Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Oe Kenzaburo

Écrivain japonais (Ehimé 1935).

Cet auteur, prix Nobel en 1994, est reconnu depuis trois décennies comme un des romanciers les plus remarquables du Japon contemporain. Né dans un village au cœur des forêts et des monts de l'île de Shikoku, il restera marqué par cette intimité profonde qui le lie avec la nature verdoyante et par les racines du terroir. Il avait 12 ans, lorsque, après la guerre, l'éducation nationaliste qu'il avait subie jusqu'alors fut remplacée par celle des nouvelles écoles démocratiques sous la nouvelle constitution. En 1954, il entra à l'Université de Tokyo pour étudier la littérature française auprès de Watanabe Kazuo, spécialiste de la Renaissance et humaniste intransigeant. Il s'adonna à la lecture de Sartre et écrivit, pour les étudiants, des pièces de théâtre, mais ses talents furent révélés au public avant la fin des études (1959). En mai 1957, Un travail étrange, nouvelle adaptée d'une de ses pièces de théâtre, bénéficia d'une critique élogieuse de Hirano Ken dans le journal Mainichi, et marque ses véritables débuts littéraires. Après l'Orgueil des morts (1957) et Gibier d'élevage (1958) qui obtint le prix Akutagawa – suivi de Arrachez les bourgeons, tirez sur les enfants (1958) –, il continue de publier de courts récits qui empruntent leur sujet aux problèmes du monde contemporain : Notre époque (1959) ; Dix-Sept Ans (1961) ; le Jeune Homme arrivé en retard (1962) ; l'Homme sensuel (1963). Dans cette année 1963, un événement marquant eut lieu : l'écrivain, devenu père d'un enfant gravement handicapé, et placé devant la nécessité redoutable du choix entre sa vie et sa mort, rend visite à Hiroshima, ce haut lieu symbolique du mouvement contre l'arme nucléaire. Ce sera le début d'un long approfondissement qui va de Une affaire personnelle (1964) ; Aigwi, le monstre des nuages (1964) ; Notes de Hiroshima (essai, 1965) ; le Jeu du siècle (1967) ; Dites-nous comment survivre à notre folie (1969), jusqu'à Lève-toi, homme nouveau (1983), M/T et l'histoire des merveilles de la forêt (1986) et Lettre aux années de nostalgie (1987). Un paysage familial serein autour de son fils handicapé se développe également dans Parents de la vie (1989) et Une vie tranquille (1990), ainsi que dans Une famille en voie de guérison (essai, 1995). Ses essais (l'Homme d'après la bombe atomique ; Notes d'Okinawa, 1971), comme ses romans (le Déluge parvient jusqu'à mon âme, 1973 ; le Jeu de la synchronie, 1979 ; Un arbre vert flamboyant, trilogie, 1993-1995) et ses nouvelles (le Jour où il daignera lui-même essuyer mes larmes, 1972 ; les Femmes qui écoutent l'arbre à pluie, 1982 ; Comment tuer un arbre, 1984) témoignent de sa sensibilité aux angoisses de son époque, ainsi que de son exigence morale.

Oehlenschläger (Adam Gottlob)

Poète danois (Copenhague 1779 – id. 1850).

Henrik Steffens, de retour d'Allemagne, répandit l'idéologie romantique, et il fallut à Oehlenschläger cette rencontre décisive pour commencer la rédaction de ses Poèmes, publiés en 1803 en un fort volume de 300 pages. On y trouve des « romances » inspirées par des ballades du Moyen Âge (la Colline aux elfes, le Chevalier au lion), des suites épiques aux sujets nordiques (la Mort de Hakon Jarl) et surtout les Cornes d'or, œuvre qui marque l'entrée en scène du romantisme au Danemark. On y distingue aussi le Jeu de la veille de la Saint-Jean, libre suite de petits poèmes retraçant la promenade d'un couple d'amoureux qui se mêle à la foule et aux spectacles forains : cela permet à l'auteur de faire la satire de la poésie raisonnable du XVIIIe s., de se moquer de l'esprit terre à terre du bourgeois, d'exalter la communion avec la nature, de passer d'une forme à l'autre. Dès 1805, Oehlenschläger publia un recueil encore plus volumineux, les Écrits poétiques, qui comprend les images d'un Voyage à Langeland, une Vie du Christ revécue dans la nature au fil de l'année, une comédie, la Saga de Vaulundur, au sujet emprunté à l'Edda, et Aladin, comédie en vers pleine d'humour. Il se tourna ensuite vers des sujets empruntés à la mythologie ou l'antiquité nordiques, suivant l'exemple de Johannes Ewald. Dans ses Poèmes nordiques (1807), le Voyage de Thor à Jotunheim est un poème « homérique », tandis que les tragédies Baldur le Bon et Hakon Jarl s'inspirent de Sophocle et de Schiller. Le succès de Palnatoke (1807) et surtout d'Axel et Valborg (1808), qui respecte la règle des trois unités, encouragea Oehlenschläger à écrire pour la scène.

   Professeur d'esthétique à l'université de Copenhague (1810), il poursuivit son œuvre malgré les conflits qui l'opposèrent successivement à Baggesen et à Grundtvig et les critiques acerbes de J. L. Heiberg sur ses conceptions théâtrales.

O'Faolain (Sean)

Écrivain irlandais (Cork 1900 – Dublin 1991).

Il combattit durant la guerre civile et fut responsable de la propagande de l'I.R.A., avant de poursuivre ses études et de faire un long séjour aux États-Unis. C'est dans la nouvelle, genre dont il est également le théoricien, qu'il donne le meilleur de lui-même (Folie d'une nuit d'été, 1932 ; les Arbres qui parlent, 1971). Ses romans (Un nid de gens simples, 1933 ; Oiseau seul, 1936 ; Revenez en Érin, 1940 ; Encore, 1979), vaste fresque couvrant près d'un siècle d'histoire irlandaise, et ses récits autobiographiques (Vive moi !, 1964) ou biographiques (Eamon de Valera, 1933 ; le Roi des mendiants, 1938) témoignent de la même attention à l'âme nationale et à ses indécisions. Il est aussi l'auteur d'essais critiques (les Irlandais, 1949-1969).

Ogawa Kunio

Écrivain japonais (Shizuoka 1927 – id. 2008).

Enfant de santé fragile, il se passionne tôt pour la peinture, la lecture et pour la Bible à laquelle il a été initié dans plusieurs églises. Après la guerre, il sera baptisé catholique à 20 ans. Il commence à écrire afin de surmonter ses souffrances morales et, ayant quitté l'Université de Tokyo, il embarque pour la France (1953), voyage en moto, pendant deux ans, sur les rivages de la Méditerranée : Espagne, Afrique du Nord, Italie, Grèce. À son retour (1956), il écrit l'Île d'Apollon, son premier recueil de nouvelles publié en 1957. Il donnera une série de nouvelles d'inspiration biblique : Cette lumière qui vient de la mer (1968) ; Sang et visions (1979), et un roman : Une Bible (1969). Le terroir natal lui sert aussi de cadre pour ses romans, dont Rivage d'un défi (1969-1972).