Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Maître de l'Observance

Peintre italien (actif à Sienne entre 1420 et 1440).

Cette personnalité, qui compte parmi les plus remarquables de la peinture siennoise, a pris de l'importance à la suite d'une révision du catalogue des œuvres attribuées pendant longtemps à Sassetta. En effet, certaines de ces œuvres présentent des caractéristiques trop gothiques pour être de sa main (Longhi, Graziani) et annoncent la manière de Sano di Pietro. Des contributions récentes ont proposé de reprendre l'ancienne hypothèse de l'identification du maître avec Sano di Pietro lui-même durant sa première période, la plus inventive. Aujourd'hui, les critiques sont de plus en plus partagés, mais la plupart estiment encore que l'ensemble des œuvres énumérées par Longhi sont bien en fait de la main du Maître de l'Observance, distinct de Sano di Pietro. Dans ce catalogue, une importance particulière est accordée : au triptyque représentant la Vierge entre saint Ambroise et saint Jérôme (Sienne, église de l'Observance), de 1436, dont la prédelle subsiste encore (Scènes de la vie de saint Jérôme, Sienne, P. N.) ; au triptyque de la Naissance de la Vierge (autref. dans la collégiale d'Asciano, puis au musée) et à sa prédelle (musée de Dijon : Settignano [Florence], fondation Berenson) ; au polyptyque dédié à saint Antoine abbé, dont les panneaux représentant des Scènes de la vie du saint sont dispersés dans différents musées (1 à Berlin, 4 à la N. G. de Washington, 2 à la Yale University Art Gallery de New Haven, 1 au Metropolitan Museum, New York). Le centre du retable a été identifié à tort avec un Saint Antoine abbé du Louvre.

   Toujours de ce maître, on doit mentionner les panneaux de la prédelle d'un polyptyque perdu : la Flagellation (Vatican), la Montée au Calvaire (Philadelphie, Museum of Art, coll. Johnson), la Résurrection (Detroit, Inst. of Art), la Descente dans les limbes (Cambridge, Mass., Fogg Art Museum) et le Calvaire (musée de Kiev). La personnalité profonde et délicate qui émane de ces tableaux et rappelle Masolino — surtout celui des délicieuses et célèbres Scènes de la vie de saint Antoine, fables candides, issues d'un esprit encore médiéval — justifie le cas que l'on fait de cet artiste. Il faut souligner l'importance historique de l'apparition de ces œuvres à Sienne aux alentours de 1430 après le passage de Gentile da Fabriano, tandis que domine Sassetta et que se manifestent les premières tendances émergeant de la Renaissance florentine avec Domenico di Bartolo et Vecchietta.

Maître de Lourinhà

Peintre portugais d'origine flamande [ ?] (actif au Portugal dans la première moitié du XVIe s.).

On a regroupé autour de ce maître anonyme une série de panneaux présentant des affinités avec l'art de Frère Carlos mais manifestant une personnalité différente. Il s'agit d'un peintre de qualité, dont le chef-d'œuvre est sans doute le Saint Jean à Patmos (Miséricorde de Lourinhà), présenté dans un vaste paysage rappelant ceux de Patinir. On lui attribue également la Pentecôte du triptyque des Infants (Lisbonne, M.A.A.), le Saint Jérome pénitent (musée de Porto), Saint Antoine et saint Jacques le mineur (Sesimbra, sanctuaire de Cabo Espichel), certains éléments du Retable de saint Jacques tel que l'Enfer (Lisbonne, M.A.A.) et surtout le grand retable de la cathédrale de Funchal (Madère) resté intact dans son lieu d'origine. Ce dernier ensemble présente une évidente parenté avec le célèbre triptyque (Calvaire du Christ portant la croix et Déposition) de Caldas da Rainha, commandé par la reine Leonor. Ces œuvres, d'un caractère très flamand, offrent par leurs constructions spatiales et lumineuses une vision nouvelle. Elles permettent de considérer cet artiste comme l'un des plus importants chefs d'atelier de l'époque manuéline.

