Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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support

Le support est un élément matériel qui soutient la couche picturale. Tous les supports choisis par les peintres font subir à la préparation et à la couche picturale les qualités et les défauts qui leur sont propres. Ils peuvent être classés en supports rigides, semi-rigides et souples.

   Les peintres recoururent essentiellement à des supports rigides jusqu'au XVIe s. : murs recouverts de mortier (fresque) ou de plâtre, plafonds et murs stuqués (mélange de plâtre, de colle et de poudre de marbre), maçonnerie enduite de chaux colorée à l'oxyde de fer et enfin panneaux de bois. Ces panneaux en bois de tilleul en Allemagne, de peuplier, de résineux (cèdre, pin) dans le Midi et de chêne et de noyer dans le Nord résultaient de l'assemblage (à joint vif, à languettes et fausses languettes) de plusieurs planches. Ils étaient parfois protégés des variations hygrométriques par une toile très fine. Un parquetage composé de lames de bois croisées renforçait le plus souvent le revers des panneaux, empêchant les planches de se disjoindre tout en leur laissant un certain jeu. En Extrême-Orient, les panneaux en bois étaient marouflés de soie et recouverts d'un enduit très dur à base de vernis et de glaise brûlée ou de grès très fin (jusqu'à 18 couches successives). Les panneaux de contre-plaqué remplacent aujourd'hui les panneaux de bois. Ce matériau ne présente pas les inconvénients hygrométriques des bois ordinaires : il ne se dilate, ne se rétracte et ne se déforme que rarement. Les peintres utilisent également des feuilles de résines synthétiques ou d'agglomérés de matériaux divers : plâtre, ciment, sciures de bois ou de liège, papier, carton avec ou sans armature fibreuse (Isorel, Cellotex, masonite, linoléum). Ces agglomérés sont fabriqués en de grandes dimensions et leur emploi est de plus en plus courant.

   D'autres supports rigides ont été et demeurent encore employés, notamment les métaux. Le cuivre (Elsheimer à la fin du XVIe s.), le fer, le zinc, le plomb et, plus récemment, l'aluminium, moins utilisés que le bois, ont connu une certaine faveur. Ces supports présentent l'inconvénient d'être conductibles à la chaleur et au froid, et la peinture qui les recouvre doit avoir un grand coefficient de dilatation pour ne pas s'altérer. De plus, ils se corrodent : la rouille, par exemple, désagrège le fer. Des supports rigides tels que des plaques de marbre, d'albâtre (Annibale Carracci) ou d'ardoise, qui offrent une surface stable, sont moins utilisés encore, de même que le grès, les pierres calcaires, les tuiles et le ciment. Le verre, qui reçoit très bien la peinture à base d'huile, de vernis et de colle, a servi à l'exécution de nombreux ex-voto.

   Moins résistants que les supports rigides, les supports semi-rigides, tels que la toile forte marouflée de toile fine ou la toile marouflée de papier (support très apprécié par Rubens pour ses esquisses et par Van Dyck), s'altèrent cependant moins que les supports souples. Ceux-ci — parchemin, papier, toile — sont d'une grande fragilité. Le parchemin se rétrécit en séchant, se gondole et se brise ; le papier se dilate dans une atmosphère humide et subit les attaques des moisissures et des bactéries ; la toile tendue sur châssis, utilisée tardivement par les Italiens de la Renaissance, puis par Rubens en Flandre, vieillit vite et risque au moindre choc de se déformer, de se déchirer ou de s'écailler. Actuellement, on trouve des toiles préparées pour l'huile, l'aquarelle, la gouache, le fusain. Elles sont de différentes grosseurs : demi-fine, fine, moyenne, à grains, demi-forte, forte, etc. Lorsque les supports sont altérés, il faut procéder à une restauration et parfois à un transfert (Voir RESTAURATION).

suprématisme

Le nom de ce mouvement d'avant-garde russe dérive du mot " suprême " et reflète les idées de Malévitch, son chef de file. Les théories suprématistes, qui affirment la souveraineté de la forme abstraite limitée au carré, au rectangle, au cercle, au triangle et à la croix, sont exposées dans les nombreux écrits du peintre, et son œuvre elle-même en est la meilleure illustration. Cependant, la date de l'avènement du Suprématisme est controversée. Malévitch présente ses premières œuvres abstraites (connues comme suprématistes) en décembre 1915 à l'exposition 0,10, qui a lieu à Petrograd. Le mot Suprématisme ne figure pas dans le manifeste qu'il publie à cette occasion. Le catalogue ne mentionne aucune de ses 35 peintures exposées comme " suprématistes ", et c'est dans les comptes rendus de la presse que le mot apparaît pour la première fois, laissant supposer que Malévitch l'aurait employé au cours d'une conférence-débat organisée aussitôt après l'ouverture de l'exposition. En 1916, Malévitch publie un essai intitulé Du Cubisme et du Futurisme au Suprématisme. Or, plus tard, il fixera lui-même les débuts du Suprématisme en 1913. Longtemps considérée comme un désir de sa part de prendre date dans l'histoire de l'Art abstrait, cette allégation s'éclaire grâce à la connaissance, récemment acquise, d'un de ses textes où il explique que le Suprématisme " cosmique " (et abstrait) avait succédé au Suprématisme " mécanique " qui illustrait la " vie dans la machine " et qui correspondrait donc à la période cubo-futuriste de son œuvre. Ainsi interprétée, la date de 1913 serait exacte. En décembre 1918, au Xe Salon d'État de Moscou, Malévitch expose son Carré blanc sur fond blanc, aboutissement le plus radical, brûlant les étapes, de la démarche abstraite. L'artiste écrit dans le catalogue du Salon : " À présent, le chemin de l'homme se trouve à travers l'espace... J'ai percé l'abat-jour bleu des limites de la couleur, j'ai pénétré dans le blanc ; à côté de moi, camarades pilotes, naviguez dans cet espace sans fin. La blanche mer libre s'étend devant vous. "

   Parmi les suprématistes de la première heure, il faut citer les peintres Pougny, Menkov, Klioun. Après 1920, l'influence du Suprématisme se fait sentir dans le domaine des applications pratiques, et Malévitch déclare en 1924 : " Le Suprématisme déplace son centre de gravité sur le front de l'architecture. " À travers l'activité d'El Lissitsky, cette influence atteint l'Allemagne, où, dans les milieux du Bauhaus, elle contrebalance celle du Néo-Plasticisme. Les affiches, les mises en page que Lissitsky réalise (et qui restent des modèles du genre) se rattachent au Suprématisme par la disposition diagonale des formes, reliées en un équilibre dynamique.