Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
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Crise économique (suite)

Elle présente les caractéristiques des petites crises du xixe siècle (baisse de l'activité et de l'emploi, des prix et des revenus). Mais elle fut plus profonde, plus longue (la production de 1929 ne sera retrouvé que dix ans plus tard), et elle s'étendit à tous les secteurs d'activité et à tous les pays.

Elle débuta le 24 octobre, à la Bourse new-yorkaise de Wall Street, par des ventes massives de titres, qui se prolongèrent durant les jours suivants (30 millions de titres furent vendus en une semaine). Le mouvement se poursuivit pendant les mois suivants et les titres cotés avaient perdu environ 50 % de leur valeur à la fin de l'année. La baisse se poursuivit jusqu'en 1932. Ces pertes boursières diminuèrent le patrimoine et les revenus attendus de millions d'Américains de toute condition. Ceux qui s'étaient endettés pour acheter des actions ne purent rembourser leur dette, et de nombreuses banques firent faillite, entraînant une contraction du crédit. La demande globale diminua donc sensiblement, obligeant les entreprises à baisser leurs prix pour tenter de vendre leurs produits : les prix de gros baissèrent de moitié entre 1929 et 1932.

Cela provoqua une baisse des profits des entreprises, qui réduisirent leurs investissements et leurs effectifs. Ce faisant, la diminution des revenus, de la demande globale, des prix et de l'activité s'amplifia : le chômage toucha environ 12,8 millions d'Américains en 1933, soit 25 % de la population active, et la production industrielle diminua d'environ 20 % entre 1929 et 1932.

Les autres pays furent également touchés par la crise, en raison du rapatriement des capitaux américains placés à l'étranger et de la contraction des échanges internationaux : entre 1929 et 1932, la production industrielle baissa d'environ 16 % en Allemagne, 10 % en France, 6,5 % en Grande-Bretagne... Les pays du tiers-monde furent encore plus gravement affectés par la dépression, car la baisse des prix des matières premières (de l'ordre de 50 %) fut plus forte que celle des produits industriels.

La crise eut des conséquences considérables sur les sociétés occidentales. Elle explique la montée du militarisme allemand et japonais, qui conduisit à la Seconde Guerre mondiale, et elle entraîna une intervention plus directe de l'État dans l'économie : politiques de grands travaux (New Deal aux États-Unis), développement des droits protégeant les salariés, politiques monétaires et de changes plus actives, devenant systématiques après la guerre.

La crise des années 1970-1980 : elle conduit paradoxalement au recul de l'État providence

À la suite des chocs pétroliers de 1974 et de 1979 (doublement, puis quadruplement du prix du pétrole) se produisit une rupture avec la période des Trente Glorieuses.

Certes, l'économie mondiale ne connut ni effondrement de l'activité ni baisse des prix. Mais, après la récession de 1975, elle entra dans une phase de stagflation (forte hausse des prix associée à une faible croissance) qui surprit les responsables économiques dans la mesure où l'on pensait jusque-là que l'inflation ne se produisait qu'en cas de forte croissance et de plein-emploi. Durant les années 1980, la désinflation s'amorça, mais la croissance resta faible (2 à 3 % de taux de croissance annuelle, contre 5 % durant les Trente Glorieuses), et le chômage progressa pour dépasser les 10 % de la population active dans la plupart des pays développés. De plus, ceux-ci connurent un déficit important de leur commerce extérieur (sauf l'Allemagne et le Japon), et un accroissement substantiel du déficit des finances publiques (les différents États tentant de soutenir une activité trop faible par de fortes dépenses publiques). La crise résida dans le fait que les mécanismes de la croissance économique ne fonctionnaient plus comme auparavant : la hausse des salaires ne poussait plus les entreprises à produire davantage car la concurrence mondiale se faisait plus vive et la demande se tournait vers les produits importés. Les gains de productivité, qui jusque-là permettaient d'amortir la hausse des salaires, devenaient insuffisants et conduisaient à réduire l'emploi. Les politiques de relance appliquant les idées de J. M. Keynes s'avéraient inefficaces.

Cela conduisit les gouvernants à changer de politique économique et à restaurer les mécanismes du marché : baisse des prélèvements fiscaux et des dépenses publiques aux États-Unis et en Grande-Bretagne, privatisation en France, dispositions libérales du traité de Maastricht en Europe (indépendance des autorités monétaires, normes de réduction des déficits publics...). Ainsi, cette crise aboutit à l'effet inverse de celle de 1929.

La crise financière de 1987

E n octobre 1987 se produisit un krach boursier qui fit craindre le retour de la crise de 1929 : après une hausse de 40 % entre janvier et début octobre, l'indice Dow Jones (représentant la valeur moyenne des titres cotés à Wall Street), baissa à partir du 14 octobre et chuta de plus de 22 % le 19 octobre, pour revenir à la fin de l'année à son niveau de janvier.

Ce serait l'annonce du déficit commercial américain, le 14 octobre, faisant craindre une baisse du dollar et une hausse des taux d'intérêt, qui aurait provoqué la vente des titres. Celle-ci fut accélérée par des ordres de vente automatiques programmés sur ordinateur quand les actions baissent en dessous d'un certain seuil.

Cette crise toucha également les autres grandes places financières du monde : plus de 34 % de baisse à Paris entre le 19 octobre et le 10 novembre, baisse de 33 % à Hongkong, de 26 % à Francfort, de 40 % à Londres...

Mais, à la différence de 1929, cette crise resta cantonnée au marché boursier et la confiance revint au début de l'année suivante, les agents ne croyant pas à l'existence d'une crise durable. Les pertes enregistrées durant ce dernier trimestre 1987 n'eurent finalement comme effet que de compenser les fortes hausses des mois précédents.

Les défenseurs de l'économie de marché y virent la confirmation de l'existence de mécanismes de correction automatique des cours : une baisse des prix succède nécessairement à une hausse injustifiée, et une remontée suit obligatoirement une baisse excessive.