Maître de Marie de Bourgogne

Enlumineur actif entre 1470 et 1480 environ.

Ce maître anonyme est ainsi dénommé pour avoir peint deux feuillets d'une exceptionnelle maestria se trouvant dans le Livre d'Heures de Charles le Téméraire (Vienne, B. N.). Le livre des Heures de Marie de Bourgogne et de Maximilien (musées de Berlin, cab. des Dessins), qui lui était autrefois attribué, est aujourd'hui donné à l'un de ses suiveurs appelé le Maître de Maximilien.

Maître de Messkirch

Peintre allemand .

Il est ainsi nommé en raison de son œuvre principale, le grand retable et les 8 petits retables ornant l'église paroissiale de Messkirch. Tour à tour identifié avec Jerg Ziegler, Marx Weiss le Jeune, Josef Weiss ou Wilhelm Ziegler, cet artiste fut un disciple de Schäufelein et travailla dans la région du lac de Constance entre 1530 et 1540. S'il n'échappe pas toujours à la lourdeur, son style ne manque pas de caractère et, dans le Saint Benoît en prière dans le désert (Stuttgart, Staatsgal.), il témoigne d'une sensibilité que l'on ne trouve pas chez Schäufelein.

Maître de Mondsee

Peintre autrichien (actif à Salzbourg [?] de 1480 à 1510 env.).

Il est ainsi désigné d'après un retable commandé v. 1487 par l'abbé de Mondsee (Haute-Autriche), Benedikt Eck von Piburg (en fonctions de 1463 à 1499). On a proposé d'identifier ce maître avec Heinrich Freudenfuss, inscrit en 1498 à la guilde des peintres de Salzbourg. Il est vraisemblable qu'il ait fait son apprentissage dans l'atelier du Maître du monastère des Écossais de Vienne, ou chez le Maître viennois du Triptyque de la Crucifixion de Saint-Florian.

   Les panneaux qu'on lui attribue, et qui représentent Saint Ambroise et Saint Jérôme (autref. dans le commerce d'art colonais), révèlent nettement les origines stylistiques viennoises du Maître de Mondsee. Par la commande du retable de Mondsee, celui-ci fut entraîné dans le cercle d'influences de Michael Pacher, qui avait également exécuté pour l'abbé Eck le Retable de saint Wolfgang. Du retable de Mondsee nous sont parvenus les panneaux latéraux représentant, sur leur face intérieure, la Vierge aux épis avec un donateur et la Fuite en Égypte et, sur leur face extérieure, les Pères de l'Église Saint Ambroise et Saint Jérôme (Vienne, Osterr. Gal.). Dans la Fuite en Égypte, le maître semble s'être souvenu d'une peinture de même thème appartenant à un volet de prédelle du Retable de saint Wolfgang de Michael Pacher, en même temps que d'une gravure de Schongauer ; sa réalisation est cependant d'un sentiment entièrement différent. Avec un dessin délicat, une sobre plasticité et des couleurs tendres, cet artiste profondément lyrique décrit l'événement comme s'il s'agissait d'un conte et transpose le sujet jusque dans l'irréel. L'appartenance de ces peintures au retable de Mondsee a été contestée par J. Wilde, qui y voit plutôt les volets mobiles de la prédelle d'un retable auquel appartiendraient 3 autres panneaux, sensiblement plus grands : une Circoncision (Vienne, Österr. Gal.), une Présentation (autref. dans le commerce d'art parisien) et l'Enfant Jésus au Temple (Vaduz, coll. Liechtenstein). O. Benesch, par contre, pense que ces 3 dernières œuvres ont fait partie d'un autre retable. La composition de la Circoncision est également empruntée au Retable de saint Wolfgang ; mais, là encore, la solennité de la cérémonie est enveloppée de mystère, de lumières et d'ombres furtives, comme si l'artiste racontait un rêve.