Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
H

Heliand
(« Sauveur »)

Poème biblique en vers rimés et allitérants, écrit en ancien saxon par un clerc inconnu, v. 830, pour mettre à la portée du peuple des textes réservés jusque-là aux clercs. Il reprend l'Harmonie de Tatien en utilisant le Commentaire de saint Matthieu composé v. 822 par l'abbé de Fulda, Raban Maur. Suivant le modèle des épopées chrétiennes, l'auteur germanise le contexte évangélique : le Christ et ses disciples deviennent un prince saxon et ses vassaux, les noces de Cana un festin germanique. Les préceptes évangéliques susceptibles de heurter la mentalité germanique de l'époque, comme le pardon des offenses, sont passés sous silence.

Hélias (Pierre Jakez)

Écrivain français d'expression française et bretonne (Pouldreuzic 1914 - Quimper 1995).

Fils d'ouvriers agricoles, élevé en langue bretonne, il n'apprit le français qu'à l'école ; agrégé de lettres, il fut directeur de l'école normale de Quimper et chargé des cours de celtique à l'université de Bretagne occidentale. Auteur dramatique (Mevel ar Gosker [le Grand Valet], 1977 ; An Isild a-heul [Yseult seconde], 1978), c'est aussi un poète, dont les vers très musicaux paraissent dans des recueils bilingues (Maner kuz – Manoir secret, 1964 ; Ar Mên du – la Pierre noire, 1974 ; An Tremen-buhez – le Passe-vie, 1979). Il a passionné la France entière avec ses souvenirs d'enfance (le Cheval d'orgueil, 1975) et qui évoquent la vie paysanne dans une paroisse bretonnante du pays bigouden dans la première moitié du XXe s. dont l'esprit se retrouve dans ses contes (les Autres et les miens, 1977 ; Contes du vrai et du semblant, 1984) et des romans (l'Herbe d'or, 1982) où la mémoire touche au rêve et à la vision (la Colline des solitudes, 1984).

Helinand de Froidmont

Poète et chroniqueur français (vers 1160 – v. 1230).

Moine de la région de Beauvais, il fait un brillant passage à la cour de Philippe Auguste, puis il rédige les Vers de la mort, méditation sur le mépris du monde à l'intention de ses amis et des grands seigneurs, célèbre pour sa forme (12 octosyllabes sur 2 rimes aabaabbbabba). De lui on connaît aussi une épître en latin, envoyée à Gautier pour le dissuader de se marier (1190), et une chronique universelle en partie perdue (1215).

Héliodore d'Émèse

Écrivain grec (IIIe ou IVe s. apr. J.-C.).

Peut-être issu d'une famille de prêtres du Soleil, et devenu évêque de Tricca, en Thessalie, il est connu pour les Éthiopiques (gr. Aithiopika) ou Théagène et Chariclée, le roman grec le plus lu et imité jusqu'au XVIIe siècle, par les Byzantins, Le Tasse, Cervantès et Racine : le roman raconte les aventures de deux fiancés, le Thessalien Théagène et Chariclée, princesse éthiopienne, qui, après bien des malheurs, enlèvements, naufrages et trahisons, se retrouvent. L'intrigue apparemment simple, reprise par Verdi (Aida), se déploie en un récit virtuose, riche en rebondissements, récits secondaires, descriptions dramatiques et interventions divines, qui rappelle l'Odyssée.

Hellens (Frédéric Van Ermengem, dit Franz)

Écrivain belge de langue française (Bruxelles 1881 – id. 1972).

Son œuvre est marquée par la découverte des Réalités fantastiques (recueil de nouvelles, 1923) ou du Fantastique réel (1967), étroite imbrication de la réalité et de l'onirisme. En 1920, il fonde la revue Signaux de France et de Belgique, qui deviendra le Disque vert et œuvrera pour le renforcement des liens entre écrivains français et belges. Mélusine (1920) fait du rêve la base même du récit : rencontres du narrateur avec la fée Mélusine, agencées selon une logique onirique, pré-surréaliste. Le roman fait place à des thèmes comme la vitesse ou le machinisme. C'est avec des récits nés d'une autobiographie transmuée en rêve et en poésie qu'Hellens trouve son originalité. D'En écoutant le bruit de mes talons (1920) aux Mémoires d'Elseneur (1954), en passant par la trilogie le Naïf (1926), les Filles du désir (1930) et Frédéric (1935), puis par Naître et Mourir (1948) et l'Homme de soixante ans (1951), s'explorent et s'approfondissent les multiples strates d'un univers marqué par l'impossible et nécessaire conciliation de la part divine et de la part démoniaque qui coexistent dans chaque individu. Ce thème essentiel structure aussi le roman Moreldieu (1946), réflexion passionnée sur la volonté de puissance. Essayiste, Hellens scrute la Poétique des éléments et des mythes (1966), médite sur la mémoire et l'art et commente son itinéraire voué au rêve et à la littérature (Documents secrets, 1958).

Heller (Joseph)

Écrivain américain (Brooklyn 1923 – Long Island, New York, 1999).

Auteur dramatique (We bombed in New Haven, 1968) ou romancier (Franc comme l'or, 1979), il campe l'homme contemporain, « bidasse » ou « cadre supérieur » aux prises non avec la mort, mais avec les règles de la bureaucratie. Avec l'Attrape-nigaud [Catch 22] (1961), on a l'épopée dérisoire d'un pilote pris dans l'engrenage des missions de bombardement et de la folie et la critique sur le mode tragique et burlesque du bellicisme et de la réalité contemporaine. Dans Panique (1974), la cible est le système de production. Son style est marqué par les ruptures de rythme, les changements de ton et de vitesse (Figure-toi, 1988).

Helman (Lodewijk ou Lou Lichtveld, dit Albert)

Diplomate et écrivain hollandais d'origine antillaise (Paramaribo 1903-Amsterdam 1996).

Ce « Frantz Fanon de Surinam » a évoqué, dans une prose rythmique, l'irréductible exil de l'être déchiré entre deux cultures (la Plantation solitaire, 1931 ; Descente dans un volcan, 1949 ; Silence brûlant, 1952 ; Demi-finale, 1982) et prôné un retour à la nature et à ses rythmes élémentaires (Cœur sans patrie, 1929 ; Aller et retour, 1984).

Heltai (Gáspár)

Humaniste hongrois (Nagydisznód, auj. Cisnadie, 1520 – Kolozsvár, auj. Cluj, 1574).

Contemporain de Rabelais, Heltai incarne l'esprit de la Renaissance dans ses contes (Cent Fables, 1556) et ses récits insérés dans la Chronique hongroise (1575). Pasteur luthérien, il traduisit la Bible.

Heltai (Jenö)

Écrivain hongrois (Budapest 1871 – id. 1957).

Ses contes et ses romans hésitent entre la virtuosité de l'intrigue (Family Hotel, 1912) et l'analyse psychologique (la Maison des rêves, 1929). Il fut aussi un auteur dramatique à succès (le Croisé muet, 1936).