Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
O

Osona (les)

Famille de peintres espagnols (Valence, dernier tiers du XVe s. et premier tiers du XVIe s.).

Rodrigo (actif entre 1463 et 1516) est le premier maître espagnol ouvert au style du quattrocento italien, à une époque où persistait le goût pour le Gothique flamand. Il put se rendre en Flandres entre 1464 et 1476, période pendant laquelle il n'apparaît pas dans les documents valenciens. Sa personnalité artistique semble attester une conjonction du Midi et du Nord, des formes de Squarcione et de celles des Flamands. Le Calvaire (1476) de l'église S. Nicolás à Valence, signé et restauré en 1993, est une œuvre capitale qui affirme à la fois son sens dramatique et sa perméabilité aux influences étrangères. Le groupe de gauche est traité à la manière de Van der Weyden, tandis que celui de droite comporte des réminiscences mantegnesques. S'il exécuta seul le Saint Pierre assis sur un trône (Barcelone, M. A. C.) et le Saint Michel pesant les âmes (Valence, musée de la cathédrale), à partir de 1500, il collabora régulièrement avec son fils Francesco comme dans le Retable de saint Denis commandé par le chanoine Gaspar de Pertusa pour une chapelle de la cathédrale.Rodrigo Francesco (actif entre 1500 et 1514). Son style prolonge celui de son père avec des influences de Costa et de Francia. Le goût pour les effets de perspective est un des éléments importants de son art. Si, dans la manière de traiter les fonds, il apparaît assez moderne, il n'en va pas de même des scènes, où il suit les mêmes règles que son prédécesseur. Il convient également de souligner l'influence de Bermejo dans une œuvre comme l'Adoration des mages (San Francisco). L'œuvre de base pour la connaissance d'Osona le Jeune est une autre Adoration des mages (Londres, V. A. M.), signée " Lo fill de mestre Rodrigo ". Toute la scène met en évidence l'intérêt de l'artiste pour la mythologie classique et les formes de la Renaissance (Histoires d'Hercule aux écoinçons des arcs ornant le portique du fond). Les Scènes de la vie de Jésus (musée de Valence) offrent les mêmes caractéristiques. Dans quelques-uns de ces panneaux, on trouve des réminiscences de Mantegna, tout particulièrement dans la conception du paysage.

Ostade (les Van)

Peintres néerlandais.

 
Adriaen (Haarlem 1610  – id.  1684). Peintre de genre, de scènes de mœurs paysannes, il laissa aussi quelques portraits. Ses dessins aquarellés et ses gravures sont également très recherchés. On lui attribue plus de 900 tableaux, le plus souvent de petites dimensions et peints sur bois. Selon Houbraken, Van Ostade serait entré v. 1627 dans l'atelier de Frans Hals, où il aurait eu pour condisciple A. Brouwer. Si l'on discerne mal l'influence de Hals, en revanche l'exemple de Brouwer fut déterminant chez Van Ostade, qui devint, en Hollande, le grand peintre des " gueuseries ", tels la Salle de ferme (Copenhague, S. M. f. K.), l'Intérieur de cabaret (1636 ?, Louvre), les Paysans au cabaret (Mauritshuis) ou la Rixe (1637, Ermitage). Ces premières œuvres, peintes dans une gamme de couleurs simples, animées de figures pleines de truculence, s'inspirent directement, mais en en simplifiant l'esprit, du style et des sujets de Brouwer. En 1634, Van Ostade fut nommé membre de la gilde de Haarlem et devint doyen en 1662. Jusqu'à sa mort, il ne quitta guère Haarlem, sauf pour un bref voyage à Amsterdam en 1657, où il se maria.

   Vers 1640 env., il renouvela son style au contact du clair-obscur de Rembrandt et adopta des tonalités blondes : l'Atelier (Rijksmuseum), l'Intérieur d'école (1641, Louvre), l'Intérieur de paysans (Bruxelles, coll. Th. Meddens) et le Joueur de violon (1648, Ermitage) baignent dans une lumière claire soumise à un jeu de demi-teintes très fines.

   La palette de Van Ostade se distingue par un jaune froid dégradé jusqu'au brun, sorte d'" or vert " très particulier, par une gamme de bleutés très diffus ainsi que par certains orangés tenant du rose, du lilas ou du brun : la Rixe de paysans (Munich, Alte Pin.), les Joyeux Buveurs (Mauritshuis), l'Intérieur d'auberge (1653, Londres, N. G.), le Concert (1655, Ermitage) offrent un maximum d'animation, grâce à la diversité des couleurs et des poses. Deux Portraits de famille (1654, Louvre et La Haye, musée Bredius), aux dominantes de noirs et de bruns, évitent tout excès de fantaisie, de brio ainsi que la vulgarité, dans laquelle l'artiste tombe parfois.

   À partir de 1660 env., le clair-obscur va diminuant, tandis que la technique se fait plus lisse et plus fine. De cette dernière période, l'Alchimiste (1661, Londres, N. G.), le Cabaret hollandais (1663, Bruxelles, M. R. B. A.), les Paysans à l'auberge (Mauritshuis) semblent se rapprocher du ton pittoresque de J. Steen ou de Metsu. Van Ostade s'éloigne plus encore de la saisissante expression de Brouwer dans l'Atelier du peintre (1663, Dresde, Gg), l'Auberge (Londres, Buckingham Palace) et le Repos du voyageur (1671, Rijksmuseum). L'artiste est l'auteur de près de 800 dessins et aquarelles dont le corpus a paru récemment.

   L'esprit et l'atmosphère joviale du célèbre Ménétrier de village (1673, Mauritshuis) seront repris par ses nombreux élèves et imitateurs, tels Cornelis Dusart, qui termina plusieurs de ses tableaux, Cornelis Bega, M. Van Musscher et Richard Brakenburg. Fort apprécié au XVIIIe s., Van Ostade fut estimé parfois à l'égal de Rembrandt, et sa vogue persista au XIXe s.

 
Isaack (Haarlem 1621 – id. 1649). Son frère et élève, il fut inscrit en 1643 à la gilde de Haarlem, où se déroula sa brève carrière. Il peignit d'abord des scènes de paysannerie dans le style de son frère, puis trouva sa propre voie dans le paysage et notamment dans l'évocation de scènes d'hiver et de patinage. Parmi les œuvres voisines de celles de son frère, on peut citer : le Toit à porcs (Louvre), aux tons brun-roux, pailletés de prestes rehauts de jaune vif ; les Paysans buvant (Munich, Alte Pin.) ; la Cour de ferme (Londres, N. G.) ; Devant l'auberge (1646, Mauritshuis ; id., Ermitage). Les paysages d'Isaack, tels que Traîneaux sur la glace (Berlin), Fermes et dunes (musée de Bâle), Canal gelé avec couple patinant (Louvre), s'inscrivent dans la meilleure tradition néerlandaise par leurs effets lumineux, leurs grands ciels, l'animation créée par de petites silhouettes. L'artiste parvint à une monochromie analogue à celle de J. Van Goyen dans ses nombreuses Scènes d'hiver (Londres, N. G. ; musée d'Anvers ; Ermitage ; Dresde, Gg) ou dans ses Patineurs (Munich, Alte Pin.), tableaux très tôt recherchés par les amateurs anglais.