gel
Abaissement de la température au-dessous de 0 °C.
Le gel est le moment où la vapeur d'eau se dépose en glace (givre) et où l'eau se congèle. Cette congélation peut atteindre très vite l'eau extra-cellulaire (augmentation du volume d'eau pris en glace provoquant un décollement des parois), puis l'eau des cellules elles-mêmes, induisant la destruction plus ou moins importante d'organites cellulaires, de tissus entiers, voire d'organes ; le gel peut ainsi aller jusqu'à la destruction totale de cultures ou de récoltes.
On considère 2 types de conditions provoquant le gel : les gelées noires et les gelées blanches.
Les gelées noires sont celles qui apparaissent par grand froid d'hiver s'installant sur de vastes territoires pour plusieurs jours, voire plusieurs semaines, et pouvant atteindre - 10 à - 30 °C ; elles sont dues à des masses d'air froid en provenance du pôle Nord ou des zones continentales. Elles surviennent souvent en période de non-végétation, ou de végétations basses recouvertes de neige, et surtout ne se produisent généralement qu'en fin d'hiver. Dans ces conditions, l'arrivée progressive des basses températures depuis l'automne permet une dessiccation lente des cellules ; cette dessiccation entraîne une résistance due à l'augmentation de la pression osmotique des cellules et à l'abaissement consécutif du point de congélation, qui peut atteindre des valeurs très basses, et évite ainsi l'effet dévastateur des grands froids. Cependant, un très fort gel (en dessous de - 20 à - 30 °C) risque de faire éclater les troncs.
Les gelées blanches sont par nature temporaires, souvent très localisées (microclimat), et se caractérisent fréquemment par une congélation plus ou moins immédiate de la rosée, ou dépôt de givre. Le refroidissement est dû au bilan radiatif des rayonnements telluriques toujours négatif, en particulier par nuit claire. Les gelées blanches peuvent alors ne se produire qu'en fin de nuit et en quelques points très sensibles et peu soumis à la ventilation (zone gélive). Elles surviennent principalement au cours du printemps, quant la végétation démarre (débourrement des bourgeons, floraison, croissance végétative des organes feuillés et des fruits), période très sensible car les cellules sont très turgescentes et donc très riches en eau (faible pression osmotique et très peu d'abaissement du point de congélation, soit un gel rapide dès - 2 °C).
Sensibilité au gel.
Selon les espèces et l'état physiologique des plantes, la rapidité et l'intensité du gel, les dégâts seront plus ou moins importants. Les cristaux de glace ont tendance à se former d'abord dans les espaces intercellulaires, et l'abaissement du potentiel hydrique qui en résulte tend à faire diffuser l'eau des cellules vers l'extérieur, où elle se congèle. On observe d'abord des décollements de membranes, futurs foyers d'infection et zones de subérisation (perte de qualité des fruits), souvent la fragilisation des pétioles et la chute des fruits, puis, par froid intense, l'éclatement du bois. Si le froid survient brutalement, la congélation de l'eau, très rapide, produit des déchirements de structures (cellules et tissus), induisant la mort des zones touchées.
Les dégâts de gel de printemps sont redoutables par la rapidité de l'arrivée du froid après des périodes douces de plein développement. Les rameaux sont plus difficilement remplacés par les secondes repousses tardives, la destruction de fleurs ou de jeunes fruits peut réduire à néant les récoltes (vigne, arbres fruitiers) ; plus rarement, cette destruction atteint les semis de pomme de terre ou de céréales de printemps. À l'automne, les premières gelées peuvent compromettre la récolte du raisin, de la betterave ou du maïs.
Les dégâts dus aux gels hivernaux dépendent pour une large part de la présence ou non d'une couche neigeuse ; sans protection, les céréales gèlent à partir de - 12 à - 15 °C, la vigne à partir de - 15 °C, le bouleau à partir de - 30 °C, les conifères à - 35 °C. Le gel prolongé du sol en période hivernale provoque une cristallisation de surface qui, comme pour les tissus, crée un assèchement et une diffusion de l'eau vers la surface ; il en résulte un gonflement du sol, une fragmentation des agrégats et parfois un déchaussement des jeunes plants encore insuffisamment enracinés (cas des céréales).
Conditions de gel.
C'est presque toujours la conjonction du passage d'une masse d'air froid et sec (haute pression de beau temps) et d'une nuit calme et claire qui induit un faible rayonnement atmosphérique et conduit, compte tenu du rayonnement tellurique naturel des surfaces (perte), à un bilan radiatif nocturne fortement négatif d'environ - 50 à - 150 W/m2. Ce bilan négatif n'est pas naturellement compensé, comme de jour, par les fortes énergies solaires. Il refroidit tout au long de la nuit les corps et en particulier les végétaux qui, contrairement au sol, ne disposent pas d'une capacité thermique (emmagasinement de la chaleur durant la journée et restitution de cette chaleur la nuit) qui leur permette de lutter contre ce refroidissement. Généralement, les surfaces deviennent alors plus froides que l'air, le seul phénomène qui s'oppose à ce refroidissement étant la convection (échange convectif de chaleur sensible par l'air plus chaud) ; aussi n'y aura-t-il pas de gel par nuit avec vent, même si l'air est froid mais juste au-dessus de 0 °C. De même, un passage nuageux (eau liquide) de faible altitude émet un rayonnement tellurique vers le sol, beaucoup plus fort (corps noir) que celui d'une atmosphère sèche, et limite immédiatement le refroidissement nocturne.
Les risques par nuit calme et très claire seront d'autant plus importants que la masse d'air est déjà proche des températures de gel des végétaux (environ - 2 °C au printemps pour des organes en développement) ; en effet, dans ces conditions, le gel se produira plus tôt dans la nuit, et les plantes y seront donc exposées plus longtemps, surtout si la ventilation est faible. Notons qu'une pente permet en général l'écoulement, par gravité, de l'air froid formé au voisinage des surfaces, favorisant une convection et l'élimination de l'air froid, ce qui limite le refroidissement s'il n'y pas de barrage à cet écoulement (haies, talus...).