Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Rottenhammer (Johann)

Peintre allemand (Munich  1564  – Augsbourg  1625).

Il fut de 1582 à 1588 élève de Hans Donauer, qui participa sous la direction de F. Sustris à la décoration de l'Antiquarium de la Résidence de Munich, et grandit dans la tradition du Maniérisme tardif international tel qu'il s'exprimait dans l'art courtois munichois. C'est cependant l'Italie — où il admira les œuvres de Véronèse et de Tintoret ainsi que celles des paysagistes flamands à Rome — qui lui donna une impulsion décisive. Au cours de ses séjours à Rome (1589-1596) et à Venise (1596-1606), il entretint des relations amicales et professionnelles avec Jan Bruegel et Paul Bril ainsi qu'avec Palma le Jeune. Il apprit la minutieuse technique flamande de la peinture sur cuivre et fut le premier à transposer le style monumental italien en une forme empruntée à la miniature, qui allait donner naissance au tableau de petit format et lui assurer la célébrité (Diane et Actéon, 1602, Munich, Alte Pin.). Le cardinal Borromée de Milan, le duc de Mantoue et Rodolphe II, à Prague, l'honorèrent de leurs commandes, et les graveurs Kilian et Sadeler contribuèrent à la diffusion de ses compositions.

   L'évolution artistique de Rottenhammer allait trouver très tôt son accomplissement au cours des premières années du séjour à Venise (Ecce homo, 1597, musée de Kassel). Aussi éloigné du nouveau réalisme particulier au début du Baroque que d'une conception maniériste excentrique, l'art de Rottenhammer représente un certain idéal académique répondant à l'idée contemporaine de la grâce. Le raffinement de ses compositions religieuses et mythologiques plaisait encore au XVIIIe s. et séduisit de nombreux graveurs français. Les nus féminins, aux délicates arabesques, et l'enchaînement ornemental des compositions, riches en personnages, sont autant de témoignages de la touche brillante de l'artiste, qui sut, en outre, transposer avec virtuosité des scènes monumentales (le Jugement dernier et les Noces de Cana, Munich, Alte Pin. ; le Couronnement de la Vierge, Londres, N. G.) en petits formats dans le goût maniériste. En intégrant pour la première fois au style italien des éléments particuliers aux paysages flamands, remarquables par la subtilité du traitement des détails, Rottenhammer créa un genre nouveau, intime et précieux. Quelques œuvres naquirent en collaboration avec Bril (la Chute de Phaéton, musée de Kassel) et Bruegel de Velours (la Ronde des anges, Milan, Ambrosienne), tandis que les représentations idylliques du thème du Repos de la Sainte Famille (musées de Schwerin et de Kassel, Rijksmuseum) se rattachent à la tradition allemande. Cette fusion du style italien des personnages et du paysage nordique conduit à Elsheimer, qui travailla dans l'atelier de Rottenhammer en 1598.

   Artiste réceptif, Rottenhammer évolua vers un certain classicisme lorsqu'il s'installa à Augsbourg en 1606. Dès lors, il exécuta de grands retables (autel de Tous-les-Saints, église Saint-Max, Augsbourg), des fresques (maison Hopfer, Augsbourg, auj. détruite) et des décorations (château de Bückeburg) où l'ordonnance des personnages a gagné en sobriété. Au contraire de son ancien élève, le peintre augsbourgeois Kager, son audience demeura limitée aux cercles aristocratiques. Rottenhammer est amplement représenté dans les musées d'Augsbourg, de Kassel, de Munich (Alte Pin.) et à l'Ermitage.

Rottmann (Carl)

Peintre allemand (Handschuhsheim  1797  – Munich  1850).

Élève de son père, Friedrich, de Johann Xeller, le restaurateur des frères Boisserec, il est influencé à Heidelberg par le peintre anglais G. A. Wallis, puis fréquente l'Académie de Munich, ville où il s'installe à partir de 1822. Il se forme alors sous l'influence de Joseph Anton Koch et s'oriente vers le paysage héroïque. Sur la demande de Louis Ier de Bavière, il entreprend des voyages en Italie (1826-27 et 1829-30) et en Grèce (1834-35). Peignant à ses débuts des paysages d'ambiance s'inspirant fidèlement de la nature, il aboutit à des paysages d'un aspect monumental (Phare de Gênes, 1826, Heidelberg, Kurpfälzisches Museum). C'est avec les fresques représentant des sites d'Italie, exécutées à partir de 1830 pour les arcades du Hofgarten de Munich, que son art atteint son apogée. Après son voyage en Grèce, dont il utilise les souvenirs pour son cycle de paysages helléniques, l'artiste atteint un style pathétique grandiose, qu'il obtient par des effets d'éclairage dramatiques, des formes tourmentées, des couleurs flamboyantes et une suggestion vigoureuse de l'espace. Les scènes où les éléments semblent en lutte atteignent une dimension visionnaire (le Champs de bataille de Marathon, 1845, musées de Berlin).

Rottmayr (Johann Michael)

Peintre autrichien (Laufen, Bavière,  1654  – Vienne  1730).

Il demeura treize ans dans l'atelier de Carl Loth à Venise (1675-1687), dont il est l'élève le plus important. Il se familiarisa aussi avec l'art de Rubens, Van Dyck et emprunta au Napolitain Luca Giordano sa représentation des personnages. Il habita Salzbourg (1688-1695), puis travailla au château de Frain, en Moravie (1695), où il collabora avec l'architecte Johann Bernhard Fischer, avant de venir s'installer à Vienne, qu'il ne quittera plus que pour exécuter des commandes. Il rapporte d'Italie la mode du bozzetto : dans l'esquisse pour la Chute des anges (Tittmoning, église du château, 1697), les effets picturaux intenses (bleu, blanc, jaune) l'emportent sur les valeurs plastiques, dont le développement, dans l'œuvre définitive, révèle sa connaissance de Rubens. À l'église Saint-Matthias de Breslau, Rottmayr couvre (1704-1706) les quatre voûtes de la nef d'un ensemble continu de fresques (Triomphe du Nom de Jésus), dans lequel, pour la première fois, grâce à la collaboration d'architectes autrichiens, un peintre réalisait un décor dont l'effet illusionniste remplaçait les architectures plafonnantes traditionnelles. À Melk, il peint les fresques de la grande nef. Dans Bucéphale dompté (1709-1711, Salzbourg, Résidence, plafond de la salle Carabineri), aux dominantes de jaunes, la composition reste pleine de dynamisme, bien que l'insistance apportée aux musculatures des corps arrondisse et amolisse les formes. Le style de Rottmayr se caractérise par une grande imagination créatrice, alliée à la maîtrise de la couleur et à un sens très sûr de la répartition des accents. Ses tableaux de chevalet, ses esquisses et dessins sont rares.