Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Dennery (Adolphe Philippe, dit)
ou Adolphe Philippe, dit D'Ennery

Auteur dramatique français (Paris 1811 – id. 1899).

Il écrivit, souvent en collaboration, des mélodrames habilement construits (Gaspard Hauser, 1838 ; Don César de Bazan, 1844 ; les Deux Orphelines, 1874, qui reste le modèle du genre), ou adaptés de romans d'autres auteurs, comme le Tour du monde en quatre-vingts jours avec J. Verne (1875), ainsi que des féeries et des livrets d'opéra (le Tribut de Zamora, avec Gounod, 1881 ; le Cid, avec Massenet, 1885). Sa collection d'objets orientaux est à l'origine du musée d'Ennery (Paris).

Denon (Dominique Vivant, baron)

Écrivain français (Givry, près de Chalon-sur-Saône, 1747 – Paris 1825).

Habile à trouver des protecteurs et à s'adapter aux régimes successifs, il mena une vie mondaine de « connaisseur » et une triple carrière de diplomate (à Saint-Pétersbourg, à Naples), de conservateur et de dessinateur-graveur. Responsable du cabinet des Médailles et gentilhomme de la Chambre du roi sous l'Ancien Régime, il fut sous la Révolution protégé par David, qui le sauva de l'échafaud, puis gagna la confiance de Bonaparte, qu'il accompagna en Égypte. Il publia un Voyage dans la haute et basse Égypte en 1802 et fut chargé de la monumentale Description de l'Égypte, qui parut à partir de 1809. Directeur général des musées en 1802, il fut le premier organisateur du Louvre. Il avait publié anonymement en 1777 un récit libertin dans la manière de Crébillon, Point de lendemain, qui, dans sa brièveté, atteint à une sorte de perfection (il en proposera une seconde version en 1812). Un jeune homme ingénu raconte comment il a été attiré dans une résidence de campagne par une femme du monde qui réussit, lors de cette nuit d'amour où se cultivent tous les mystères, à tromper à la fois son mari, son amant en titre et lui-même. L'extrême raffinement d'une langue qui réussit cependant à échapper à la préciosité, l'utilisation originale de l'espace et du temps servent à une mise à nu désenchantée des règles véritables de la mondanité sans pour autant que soit formulée une morale, même libertine.

Denys d'Halicarnasse

Historien et critique grec (Ier s. av. J.-C.).

Professeur de grammaire et de rhétorique à Rome, il contribua, par ses cours et ses traités (entre autres, sur Démosthène et Thucydide), à formaliser la tradition de l'atticisme. Dans les Antiquités romaines, dont il reste 11 livres sur 25, il retrace, en en faisant l'éloge, l'histoire de Rome, des origines aux guerres puniques, mêlant aux renseignements factuels, notamment ethnographiques, les débats et les discours fictifs.

Déom (Clément)

Auteur dramatique belge de langue wallonne (Liège 1868 – id. 1956).

Il débuta en 1890 au moment où le théâtre wallon à Liège, sous l'influence d'Édouard Remouchamps, entrait dans son âge d'or. On lui doit une trentaine de pièces (certaines en collaboration avec son frère Auguste) qui valent par une observation savoureuse des mœurs et la vivacité du dialogue et qui contribuèrent à fixer un type de comédie vériste dont la vogue ne s'arrêta qu'à la veille de la Seconde Guerre mondiale.

Déon (Michel)

Écrivain français (Paris 1919).

Formé à l'école de l'Action française (dont il fut secrétaire de 1942 à 1944), il se sent en exil dans un monde où l'accord entre le ciel et la terre est rien moins qu'évident. Aux côtés de R. Nimier, de A. Blondin et de J. Laurent, il est l'un des « hussards » de la scène parisienne, mais se réfugie volontiers là où il croit retrouver la « pureté » d'antan : le Maroc, le Portugal et surtout la Grèce et l'Irlande (le Balcon de Spetsaï, 1961 ; le Rendez-vous de Patmos, 1965). Cette nostalgie aristocratique qui imprègne ses nouvelles (Un parfum de jasmin, 1967) et ses romans (les Poneys sauvages, 1970 ; Un taxi mauve, 1973 ; le Jeune Homme vert, 1975) a trouvé une résonance dans le grand public, phénomène que mettent en perspective des récits (Un déjeuner de soleil, 1981 ; Je vous écris d'Italie..., 1984 ; le Prix de l'amour, 1992) où l'imaginaire côtoie les références autobiographiques.

Depauw (Valère)

Écrivain belge d'expression néerlandaise (Ronse ou Renaix 1912).

Ses récits unissent une verve humoristique (Tavi, 1937) à l'intérêt pour toutes les luttes d'émancipation nationales ou culturelles (Une poignée de terre, 1959 ; Breiz Atao, 1963 ; Sur le chemin de Montségur, 1976) dans une perspective proche du « réalisme magique » (Tantôt gai, tantôt triste, 1981 ; Libre de tous soucis, 1984).

Depestre (René)

Écrivain haïtien (Jacmel 1926).

Jeune poète révolutionnaire, communiste et anticolonialiste, il fut lié à la revue Présence africaine. Après des études à Paris, il séjourna en Tchécoslovaquie et à Cuba où, militant à la fois officiel et contestataire, il écrivit la plus grande partie de son œuvre. Revenu à Paris en tant que secrétaire de l'Unesco, il prit sa retraite en France. Il a fréquenté les intellectuels et des créateurs d'Afrique et d'Amérique du Sud, les écrivains progressistes français, les leaders révolutionnaires d'Asie. Sa période d'engagement internationaliste marxiste a été marquée par dix recueils poétiques antiracistes dont Minerai noir (1956), Un arc-en-ciel pour l'Occident chrétien (1967), d'inspiration vaudou, ainsi que par des essais (Bonjour et Adieu à la négritude, 1980). Ont suivi, ancrés dans l'haïtianité et l'érotisme, Alleluia pour une femme-jardin (nouvelles, 1973), et deux romans : le Mât de Cocagne (1979) et Hadriana dans tous mes rêves (1988). Les textes les plus récents, comme Eros dans un train chinois (1990), témoignent de l'abandon des options communistes et de la déterritorialisation de l'imaginaire.

Der Nister (Pinkhes Kaganovitch, dit)

Écrivain de langue yiddish (Berditchev, Ukraine, 1884 – en Sibérie 1950).

À partir de 1907 il publie des poèmes et des textes en prose à la tonalité mystique. À Kiev, où il vit après la révolution d'Octobre, paraissent ses Contes en vers pour enfants (1918). Installé à Berlin en 1921, il publie deux volumes (1922-23) de nouvelles d'inspiration symboliste. Rentré en Union soviétique en 1926, il voit son œuvre critiquée au nom du réalisme socialiste. Il se spécialise alors dans le reportage, mais entreprend cependant un grand roman, la Famille Machber (1939-1942). Arrêté sous accusation d'antisoviétisme, il meurt dans un camp de Sibérie.