Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
M

Marx (Karl) (suite)

Il influença considérablement le mouvement socialiste européen (allemand, français et russe, en particulier) et participa en 1864 à la création de l'Association internationale des travailleurs (Ire Interna-tionale). Mais le marxisme ne se développa vraiment qu'avec la création du Parti social-démocrate allemand (1875), avec celle de la IIe Internationale ouvrière (à Paris, en 1889), avec le rôle joué en France par Jules Guesde à la fin du siècle et surtout avec le prolongement de la pensée économique et politique de Marx par Lénine en Russie.

Les principaux ouvrages économiques de Marx, écrits en collaboration avec Friedrich Engels qui l'aida financièrement, sont : Contribution à la critique de l'économie politique (1859), Salaires, prix et profits (1865), et surtout le Capital (1867 pour le livre I, 1885 et 1894 pour les livres II et III, publiés par Engels après la mort de Marx).

P. B.

➙ Classe sociale, impérialisme, marxisme

Marxisme

Théorie élaborée par Karl Marx, analysant la nature et les contradictions du capitalisme.

Les principales origines du marxisme sont la philosophie allemande (celle de Hegel en particulier), la pensée socialiste française (Cabet, Fourier, Proudhon, Louis Blanc...) et l'économie politique anglaise (Smith, Ricardo...) : la première amena Marx à envisager le capitalisme dans son histoire et à en étudier les forces antagonistes ; la deuxième le sensibilisa à la misère ouvrière, attribuée à la propriété privée des moyens de production ; la troisième l'initia à la théorie économique de la valeur, des prix et des revenus.

Selon Marx, le capitalisme connaît une opposition irréductible entre deux classes : la bourgeoisie, propriétaire des usines, et le prolétariat, ne possédant que sa seule « force de travail », dont l'utilisation est la cause unique de la valeur des marchandises. La bourgeoisie « exploite » le prolétariat en lui extorquant une « plus-value », qui rémunère les propriétaires du « capital ». En effet, selon Marx, les capitalistes versent à leurs ouvriers un salaire qui leur permet juste de « reproduire » leur force de travail (c'est-à-dire acheter de quoi se nourrir, se vêtir, se loger...), salaire inférieur à la valeur des marchandises qu'ils produisent.

Marx pense que le capitalisme est miné par plusieurs contradictions.

• Il considère que l'accumulation du capital s'accompagne d'une augmentation de la part des machines par rapport à celle du travail (afin d'accroître la productivité) ; mais, comme la plus-value ne provient que du seul usage de la force de travail, le taux de profit rémunérant le capital (rapport entre la plus-value et le capital engagé) tend à diminuer. Ce processus peut être freiné par la baisse des salaires (mais ils ne peuvent être inférieurs au niveau de subsistance) ou par des gains de productivité (mais ceux-ci provoquent aussi la baisse de la valeur des marchandises produites, puisqu'elles nécessitent moins de temps de travail).

Cette « loi de la baisse tendancielle du taux de profit » condamne à terme le capitalisme, car les entrepreneurs finiront par ne plus investir si le taux de profit devient trop faible, ou ils chercheront à réduire encore les salaires et provoqueront un soulèvement ouvrier.

• Une autre contradiction menace le capitalisme. Elle provient de l'écart croissant entre la valeur totale des marchandises produites et l'ensemble des salaires distribués.

Marqué par cette double contradiction, le capitalisme ne peut, pour les marxistes, que traverser des crises de plus en plus violentes, dont la classe ouvrière supporte l'essentiel des effets, à travers la hausse du chômage et l'instabilité de ses revenus. Cela devrait conduire à la remise en cause du système et à son remplacement par une société sans classes, où l'essentiel des moyens de production et d'échange aurait été collectivisé.

P. B.

➙ Capitalisme, classe sociale, économies socialistes, plus-value, profit

Massé (Pierre)

Haut fonctionnaire français (né en 1898), auteur de travaux théoriques en économie et l'un des principaux initiateurs de la politique française de planification après la Seconde Guerre mondiale.

Ingénieur de formation, il a publié des travaux d'analyse économique sur la gestion optimale des ressources face à un avenir aléatoire, préoccupation que l'on retrouve dans la planification française à laquelle il a considérablement collaboré, en particulier en tant que commissaire au Plan (1959-1966).

P. U.

➙ Planification

Mathématiques (et économie)

L'économie mathématique consiste à utiliser des outils mathématiques pour exprimer, pour étayer ou pour tester certaines idées économiques.

Certains outils mathématiques relèvent de la statistique. On quantifie les variables, on trace leurs évolutions sur des graphiques, on les analyse par des techniques statistiques. Petty mesura ainsi la population de l'Angleterre au xviie siècle ; des indices mensuels de prix furent établis dans ce pays depuis 1873 jusqu'à la généralisation de la comptabilité nationale, après la Seconde Guerre mondiale. En France, l'INSEE est depuis cette époque la principale source des données statistiques et de leur exploitation.

Le deuxième outil mathématique qu'on utilise en économie prend la forme de modèles sans chiffres. Il s'agit de représenter une partie de la réalité au moyen d'un nombre limité de variables et d'équations. On peut ainsi s'assurer de la cohérence de l'ensemble des idées qu'on a cherché à représenter ; on peut surtout démontrer certaines propositions que le raisonnement littéraire ne permettrait pas d'obtenir. Les principaux modèles de ce type furent obtenus par les Français Augustin Cournot et Léon Walras, respectivement en 1838 et 1874, et par le Franco-Américain Gérard Debreu en 1959.

Depuis 1945, l'économie mathématique est la forme dominante de la science économique. Presque tous les lauréats du prix Nobel d'économie, depuis sa création en 1969, sont des économistes-mathématiciens. Le plus souvent, ils ont utilisé les deux méthodes que nous avons citées, en bénéficiant des progrès de l'économétrie. Les modèles théoriques étaient donc estimés et testés à l'aide de données statistiques et, inversement, certaines études empiriques suggéraient des explications que des modèles théoriques se chargeaient de justifier.

F. E.

➙ Comptabilité nationale, (A. A.) Cournot, (G.) Debreu, économétrie, indice, INSEE, modèle, (L.) Walras