Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
B

Bloy (Léon)

Écrivain français (Périgueux 1846 - Bourg-la-Reine 1917).

À 18 ans, il troque un socialisme fanatique contre un catholicisme flamboyant sous l'influence de Barbey d'Aurevilly, qui lui fait découvrir Joseph de Maistre et le fixe définitivement « comme une chouette pieuse à la porte rayonnante de l'Église de Jésus-Christ ». Après la guerre de 1870 , il entame une carrière de journaliste et d'écrivain : « Je pouvais devenir un saint, un thaumaturge. Je suis devenu un homme de lettres. » En 1884 paraissent le Révélateur du Globe, apologie de Christophe Colomb, et les Propos d'un entrepreneur de démolitions, satire contre les écrivains contemporains, puis, en 1886, un premier roman, le Désespéré (1886), en grande partie autobiographique, qui évoque le dur cheminement d'une immolation mystique et met à nu le déchirement perpétuel d'une conscience qui exhibe rageusement ses plaies. La même révolte se retrouve dans les deux recueils de nouvelles qu'il publie en 1893, Sueur de sang et Histoires désobligeantes. Le premier fournit une vision hallucinée et étonnamment puissante de la guerre de 1870, le second poursuit la tradition des contes cruels en la poussant à son paroxysme. Ces textes très courts sont peut-être ceux où se manifestent le plus clairement les qualités d'une écriture qui privilégie l'humour noir et ne recule devant aucun excès (allusions énigmatiques, métaphores « assommantes » selon les propres mots de Bloy, goût archaïsant des étymologies, lexique d'une incroyable variété, polyphonie continue). La Femme pauvre reprend en 1897 la veine romanesque tandis que s'accumulent les ouvrages pseudo-historiques (la Chevalière de la mort, 1891 ; le Fils de Louis XVI, 1900 ; l'Âme de Napoléon, 1912 ; Jeanne d'Arc et l'Allemagne, 1914) et les écrits plus directement mystiques, dont le plus connu reste le Salut par les Juifs (1892). Publié à partir de 1904, le Journal montre le tourment incessant d'un homme qui s'attribue « le droit et le devoir d'être un incendiaire » ou de prodiguer « dix mille claques par jour » et dont Verlaine a pu dire : « La raison jusqu'à la démence, telle est la foi de Léon Bloy. » Interprétant les faits à travers quelques rapprochements fulgurants, avide de faire l'Exégèse des lieux communs (1902-1913), Bloy sonde interminablement l'histoire en la ramenant au postulat d'une Providence toute-puissante et, multipliant les invectives, ne cesse de s'insurger contre le positivisme de son époque. L'œuvre, apocalyptique et prophétique, est ainsi à l'image de ce feu dévorateur où l'écrivain discerne en lui la marque de Dieu.

Blubo-Literatur (de Blubo = Blut und Boden : « le sang et le sol »)

Sous le IIIe Reich, c'est le nom donné à la littérature paysanne. Il ne s'agit plus de l'évocation réaliste ou poétique d'un mode de vie, mais d'une vision mythique : le paysan devient le symbole de l'homme allemand qui doit être vigilant pour garder et transmettre les vertus de la race. Le village est l'image de la société que le nazisme veut instaurer. Souvent médiocre, cette littérature a connu de gros tirages. Elle servait à légitimer et à propager la politique nataliste, raciste et expansionniste du nazisme – rejoignant ainsi la littérature de la « renaissance nordique » ou le thème de « l'espace vital ». Parmi les auteurs, on peut citer Friedrich Griese, Josefa Berens-Totenohl, Hermann Eris Busse, Karl-Heinrich Waggerl, et y rattacher des écrivains catholiques (J. Kneip) ou mystiques (H. Stehr). Malgré certaines analogies, on hésite à en rapprocher Ernest Wiechert, dont l'œuvre procède d'un esprit différent.

blues

Ce chant syncopé, issu des chants de travail des plantations de coton, doit son nom au terme argotique qui désigne la dépression. Il apparaît à la fin du XIXe siècle chez les Noirs américains. W. C. Handy a donné ses lettres de noblesse à ce genre musical en composant les Memphis Blues (1909) et les Saint Louis Blues (1914). De la structure harmonique et mélodique du blues devait sortir le jazz. La tonalité du blues marque la littérature américaine du XXe siècle, particulièrement les écrivains de la Beat Generation et Kerouac dans ses Mexico City blues (1959) : la musique et le rythme ouvrent sur l'improvisation verbale. Chez les écrivains noirs (Langston Hughes), la reprise du blues permet d'exprimer directement la réalité sociale de la masse. L'usage littéraire du blues traduit toujours, même chez l'écrivain blanc, le refus d'idéaliser l'identité ethnique ou culturelle et la volonté de revenir aux mots bruts.

Bly (Robert)

Poète américain (Madison, Minnesota, 1926).

Sous l'influence de Blake et de Whitman, il est à l'origine du mouvement « Deep Image ». Il promeut une poésie qui touche à l'inconscient par des images librement associées à partir de la symbolique des quatre éléments et par un jeu sur l'espace. Son œuvre est quête d'une réalité profonde, vitale et archétypale (la Lumière autour du corps, 1967 ; Silence sur champ de neige, 1962 ; Poèmes de Point Reyes, 1974 ; Coutumes d'un homme en manteau noir, 1981). Il a traduit Antonio Machado (Seul un moment, 1983).

Boaistuau (Pierre, sieur de Launay)

Écrivain français (Nantes 1517-Paris 1566).

Premier éditeur (1558) des nouvelles de Marguerite de Navarre, il traduisit les Histoires tragiques de Bandello et obtint, avec ses Histoires prodigieuses (1560), un succès immense qui justifia les suites données à son œuvre par Tesserant (1567) et Belleforest (1575).

Boal (Augusto Pinto)

Auteur dramatique brésilien (Rio de Janeiro 1931).

Son œuvre se veut un théâtre de « politicothérapie » (Théâtre de l'opprimé, 1977), marqué par les techniques de l'agit-prop (Stop ! C'est magique, 1980).

Bobadilla (Emilio) , connu sous le pseudonyme de Fray Candil

Écrivain cubain (Cárdenas 1862 – Biarritz 1921).

Il dirigea la revue Habana Cómica (1884), puis partit pour l'Europe et publia des romans naturalistes (Romans en germe, 1901 ; À feu doux, 1903 ; Dans la nuit endormis, 1920). Ses attaques violentes contre le modernisme (il qualifia Rubén Darío de « paltoquet prétentieux ») lui valurent des répliques cinglantes. Fray Candil pratiqua une critique agressive et souvent négative (Moutarde, 1885 ; Escarmouches, 1888 ; Moues, 1908).