Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
E

Économie industrielle

Branche de l'analyse économique traitant des relations entre les marchés et les entreprises.

Appelée industrial organization dans les pays anglo-saxons, l'économie industrielle s'est attachée depuis les années 1930 à analyser les relations entre le degré de concentration des marchés et la rentabilité des entreprises. Ces relations constituent le cœur du débat qui oppose les « comporte-mentalistes » (école de Chicago), attribuant la rentabilité élevée des entreprises à leur plus grande efficacité, et les « structuralistes » (partisans de la législation anti-trust), imputant cette rentabilité à une organisation anticoncurrentielle du marché. En Europe continentale, l'économie industrielle a été surtout associée à la justification de politiques soutenant le développement de « champions nationaux » (entreprises phares dans un domaine d'excellence du pays concerné et soutenues par l'État).

Depuis les années 1970, l'économie industrielle a été enrichie par l'étude des fondements de l'existence des entreprises à la suite des travaux de Ronald Coase, prix Nobel d'économie. Il s'agit d'expliquer pourquoi il existe des organisations au sein desquelles les relations sont régies par l'autorité et non par les prix, alors que, selon la théorie libérale, les mécanismes de marché sont réputés les plus efficaces. Il s'avère que les mécanismes de coordination régis par l'autorité ont une efficacité supérieure dans un certain nombre de situations (coûts de transaction, information imparfaite, incertitude...)

A. R.

➙ Industrie, politique industrielle, jeux, trust

Économie mixte

Système économique constitué d'un secteur privé et d'un secteur public, et dont le fonctionnement est régulé conjointement par le marché et par les décisions de l'État.

Garant de l'intérêt collectif, l'État encadre et corrige le libre jeu des forces du marché, respectueux des libertés individuelles. Dans un tel système, si la libre concurrence peut régler au mieux la plupart des problèmes de coordination des activités individuelles par la flexibilité des prix, il n'en demeure pas moins des domaines pour lesquels le marché est défaillant, nécessitant leur prise en charge par l'État.

Plusieurs courants de pensée ont encouragé le développement de l'économie mixte au xxe siècle, jusqu'à sa remise en cause suscitée par les néolibéraux, sur fond de crise des finances publiques, surtout après la fin des Trente Glorieuses.

L'économie du bien-être, issue du courant néoclassique, a isolé trois problèmes non résolus par l'initiative individuelle : les biens collectifs, les effets externes (les nuisances à autrui comme la pollution), les monopoles fondés sur des réseaux. Il en résulte une première fonction dévolue à l'État, dite d'allocation des ressources. Se substituant au marché, l'État doit affecter des ressources à la fourniture de services publics et de biens spécifiques (équipements collectifs, transport ferroviaire, eau, gaz, électricité), d'où le développement d'une sphère économique publique.

Ce courant a aussi justifié la prise en charge par l'État, à travers une fonction de redistribution des revenus et des patrimoines, de la question de la justice sociale, que le marché ne peut régler tout seul. Lui correspond le développement de l'État providence comme grand assureur social faisant jouer le principe de solidarité.

L'approche keynésienne a mis l'accent sur le chômage comme défaillance majeure de la régulation par le marché, dont la résorption ne peut venir que de l'État. D'où une troisième fonction qui est attribuée à ce dernier, celle de régulation du niveau d'activité et d'emploi visant à maîtriser les déséquilibres conjoncturels

P. L.

➙ Chicago, inégalités, (J. M.) Keynes, keynésianisme, non marchand, politique économique, prélèvements obligatoires, protection sociale, Trente Glorieuses

Économie sociale

Ni secteur public ni secteur privé, l'économie sociale rassemble différentes activités organisées selon un mode de propriété collectif, mutualiste ou coopératif.

Ce concept typiquement français, popularisé par Michel Rocard dans les années 1970, regroupe le secteur mutualiste – les mutuelles de santé, les assurances mutuelles et les banques mutuelles ou coopératives –, mais également le mouvement coopératif, lui-même subdivisé en coopératives de consommateurs, coopératives d'achat et coopératives de production. S'y ajoutent enfin les associations.

Hétéroclites, les différentes composantes de l'économie sociale présentent néanmoins des points communs. Qu'elles interviennent ou non dans le marché, elles reposent toutes sur des règles de fonctionnement démocratique, chaque membre possédant un droit de vote (« un homme, une voix »). Le bien y est collectif, « impartageable », et les adhérents ne sont pas des actionnaires

A. L.

➙ Mutualiste

Économies socialistes

Les économies socialistes répondent à sept critères : la propriété étatique des entreprises industrielles et des banques ; une agriculture collective, intégrée dans des fermes d'État et des coopératives ; la planification impérative de l'économie ; une stratégie de développement donnant la priorité à l'industrie lourde ; la volonté autarcique de limiter le commerce extérieur ; l'interdiction des investissements étrangers sur le territoire national ; le monopole d'un parti unique au pouvoir, d'inspiration marxiste-léniniste ou socialiste, contrôlant l'appareil d'État.

La première économie socialiste se forme en URSS en 1917. Ses traits s'affirment à partir de 1928 avec le premier plan quinquennal, la collectivisation forcée de l'agriculture, engagée par Staline contre la paysannerie, l'industrialisation accélérée des branches fabriquant des biens de production, le monopole de l'État sur le commerce extérieur (interdit à tout autre agent économique) et la dictature du parti unique. Cette expérience s'étend aux pays de l'Europe de l'Est en 1945 et, avec des nuances, en Yougoslavie, en Chine (1949), puis dans une quinzaine de pays du tiers-monde lors de leur indépendance. En 1980, on comptait vingt-huit économies socialistes dans le monde.