Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Ferrari (Gaudenzio)

Peintre italien (Valduggia, Piémont, v.  1475  – Milan 1546).

Il ne reste de sa toute première activité que deux anges d'une fresque peinte dans la chapelle du Saint-Sépulcre au sanctuaire du Sacro Monte à Varallo et une Crucifixion sur panneau (musée de Varallo). Un voyage qui le conduit à Florence, en Ombrie et à Rome a sur lui une influence décisive. En 1507, il peint les fresques de la chapelle S. Margherita à l'église S. Maria delle Grazie à Varallo ; entre 1500 et 1510 env., il exécute également les fresques des parois latérales. L'éclectisme de la Dispute met en évidence l'influence de Pérugin et de Luini ainsi que de nettes réminiscences de l'architecture de Bramante et des gravures de Dürer. Entre ces deux extrêmes, Gaudenzio apporte sa manière propre à " mieux peindre les âmes que les corps " (Lanzi) et dont l'intention psychologique est encore actuelle. Il peint à la même époque les panneaux avec Sainte Anne et Saint Joachim (Turin, Gal. Sabauda). En 1511, il exécute une " pala ", fleurie, peinte à fresque, pour la collégiale d'Arona ; puis, en 1513, il travaille au cycle principal de fresques de l'église S. Maria delle Grazie à Varallo, contant la vie du Christ en vingt et un épisodes. Il travaille à partir d'une implantation apparemment archaïque dans laquelle il insère des éléments renaissants et maniéristes (nocturnes et paysages décrits en accents passionnés), constituant ainsi une tradition qui se transmettra intacte jusqu'à Morazzone et Tanzio da Varallo au XVIIe s. Cette manière est évidente dans le polyptyque et la prédelle de l'église S. Gaudenzio à Novare (1514-15). Dans les chapelles de la voie du Calvaire du Sacro Monte, il exécute l'Adoration de l'Enfant Jésus, la Crucifixion ainsi que la fresque du Cortège des mages (1526-1528), à partir de laquelle la critique moderne (G. Testori) a pu reconnaître en lui un sculpteur.

   Le thème populaire apparaît aussi dans les œuvres qu'il a laissées à Vercelli : la Madone aux oranges (ou à l'oranger, 1528) et les fresques de l'église S. Cristoforo (1520/1530-1531/32) avec les Histoires de Madeleine et de la Vierge. La coupole de Saronno (1534), les " pale " de Cannobio et de la Brera, la Nativité de la collection Contini Bonacossi, la Cène de l'église de la Passion à Milan marquent l'ultime évolution d'un vigoureux et authentique langage maniériste dont se réclamera toute une école. Des tapisseries furent également créées d'après ses cartons et ses dessins (auj. à Turin, Accad. Albertina). Gaudenzio Ferrari eut ses plus fidèles disciples en Bernardino Lanino et en Girolamo Giovenone.

Ferrer (les)

Famille de peintres espagnols.

Dans la production picturale de la région de Lérida se détache l'œuvre de deux artistes portant le prénom de Jaime (peut-être le père et le fils), qu'il est possible de différencier.

 
Ferrer Jaime I (actif dans le premier tiers du XVe s.). Autour de l'Épiphanie (musée de Lérida), signée " jacobus ferraii ", ont été groupés un certain nombre de panneaux qui permettent de suivre l'évolution d'un artiste. Marqué par l'art aimable des frères Serra, il s'en détache progressivement pour rechercher des compositions plus symétriques (3 retables à la Granadella), un rythme dans le mouvement des figures (Retable du Sauveur, église d'Albatarech) et une attention plus précise aux objets et aux costumes (la Cène, musée de Solsona ; Retable de sainte Lucie à Tamarit de Litera).

 
Ferrer Jaime II (documenté entre 1439 et 1457). Collaborateur de Martorell en 1441 pour le retable du maître-autel de la cathédrale de Lérida, il est l'auteur du retable de l'église d'Alcover, documenté en 1457. Autour de cette œuvre clé peuvent être groupés plusieurs polyptyques tels que celui de la chapelle de la Paheria de Lérida, ceux de la Vierge provenant de Verdú (Musée de Vich) et de Saint Julien (musée de Lérida). Par la richesse des couleurs, le goût du décor et des paysages urbains et surtout la description minutieuse des objets quotidiens, Jaime II enrichit les formules traditionnelles du Gothique international d'emprunts aux artistes flamands contemporains.

Ferretti (Giovanni Domenico)

Peintre italien (Florence 1692  – id. 1768).

