Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
G

Géraldy (Paul Lefevre-Geraldy, dit Paul)

Écrivain français (Paris 1885 – Neuilly-sur-Seine 1983).

On a surtout retenu de son œuvre, tenue pour un peu surannée, le recueil Toi et moi, qui, en 1913, atteint des tirages jamais vus pour un ouvrage de poésie, mettant en scène, sous le signe du colloque sentimental, les petits moments de l'amour, de l'attirance initiale à la solitude retrouvée. En 1960, Vous et moi aura moins d'écho. On lui doit aussi des « tragédies légères » (les Noces d'argent, 1921 ; Grands Garçons, 1922), des souvenirs (Carnets d'un auteur dramatique, 1922), un roman (le Prélude, 1923) et des maximes sur l'Amour (1929).

Gerber (Alain)

Écrivain français (Belfort 1943).

Critique de jazz, chroniqueur gastronomique, appréhendant le monde à travers un kaléidoscope d'images et de rythmes (la Couleur orange, 1975 ; le Buffet de la gare, 1976 ; le Plaisir des sens, 1977 ; Une sorte de bleu, 1980) qui tient à la fois de la peinture baroque et de la séquence cinématographique, il projette la quête initiatique de l'enfant qu'il n'est plus et la recherche du bonheur de l'homme inquiet qu'il est devenu dans une histoire morte – l'empire aztèque à la veille de l'arrivée de Cortés (le Jade et l'Obsidienne, 1981) – ou une nature inviolée – la forêt canadienne (le Lapin de lune, 1982) –, toutes deux génératrices de solitude (les Jours de vin et de roses, 1984 ; le Verger du diable, 1989). Jours de brume sur les hauts plateaux (2001), récit d'initiation, a pour cadre un fort de l'armée coloniale en Cochinchine.

Gerbert de Montreuil

Écrivain picard (début XIIIe s.).

En relation avec la cour de Ponthieu, Gerbert a composé deux récits en vers, Gerart de Nevers ou le Roman de la Violette et une longue Continuation du Conte du Graal. Gerbert de Nevers, roman d'aventures composé entre 1227 et 1229, se fonde, comme le Guillaume de Dole de Jean Renart, auquel il reprend la pratique des insertions lyriques, sur le motif folklorique de l'innocente persécutée : un traître surprend le secret de la belle Euriaut, une tache en forme de violette sur le sein. Fou de rage, l'amant, le comte Gérard de Nevers, renonce pourtant à tuer celle qu'il croit infidèle et il l'abandonne dans une forêt ; puis, repentant et déguisé en jongleur, il se lance dans une longue quête pour retrouver la trace d'Euriaut, qu'il délivre au moment où elle va être condamnée au bûcher. La Continuation du Conte du Graal, longue de 17 090 vers et composée vers 1226-1230, entrelace les aventures de Perceval aux aventures d'autres héros arthuriens comme Gauvain ou encore Tristan (épisode de Tristan ménestrel), mais ne mène pas à son terme attendu la quête du Graal par Perceval. Son orientation moralisante et religieuse très accentuée témoigne de l'influence de la Quête du saint Graal.

Gerhardt (Paul)

Poète allemand (Gräfenhainichen 1607 – Lübben an der Spree 1676).

Fils d'aubergiste, pasteur à Berlin, où il eut des démêlés avec le grand électeur à propos de l'édit de Tolérance, qu'il refusa de signer (1664), puis à Lübben, il est, après Luther, le plus important auteur de cantiques luthériens. Ses textes expriment, avec une simplicité proche du chant populaire, une confiance naïve envers le Créateur et savent trouver un juste équilibre entre les nécessités de la liturgie et le recueillement personnel. Nombre de ses cantiques comme À présent, les forêts reposent, Oh tête couverte de sang et de plaies, sont encore vivants aujourd'hui.

Germain (Sylvie)

Romancière française (Châteauroux 1954).

