Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
E

État providence

L'État providence recouvre l'ensemble des systèmes d'assurance collective obligatoire destinés à couvrir les citoyens contre un certain nombre de risques, comme la vieillesse, la maladie et le chômage. L'État providence peut largement dépasser ces domaines pour s'étendre, par exemple, au logement ou aux études. Parce qu'elle est obligatoire, l'assurance collective implique une redistribution, de ceux qui se portent bien vers les malades, des jeunes vers les personnes âgées, des travailleurs vers les chômeurs.

C'est en France, sous la Révolution, que naît un projet d'État providence. L'article 21 de la Déclaration des droits de l'homme rappelle d'ailleurs que « les secours publics sont une dette sacrée. La société doit la subsistance aux citoyens malheureux, soit en leur procurant du travail, soit en assurant les moyens d'exister à ceux qui sont hors d'état de travailler ». Mais il faut attendre la fin du xixe siècle pour trouver un début de réalisation concrète de ce que sera l'État providence. À cette époque s'élabore en Europe cette conception nouvelle de l'intérêt public, qui intègre de manière très large les droits sociaux des citoyens. L'indigence, le paupérisme, l'insécurité ouvrière, les accidents du travail sont alors autant de maux auxquels les dispositifs existants (œuvres patronales ou ouvrières, mutualisme, etc.) n'arrivent pas à parer. Partout, en France, en Angleterre, en Allemagne, mais aussi aux États-Unis ou en Australie, se dessinent les premiers traits d'une protection sociale, dont les caractéristiques varient fortement d'un pays à l'autre. Les débats sont souvent violents, les opposants, nombreux. Mais, petit à petit, l'État providence s'impose : l'État doit s'occuper également du bien-être social des citoyens, et non plus seulement de la police, de battre monnaie, ou de gérer ses relations internationales et de faire la guerre.

De l'âge d'or à la remise en cause

Après la Seconde Guerre mondiale, le consensus sur la protection sociale s'élargit. Sous l'empire du keynésianisme, les politiques sociales sont de mieux en mieux intégrées aux politiques économiques. Dans tous les pays européens, la Sécurité sociale se généralise. La protection sociale, qui, avant la guerre, était orientée vers des groupes ciblés (les indigents, les ouvriers en dessous d'un certain niveau de revenus...), s'étend à toutes les couches de la population. Une révolution qui doit beaucoup à William Beveridge : cet économiste britannique préconise dès le début des années 1940 un système de protection sociale généralisé, unifié et centralisé sous l'égide de l'État. Il recommande également la création d'un système de santé gratuit et ouvert à tous.

Les années 1980 marquent la fin de l'âge d'or de l'État providence. L'augmentation des dépenses publiques et la montée de la précarité ébranlent sa légitimité. L'ensemble des pays européens, qui restent très attachés à leurs systèmes de protection sociale, cherchent aujourd'hui à réformer leur État providence

V. M.

➙ Déficits sociaux, État, Sécurité sociale, Les inégalités vont-elles s'aggraver ?

États-Unis

Première puissance mondiale, les États-Unis d'Amérique n'étaient encore à la fin du xviiie siècle qu'un ensemble de colonies anglaises venant d'acquérir leur indépendance. Au xixe siècle, leur essor fut rendu possible par la conquête territoriale et grâce au développement du capitalisme industriel intégrant les techniques de production les plus modernes. Au début du xxe siècle, ils dépassaient les nations européennes dans tous les domaines, et en particulier dans la production des biens nouveaux (comme l'automobile). Ces résultats s'expliquent principalement par la taille du marché intérieur, la richesse des ressources naturelles et par le dynamisme de la population.

À l'aube du xxie siècle, le « modèle américain » semble hégémonique et sert de référence dans le monde, après l'échec des expériences d'économie dirigée et en raison de sa croissance retrouvée, associée à un quasi-plein-emploi. Mais cette prospérité ne doit pas faire oublier l'importance de la pauvreté et de la précarité, ni que les États-Unis connaissent un déficit extérieur considérable qui ne peut être toléré que parce que le dollar est accepté partout dans le monde comme monnaie de réserve et de transaction. L'émergence de l'euro peut remettre en cause ce privilège et changer au xxie siècle les relations entre les États-Unis et le reste du monde.

La naissance des États-Unis

Au cours du xviie siècle, des immigrants anglais fondèrent le long de la côte est de l'Amérique du Nord les colonies de la « Nouvelle-Angleterre ». Un siècle plus tard, treize colonies étaient soumises à l'autorité anglaise et astreintes au pacte colonial leur interdisant tout commerce avec des pays tiers. Leur activité était essentiellement agricole, car la métropole imposait l'importation de ses produits industriels.

Après un soulèvement général en 1775 et la proclamation de l'indépendance (Philadelphie, 4 juillet 1776), la guerre entre les colonies américaines et la métropole anglaise se poursuivit jusqu'à ce que celle-ci reconnaisse l'indépendance des États-Unis par le traité de Paris (septembre 1783).

La conquête de l'Ouest et la guerre civile

Durant les trois premiers quarts du xixe siècle, les États-Unis étendirent leur mainmise sur les terres de l'Ouest : ils achetèrent la Louisiane à la France (1803), s'emparèrent de la Floride espagnole (1819) et obligèrent le Mexique à leur céder le Texas, la Californie et d'autres territoires de l'Ouest après leur victoire militaire de 1846 ; ils mirent aussi la main sur les terres britanniques du Nord-Ouest (1846). Vers le milieu du siècle, ce territoire était loin d'être unifié. Le Centre et l'Ouest restaient surtout peuplés d'Indiens et de quelques colons aventuriers. Le Nord-Est connaissait un essor industriel important et fabriquait des produits textiles, des matériaux de construction et du matériel de transport, permettant la mise en place d'un réseau de voies ferrées dense dans le quart nord-est du pays (50 000 km en 1860). Les quinze États du Sud-Est étaient par contre essentiellement agricoles : ils produisaient du coton, du tabac et du riz, et ils utilisaient dans leurs plantations 4 millions d'esclaves noirs. Cependant, les grands propriétaires ne représentaient qu'une petite partie des 8 millions de Blancs ; le reste de la population était constitué de petits planteurs, de commerçants, d'habitants des villes...).