Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
B

Bettencourt (Pierre)

Artiste français (Saint-Maurice-d'Ételan, Seine-Maritime, 1917-Stigny, Yonne, 2006).

Son œuvre plastique s'accompagne d'une œuvre poétique nourrie de ses nombreux voyages. Il a publié des textes de ses poètes et écrivains préférés (Artaud, Béalu, Paulhan, Michaux). Son intérêt pour les relations entre la littérature et la psychologie, la mythologie et l'inconscient personnel se manifeste par la réalisation de compositions de matériaux insolites issus du quotidien, illustrant d'une manière à la fois naïve et hiératique, des scènes de viol, d'enlèvements, dans des décors de villes antiques ou de cataclysme (Présence occulte, 1967). Il a retenu l'attention des surréalistes et de Dubuffet en raison du caractère hallucinatoire et brut de son travail. Un ouvrage, Hauts-Reliefs (1971, Paris), écrit par l'artiste, détaille avec précision les divers thèmes abordés : arbres, montagnes, murs, personnages géométriques, bouddhas, couples, mères, solitaires, personnages volants. Son œuvre plastique a été révélé par René Drouin (1956 et 1961). Par la suite, il a été présenté chez Daniel Cordier (1963), à la gal. Arditti (1967-1970), au M. A. I. de Saint-Étienne (1983) et au Centre d'art contemporain de Tanlay en 1991. L'artiste est représenté au M. N. A. M. de Paris et au musée de Grenoble.

Beuckelaer (Joachim)

Peintre flamand (Anvers v.  1530  – id.  1573).

En 1560, il est inscrit comme maître à Anvers. D'après les quelques renseignements fournis par Van Mander, il semblerait que sa vie ait été misérable ; en fait il n'en est rien et son succès ne s'est jamais démenti. Dans ses œuvres signées et datées qui, au nombre d'une quarantaine, s'échelonnent entre 1561 et 1573/74, il adopte presque toujours un style apparemment semblable à celui de P. Aertsen, dont il est le neveu et l'élève, lui empruntant motifs et formes : Marchands de volailles (1564, Bruxelles, M. R. B. A.), Christ chez Marthe et Marie (1565, Stockholm, Nm), Intérieur de cuisine (1566, Louvre), Paysans au marché (1567, Vienne, K. M.). À la fin de sa vie, cependant, il aborde des thèmes nouveaux, comme celui du Marché aux poissons (tableaux au musée de Strasbourg, à Munich, Alte Pin., à Stockholm, Nm), et, dans certaines de ses compositions, il tend à nuancer davantage ses teintes et à donner encore plus de place qu'Aertsen aux étalages de victuailles du premier plan, préparant ainsi l'autonomie de la nature morte. Sur le plan iconographique, les différences entre Aertsen et lui sont sensibles. Alors que l'un, Aertsen, demeure très maniériste dans ses réalisations, mêlant nature morte et vie du Christ d'une manière quasiment inextricable, l'autre, Beuckelaer, annonce clairement le XVIIe siècle. Ses œuvres, où le thème religieux n'est plus qu'un prétexte, sont l'occasion de subtiles allégories moralisantes, sur le thème général des vices et des péchés, qui doivent se lire au travers des légumes et des fruits utilisés et par l'intermédiaire de proverbes ; mais l'on peut se contenter comme au XVIIe siècle, de n'y voir que de pures natures mortes.

Beuys (Joseph)

Peintre et sculpteur allemand (Clève 1921  – Düsseldorf 1986).

Théoricien, anthropologiste, professeur, homme politique, Beuys demeure avant tout un artiste.

   Pilote sur le front russe pendant la Seconde Guerre mondiale, son avion s'écrase en 1943 dans la presqu'île de Crimée. Son expérience dans la steppe russe et son étonnant sauvetage grâce à la graisse et au feutre auront une influence constante sur son œuvre.

   Après la guerre, il entre à la Kunstakademie de Düsseldorf, où il suit les cours de sculpture de Josef Enseling, puis ceux de Ewald Mataré, dont il deviendra le collaborateur. Les œuvres qu'il réalise à cette époque mettent l'accent sur le matériau : le bois reste brut, rugueux, anguleux, le bronze laisse apparentes les soudures, les brûlures.

   Suite à une grave dépression nerveuse, il cesse toute activité artistique et travaille dans la ferme de ses amis et collectionneurs, les frères Van der Grinten. Nommé professeur de sculpture à la Kunstakademie de Düsseldorf en 1961, il reprend son activité artistique et entre en contact avec le mouvement Fluxus, qui entend créer une nouvelle unité entre l'art et la vie en associant la musique, la littérature, le théâtre et les happenings. Débutent alors les actions et les performances qui ne cesseront de rythmer son évolution (le Chef, 1964, Berlin ; Comment on explique les tableaux au lièvre mort, 1965, Düsseldorf ; Celtic, 1970-1971, Édimbourg ; I like America and America likes me, 1974, New York).

   En 1964, Beuys commence à utiliser comme matériaux de sculpture la graisse, symbole de l'énergie et de la chaleur, et le feutre en tant qu'isolant contre le froid. Les œuvres de cette période, dont les principales se trouvent dans la collection Ströher (musée de Darmstadt), expriment sa théorie de la sculpture, de l'indéfini au fini, du chaud au froid, du dur au mou. De par la multiplicité de ses travaux, de ses actions, de ses performances, il apparaît bientôt comme l'un des artistes les plus influents mais aussi les plus contestés de l'époque. Sa personnalité le place au cœur des problèmes actuels et le pousse à étendre le concept de sculpture à la politique. Il fonde alors, en 1967, le parti des étudiants allemands, puis l'Organisation pour la démocratie directe, en 1971, et enfin l'Université internationale libre, en 1972. Simultanément, il divulgue son idée de " sculpture sociale ".

   Beuys a participé à de nombreuses manifestations internationales, où il étonnait par ses happenings et ses expositions désacralisantes : Documenta 3, 5, 6, 7, Biennale de Venise en 1976, São Paulo 1979. D'importantes rétrospectives de ses dessins, aquarelles et sculptures ont eu lieu dans de nombreuses villes européennes depuis sa mort, en 1986, et notamment à Zurich, Madrid et Paris, en 1994-1995.

Bewick (Thomas)

Graveur britannique (Cherryburn, Tyne and Wear, 1753  – Gateshead 1828).

Il travailla avec Ralph Beilby à Newcastle et développa le premier la technique de la gravure sur bois debout, plus subtile que la gravure sur bois de fil. Il utilisa ce procédé pour divers ouvrages, illustrant des poèmes, des fables et des traités d'histoire naturelle.

   On peut citer, parmi les plus célèbres, General History of Quadrupeds (1790) et History of British Birds (1797-1821), remarquables par leur technique accomplie du " trait blanc " et le réalisme précis de leurs vignettes (les " Tail Pieces " ou " Tale Pieces " selon l'artiste lui-même) ; elles montrent la connaissance approfondie que Bewick avait de la vie à la campagne et attestent de grandes qualités d'évocation, souvent pittoresques ou poétiques. Le succès de sa tentative pour donner à la gravure sur bois la finesse de la gravure sur cuivre contribua à répandre ce procédé comme moyen de reproduction au XIXe s.