Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
C

Capitalisme (suite)

Le capitalisme du xxe siècle (surtout après 1945) fut donc régulé par l'État, qui chercha à faire prévaloir l'intérêt général à long terme et à concilier les intérêts des capitalistes et ceux des salariés, lesquels bénéficièrent d'une élévation importante de leur niveau de vie, en particulier durant les Trente Glorieuses.

Les trois esprits capitalistes

Dans leur ouvrage le Nouvel Esprit du capitalisme (1999), Ève Chiapello et Luc Boltanski estiment que le capitalisme a connu trois formes d'esprit :

• la première, qui remonte au xixe siècle, se fonde sur la volonté d'entreprendre, les découvertes scientifiques et les inventions. C'est la morale du bourgeois entrepreneur, avec sa morale du patrimoine, de la famille, de l'épargne et d'une gestion paternaliste du personnel ;

• la deuxième remonte aux années 1930 et accompagne l'apparition de la grande entreprise. C'est l'esprit de la technostructure, qui se caractérise par une gestion sociale du personnel (carrière à vie, avantages sociaux divers), elle-même concomitante d'un développement de l'État providence ;

• la troisième apparaît avec les années 1990 : c'est la morale du « chef de projet », qui coordonne des unités de travail et de production destinées à une existence courte. Cette nouvelle phase correspond à la flexibilité croissante du travail et à l'accélération des processus d'innovation.

Vers un nouveau capitalisme ?

Mais, à la fin du xxe siècle, la mondialisation et la montée du libéralisme, qui se traduisent par l'ouverture des frontières et la constitution de grandes zones de libre-échange (Union économique européenne, ALENA, OMC...), remettent en cause ce type de capitalisme national. Il semble que se constitue un nouveau capitalisme où la recherche du profit élevé à court terme, permis par la constitution de grands groupes financiers à vocation mondialiste et par le déplacement incessant des capitaux, se substitue à des stratégies industrielles qui visaient davantage le long terme et participaient à des politiques de développement nationales.

Les contours précis de ce nouveau capitalisme sont encore difficiles à saisir : certains parlent de « nou-velle économie », en insistant sur le rôle entraînant des nouvelles technologies (électronique, automatisation…), sur une nouvelle capacité d'adaptation des entreprises et des salariés, et sur le rôle central des marchés financiers ; d'autres s'inquiètent de la « déréglementation » et du récul de l'État providence, et s'attendent au retour d'une crise de grande ampleur

P. B.

➙ Accumulation, Bourse, capital, entreprise, Marx (K.), mondialisation, nouvelle économie, plus-value

Capital-risque

Fonds investis en capital dans une entreprise innovante, qui représentent un placement risqué, mais laissent espérer une forte rentabilité en cas de succès.

Cet argent provient de tous types d'investisseurs, qui le placent en direct ou le confient à des sociétés spécialisées. Ces sociétés, dites « de capital-risque », lèvent des fonds, sélectionnent les projets dans lesquels elles vont prendre des participations et aident les jeunes sociétés à se développer avec le maximum de chances de succès. Les sociétés de capital-risque sont souvent représentées au conseil d'administration des firmes dans lesquelles elles investissent.

Les gestionnaires de capital-risque doivent bien connaître les secteurs sur lesquels ils misent, ce qui explique que les fonds soient souvent spécialisés : dans les biotechnologies, l'informatique ou le multimédia, par exemple.

Le capital-risque a démarré dans les années 1970 aux États-Unis, où il a joué un rôle majeur pour la création de firmes de nouvelles technologies. Il a émergé en France dix ans plus tard, mais a essuyé une grave crise au début des années 1990, avant de repartir à la hausse en 1996. Différentes mesures fiscales favorisant l'investissement dans des sociétés innovantes et la création du Nouveau Marché accélèrent le mouvement. Selon le ministère de l'Économie et des Finances, 3 milliards de francs (0,5 milliard d'euros) auront été investis en capital-risque en France en 1999.

Une société de capital-risque se désengage au bout de quelques années, soit en vendant ses parts à un autre investisseur, telle une entreprise de capital-développement (qui a pour mission d'entrer dans le capital de firmes plus matures), soit en mettant sa participation sur le marché à l'occasion d'une première entrée en Bourse

A. K.

➙ Start-up

Capitaux propres

Capitaux investis par les propriétaires d'une entreprise (porteurs de parts d'une société), donnant droit au pouvoir de diriger et à une rémunération en fonction du résultat, mais impliquant une prise de risque à long terme.

Cette définition trouve un reflet dans la structure du bilan des entreprises puisqu'au passif il est classique d'« opposer » les capitaux propres investis par les propriétaires aux dettes investies par les prêteurs ou créanciers.

Il est d'usage de distinguer au sein des capitaux propres, d'une part, le capital qu'on qualifie de mise « externe » correspondant à un sacrifice des propriétaires (qui prélèvent sur leurs fonds personnels soit lors de la création d'une entreprise, soit postérieurement, lors d'une augmentation de capital) et, d'autre part, les réserves et le résultat de l'exercice qui apparaissent suite à la vente des marchandises.

En droit, les titulaires de ces capitaux assument collectivement la gestion de l'entreprise ; ils sont les seuls à pouvoir le faire, contrairement aux prêteurs, qui ne participent pas aux organes de décision légaux.

Ces capitaux sont les seuls à supporter le risque de l'entreprise. En principe, en cas de difficulté de l'entreprise, les créanciers (y compris le personnel) doivent être payés d'abord et c'est seulement s'il reste un solde que les propriétaires peuvent récupérer leur mise.

Ce risque justifie, du point de vue de la logique capitaliste, le droit à une rémunération variable et sans limite des détenteurs de ces capitaux. L'expérience des faillites montre cependant que le risque est largement partagé par les créanciers et les salariés

J. R.

➙ Capital, fonds propres