668 – id. 1750 [ ? ]) furent également peintres ; le second continua la manière de son père et exécuta des pastiches de Claude Lorrain.

Grigoletti (Michelangelo)

Peintre italien (Rorai Grande, Pordenone, 1801  – Venise 1870).

Issu de la tradition de la peinture du Frioul, M. Grigoletti entre en 1820 à l'Académie de Venise, dans l'atelier du peintre néoclassique T. Matteini, aux côtés de Politi, qui lui transmet son admiration pour Titien et Véronèse. Il entreprend, en 1835, un voyage d'étude à Rome, au cours duquel il tient un journal ; moins sensible à l'exemple des grands artistes néoclassiques tels que Canova ou Mengs, il découvre avec intérêt les maîtres du XVIIe s., Le Guerchin plus particulièrement. En 1835, il collabore avec Schiavoni, Lipparini et Politi au décor de l'église S. Antonio Nuova à Trieste. Dès lors, il reçoit de nombreuses commandes : en 1838, pour Ferdinand d'Autriche, un grand tableau, les Deux Foscari (1842, Vienne, K. M.), qu'il présente à Vienne (1843)— séjour au cours duquel il fréquente les portraitistes de la Cour, Kreutzinger, Waldmüller et Von Amerling ; en 1846, l'Assomption, pour la cathédrale d'Esztergom en Hongrie. Ces peintures se caractérisent par une recherche sur la couleur tendant vers la transparence et par des effets lumineux proches de la tradition vénitienne. L'Annonciation de Trente de 1857 ouvre sur la dernière période de son œuvre, marquée par un style plus sévère, inspiré par les primitifs vénitiens. Il a également une activité de portraitiste importante, saisissant avec une grande acuité le caractère du modèle (Parents de l'artiste, 1829 ; la Famille Fossati, 1828-1829). Son œuvre est conservée, pour une bonne part, au Museo Civico de Pordenone.

Grigoresco (Nicolae Ion)

Peintre roumain (Pitaru-Dambovitza  1838  – Campina  1907).

Il se forme chez Anton Chladek, peintre de miniatures, de portraits et d'icônes, et, à partir de 1853, exécute le décor de l'église d'Agapia, (1858-1860). Il se rend en 1861 à Paris, où il travaille dans l'atelier de Sébastien Cornu, puis à Barbizon et à Marlotte, et ne rentre à Bucarest qu'en 1869. Il participe en 1867 à l'Exposition universelle de Paris, en 1868 à l'exposition des peintres de Fontainebleau. Il prend position contre l'enseignement académique et introduit en Roumanie la peinture de plein air et l'art indépendant.

   Après un voyage en Italie (1873-74), il s'établit pour quelques mois à Bacău, en Moldavie (1874), où il peint plusieurs portraits de Juifs qui comptent parmi ses meilleures toiles. En 1876-77, de nouveau en France, il rencontre les impressionnistes et éclaircit sa palette tout en confirmant son goût pour l'expression spontanée de ses sensations visuelles.

   La guerre d'indépendance contre les Turcs (1877-78), à laquelle il participa, fit de Grigoresco non pas un peintre militaire, mais un témoin de la souffrance humaine, qu'il dépeint avec une saisissante et profonde vérité. De 1879 à 1886, il revint à plusieurs reprises en France, peignit en Bretagne et les bord de la Seine. Il s'établit en 1887 définitivement en Roumanie, dont les paysages continuèrent à lui offrir d'innombrables motifs.

   Les années 1880 marquent le sommet de sa production. Sa technique s'élargit et se simplifie : pâtres et Bohémiens sont brossés dans une pâte souple et large alliée à des couleurs intenses (Fillette à la cruche, Bucarest, G. N. ; Char à bœufs, musée Simu). Vers 1900, ses couleurs s'estompent dans une gamme de camaïeux vibrants et subtilement nuancés, les proportions de ses personnages s'allongent, ses compositions s'organisent selon une ordonnance décorative où une sorte de symbolisme personnel se fait jour (la Rêveuse, musée Simu). Ses tableaux figurent principalement au musée de Bucarest. Un musée Grigoresco est installé dans la dernière demeure de l'artiste, à Campina.