Dictionnaire mondial des Films 2005Éd. 2005
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Napoléon

Film historique d'Abel Gance, avec Albert Dieudonné (Napoléon), Gina Manes (Joséphine), Harry Krimer (Rouget de L'Isle), Edmond Van Daele (Robespierre), Alexandre Koubitzky (Danton), Antonin Artaud (Marat), Pierre Batcheff (Hoche), Annabella (Violine Fleury), Abel Gance (Saint-Just), Marguerite Gance (Charlotte Corday), Nicolas Koline (Tristan Fleury), Suzanne Bianchetti (Marie-Antoinette), Vladimir Rovdenkóv (Bonaparte enfant), Philippe Hériat, Georges Campin, Damia (la Marseillaise), Armand Bernard (Jean-Jean).

Scénario : Abel Gance
Photographie : Jules Kruger, Roger Hubert, Georges Lucas, Mundwiller, Léonce-Henri Burel, Fédor Bourgassoff
Décor : Alexandre Benois, Eugène Lourié, Pierre Schildknecht, Jacouty, Ivan Lochakoff
Musique : Arthur Honegger
Montage : A. Gance
Production : A. Gance
Pays : France
Date de sortie : 1927
Technique : noir et blanc
Durée : version intégrale : 13 000 m ; version présentée le 7 avril 1927 à l'Opéra : 5 200 m (environ 3 h 20) ; version Brownlow : 5 h à 18 images/s

Résumé

Limité aux trois premières parties d'un vaste projet qui aurait dû donner naissance à huit films, de « la Jeunesse de Bonaparte » à « Sainte-Hélène », le Napoléon comprend six périodes : 1. Prologue, la jeunesse de Bonaparte : Brienne, neuf années plus tard au club des Cordeliers, les Tuileries, Violine, Pozzo di Borgo. 2. Bonaparte en Corse, les Deux Tempêtes. 3. Le siège de Toulon, après la prise de Toulon. 4. Bonaparte et la Terreur, l'assassinat de Marat par Charlotte Corday, Thermidor, Vendémiaire. 5. Joséphine de Beauharnais, les adieux à la Révolution. 6. Le départ pour la campagne d'Italie, les « mendiants de la Gloire ».

Commentaire

Un chef-d'œuvre visionnaire

Le film, sans cesse remanié, a été présenté en sept versions différentes entre 1927 et 1982, muet, puis sonorisé en 1935 et 1970, redevenant muet pour la dernière projection, la plus complète et monumentale, préparée par Kevin Brownlow en 1982. Œuvre d'un poète et non reconstitution fidèle, composé d'épisodes disparates, le Napoléon se prête à ces métamorphoses que ne redoutait sans doute pas son auteur.

   « Il n'y a pas dans le film un seul passage sans originalité technique », écrivait Léon Moussinac en 1927. La caméra enfin libérée de son pied, perpétuellement en mouvement, permet à Gance de « faire du spectateur un acteur », de « faire en sorte qu'il participe à l'action, l'emporter dans le rythme des images ». Pour organiser les images grandioses qu'il méditait, il fallait à ce visionnaire créer une nouvelle expression. L'invention essentielle est celle du triple écran, ancêtre du « Cinérama ». Gance en multiplie les possibilités ; le triptyque fait faire au cinéma un pas gigantesque en utilisant des images diversifiées : ou distinctes mais procédant d'une même action, ou identiques, répétées trois fois, ou encore symétriques, ou en mouvement de part et d'autre de l'image centrale donnant à ce film unique une démesure, une puissance qui emporte le spectateur.

   Certains, dont Moussinac, ont prétendu que le Napoléon est un film fasciste. La lecture politique ne doit-elle pas, pour une fois, s'effacer devant l'immensité créatrice de l'œuvre, l'une des plus importantes de l'histoire du cinéma ?

Napoléon

Film historique de Sacha Guitry, avec Raymond Pellegrin (Napoléon), Daniel Gélin (Bonaparte), Michèle Morgan (Joséphine), Maria Schell (Marie-Louise), Pierre Brasseur (Barras), Danielle Darrieux (Éléonore Denuelle), Sacha Guitry (Talleyrand), Dany Robin (Désirée Clary), Jean Gabin (Lannes), Micheline Presle (Hortense), Erich von Stroheim (Beethoven), Orson Welles (sir Hudson Lowe).

Scénario : Sacha Guitry
Photographie : Pierre Montazel, Roger Dormoy
Décor : René Renoux
Musique : Jean Françaix
Montage : Raymond Lamy
Pays : France
Date de sortie : 1955
Technique : couleurs
Durée : 3 h 16

Résumé

À l'annonce de la mort de Napoléon, Talleyrand raconte l'Empereur à ses amis réunis autour de lui.

Commentaire

Guitry-Talleyrand, cynique et sceptique, raconte « la petite histoire » de l'Empereur, avec ses bons mots et son esprit habituel. Les séquences d'action sont réalisées par un spécialiste qui avait travaillé à Hollywood : Eugène Lourié.

Napoléon II l'Aiglon

Film historique de Claude Boissol, avec Bernard Verley, Danielle Gaubert, Jean Marais, Georges Marchal.