Formé à l'école de Sagrestani, il s'orienta rapidement vers la peinture émilienne, au cours d'un séjour de cinq ans à Bologne, sous l'influence de Cignani et de Gian Gioseffo dal Sole. Revenu en 1719 à Florence, il exécuta avec beaucoup de brillant de nombreuses commandes de fresques pour plusieurs palais et églises, parmi lesquels les palais Capponi Ginori, Rucellai et Panciatichi et la Badia à Florence, le palais Tolomei et l'église S. Filippo à Pistoia, le palais Chigi Sansedoni à Sienne. Il travailla aussi à Imola et à Prato. Bien qu'il fût de plus en plus attiré par les modèles classicisants de la peinture monumentale, il se plut également à peindre, dans des toiles de petit format, des scènes populaires, dans la lignée de Callot et de Stefano della Bella (les Malheurs d'Arlequin, Sarasota, Floride, Ringling Museum). À Florence, il joua un rôle de protagoniste dans le milieu pictural qui gravitait autour des derniers Médicis, mais son art n'eut qu'un rayonnement local.

fête galante

Nom donné, essentiellement dans la peinture française du XVIIIe s., aux scènes de plein air montrant des couples d'amoureux réunis dans des jardins ou des parcs, occupés à des divertissements de société ou faisant de la musique. Rubens, reprenant des thèmes vénitiens, est à l'origine de ce genre (Jardin d'amour, Prado), dont Watteau s'est fait l'illustre et génial spécialiste : c'est comme " peintre de fêtes galantes " que l'Académie royale l'admit parmi ses membres en 1717 avec le Pèlerinage à Cythère (Louvre). Les émules de Watteau, Pater et Lancret, plus modestement Octavien, Quillard et Bonaventure de Bar, se consacrèrent aussi aux fêtes galantes, dont Monticelli tenta, à la fin du XIXe s., de ressusciter la mode.

fêtes et peintres

On peut illustrer le thème " les peintres et les fêtes " à travers les siècles par d'innombrables images : les enlumineurs du Moyen Âge peignant les bals de la cour de Bourgogne, Watteau esquissant les rivages de Cythère, Toulouse-Lautrec au Moulin-Rouge et Seurat au cirque font partager leur ravissement, leurs rêves, leurs obsessions parfois. Séduits, amusés ou fascinés, ils sont restés des spectateurs. Or, il est des peintres que l'orientation particulière de leur génie, les conjonctures historiques ou sociales, le caprice ou l'intuition d'un mécène ont amené à devenir les créateurs mêmes du spectacle, les metteurs en scène de la fête. Il en est d'autres qui furent de simples exécutants, mais trouvèrent dans ce genre d'activité l'occasion de faire remarquer leur talent.

   À vrai dire, les préparatifs des " apparats ", " joyeuses entrées " et pompes funèbres de jadis mobilisaient plus d'architectes et de sculpteurs que de peintres. Les uns et les autres devaient en outre se soumettre aux programmes élaborés en fonction de subtiles préoccupations intellectuelles ou d'évidentes nécessités politiques. Cet aspect est d'ailleurs accentué à nos yeux par la nature même des principales sources auxquelles nous pouvons nous référer aujourd'hui pour évoquer ces " manifestations " éphémères : les précieux recueils gravés édités pour en conserver le souvenir sont des relations officielles, dont l'esprit et la lettre étaient soigneusement contrôlés. À cet égard, les chroniques, Mémoires et correspondances nous renseignent souvent davantage. Ils sont évidemment fort rares avant le XVIIe s. Plus près de nous, ils n'offrent pas d'intérêt pour l'évocation des fastes publics, où l'art tient de moins en moins de place ; nous y trouvons par contre des renseignements précieux sur un autre aspect —beaucoup plus révélateur finalement — du thème qui nous occupe : la participation des peintres à des fêtes de caractère privé, où s'expriment librement leur verve et leur imagination, leur sens du jeu et de la mascarade ou leur goût de l'insolite.

Du mystère à la " joyeuse entrée "

Les fêtes médiévales sont essentiellement des fêtes religieuses, des représentations de " mystères " conçues pour l'édification du peuple, mais rendues aussi attrayantes que possible par l'animation du spectacle, le chatoiement des costumes, les trouvailles de la mise en scène. On peut les imaginer dans une certaine mesure à partir des fresques romanes préservées, qui tantôt s'inspirèrent de la dramaturgie sacrée, tantôt furent pour elle une source d'inspiration.

   En ce sens, l'histoire de la fête, à son origine, se confond avec l'histoire du théâtre. Celle des peintres organisateurs de réjouissances, de divertissements et de cérémonies publiques commence, quand il y a des peintres, ou du moins quand nous les connaissons, à l'époque où les documents contemporains permettent de rattacher un nom à une célébration " historique ", à une réalisation précise.