Philosophe (elle soutient une maîtrise sur la mystique chrétienne, un doctorat sur le visage humain, et enseigne la philosophie à Prague entre 1986 et 1992), elle publie son premier roman en 1985, le Livre des nuits, quête spirituelle menée à travers l'évocation de la violence du siècle. Suivront Jours de colère (1989, prix Femina), l'Enfant méduse (1991), Immensités (1993) ; régulièrement, la douceur du langage s'associe au sentiment d'épouvante, tout comme dans Éclats de sel (1996), qui mêle mysticisme et légende, et Tobie des marais (1998), histoire d'une famille d'origine polonaise frappée par des décennies de malédiction. Parallèlement à sa production romanesque, elle évoque dans Céphalophores (1997) les grandes figures de décapités de l'histoire, de la littérature ou du martyrologe chrétien, et interroge la vie, l'œuvre et l'expérience spirituelle d'une jeune femme juive hollandaise morte à Auschwitz dans Etty Hillesum (1999, prix des Écrivains croyants).

Germâtchaw Takla Hawâryât

Écrivain et homme politique éthiopien (Tagulat, Choa, 1915).

Fils de l'homme politique et écrivain Takla Hawâryât Takla Mâryâm, il publia en 1950, à Asmara, un important roman historique, illustré de dessins à la plume – ce qui était une innovation –, intitulé Araya, du nom de son héros, jeune Éthiopien qui, après des études en France, rentre dans son pays peu avant l'invasion italienne et qui, ayant rejoint la Résistance, verra la libération de son pays. L'ouvrage, en partie autobiographique, reflétait non seulement les événements qui venaient de secouer l'Éthiopie, mais le drame intérieur de chacun, dans une langue sobre et directe. Sa pièce de théâtre en vers, Têwodros (1949-1950), fait revivre la figure de l'empereur Théodore II, qui se suicida après sa défaite devant les Anglais en 1868 : certains virent dans le geste de ce souverain qui avait défié l'envahisseur étranger jusque dans la mort et n'avait pas choisi l'exil, après la défaite, une critique de l'attitude du Négus.

Gernsback (Hugo)

Ingénieur, éditeur et écrivain américain (Luxembourg 1884 – New York 1967).

Fondateur en 1908 d'un magazine à vocation scientifique (Électricité moderne), il y publia des articles scientifiques et des feuilletons d'anticipation (Ralph 124 C 41 +, 1911 ; les Aventures scientifiques du baron de Munchausen, 1915-1917). En 1924, il inventa le terme de scientifiction qui ne tarda pas à se transformer en « science-fiction ».

Gervais du Bus

Poète français (début XIVe s.).

Notaire royal sous Philippe le Bel, il est l'auteur du roman de Fauvel. Cette œuvre satirique en vers en deux parties (1310-1314) – on a pu discuter l'attribution de la première à Gervais – décrit dans sa première partie l'apothéose de Fauvel, le cheval fauve, qui, grâce à Fortune, règne en maître sur un monde « bestorné », à l'envers, où triomphent les vices. On retrouve d'ailleurs dans le nom de Fauvel les initiales de sept péchés majeurs : Flatterie, Avarice, Vanité, Vilenie, Envie, Lâcheté... Mais le texte s'achève sur la chute en enfer de Fauvel et le couronnement de Loyauté. Texte satirique qui utilise les procédés de l'écriture allégorique, Fauvel se situe dans le sillage d'œuvres de la seconde moitié du XIIIe siècle comme le Couronnement de Renart et Renart le Nouvel de Jakemart Giélée, qui dénoncent elles aussi la perversion du monde. Une version interpolée (vers 1318-1320) contient des pièces musicales d'un certain Chaillou de Pesstain. Le manuscrit BNF 146, témoin de la version interpolée, présente une iconographie d'un très grand intérêt (scène, notamment, de charivari).