Pays : France
Date de sortie : 1961
Technique : couleurs
Durée : 1 h 40

Résumé
Né en 1811, mort en 1832, le fils de Napoléon ne réussira jamais à se soustraire à l'influence du chancelier autrichien Metternich. Une morne biographie bien loin de Rostand.

Narcisse

Comédie d'Ayres d'Aguiar, avec Rellys, Monique Rolland, Gabriello, Georges Lannes.

Pays : France
Date de sortie : 1939
Technique : noir et blanc
Durée : 1 h 40

Résumé
Pour hériter de son oncle, un jeune homme est obligé de passer son brevet de pilote. Il l'obtient finalement involontairement, gagne son héritage et l'amour en prime.

le Narcisse noir

Black Narcissus

Drame de Michael Powell et Emeric Pressburger, d'après le roman de Rumer Godden, avec Deborah Kerr, Sabu, Flora Robson, David Farrar, Kathleen Byron.

Pays : Grande-Bretagne
Date de sortie : 1947
Technique : couleurs
Durée : 1 h 39

Résumé
Au cœur de l'Himalaya, une religieuse chargée de fonder un couvent s'éprend du représentant anglais et déclenche la jalousie meurtrière d'une autre sœur.

Nashville

Nashville

Chronique de Robert Altman, avec David Arkin (Norman), Barbara Baxley (Lady Pearl), Karen Black (Connie White), Shelley Duvall (L.A. Joan), Timothy Brown (Tommy Brown), Keith Carradine (Tom Frank), Geraldine Chaplin (Opal), Barbara Harris (Albuquerque), Ronee Blakley (Barbara Jean).

Scénario : Joan Tewkesbury
Photographie : Paul Lohmann
Décor : Jules Melino
Musique : Richard Baskin
Montage : Sidney Levin, Dennis Hill
Production : R. Altman (Paramount)
Pays : États-Unis
Date de sortie : 1975
Technique : couleurs
Durée : 2 h 39

Résumé
Entre une séquence d'ouverture à l'aéroport de Nashville (Tennessee), qui introduit la quasi-totalité des vingt-quatre personnages lors de l'arrivée de la chanteuse Barbara Jean, et la séquence finale au Parthénon où, pendant son concert, l'artiste est assassinée, Altman a fait se croiser, s'effleurer, parfois se rencontrer des destinées individuelles dans la confusion d'abord, tant visuelle que sonore, puis en s'attachant aux gestes et aux comportements, mais de l'extérieur, sans volonté d'analyse psychologique.

Commentaire

Un chaos bien organisé
Altman a tourné des œuvres plus poétiques (John McCabe), plus délirantes (Brewster McCloud), plus introspectives (Trois Femmes), plus expérimentales (California Split), mais aucune ne résume mieux son projet artistique. En deux heures quarante, se gardant de privilégier un seul personnage, il détourne le genre bien établi du feuilleton familial ou collectif télévisé où les auteurs multiplient les scènes mélodramatiques, les rencontres inattendues, pour créer l'émotion larmoyante. Altman, lui, a toujours aimé utiliser les stéréotypes (du western, du film noir, du film de gangsters, de la science-fiction) pour mieux subvertir et dévoiler les mythes qui sous-tendent la culture de son pays. Il est donc à la fois l'un des cinéastes les plus américains qui soient et l'un des rares qui refusent les lois du spectacle et préviennent toute possibilité d'identification. D'où ses nombreux insuccès commerciaux.

   Réalisé peu après le scandale du Watergate et peu avant la célébration du bicentenaire des États-Unis, Nashville est une interrogation sur le spectacle comme politique et sur la politique comme spectacle. Le monde de la « country music », des affaires qui s'y brassent et des concerts au Grand Opry est mis en parallèle avec la campagne présidentielle de Hal Philip Walker, le candidat invisible du Replacement Party. Poursuivant ses recherches entreprises dans California Split, Altman superpose les événements, adopte une structure de récit qui donne en permanence une impression de flottement et d'improvisation (mais rien de plus organisé que ce chaos apparent), sature sa bande-son de musiques et de bruits divers, nous grise d'enregistrements, de disques, d'émissions de télévision, de conversations téléphoniques, faisant de son film un des commentaires les plus pertinents et les plus ironiques à la fois du monde de la communication et de la société médiatique.

   Vingt-sept chansons ajoutent à la richesse de la texture formelle en moquant l'action ou en l'anticipant. Mais on aurait tort de privilégier le point de vue satirique du metteur en scène. En témoigne le personnage d'Opal, faux reporter de la B.B.C., qui multiplie les simplifications outrancières et les clichés sur le Nouveau Monde et qu'interprète Geraldine Chaplin. Car Altman, s'il aime fustiger les mœurs et les valeurs de son pays, sait aussi à l'occasion exalter ce qu'il ridiculise. Les aspirantes chanteuses, les épouses esseulées, les interprètes démagogues ou les play-boys cyniques qu'il nous montre avec distance peuvent fugitivement nous révéler leur part de vulnérabilité ou d'humanité.