Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
I

Investissement (suite)

Les économistes se sont opposés sur la question des déterminants de l'investissement. Pour les « néo- classiques », l'investissement augmente tant que la productivité du capital (qui mesure ce que rapporte un investissement) est supérieure au taux d'intérêt (qui représente ce que coûte ce même investissement). Keynes introduit un élément supplémen- taire : pour que l'investissement s'accroisse, il faut que le taux de profit espéré (qui dépend lui-même des perspectives de vente prévues par les investisseurs, et qu'il appelle le « taux d'efficacité marginale du capital ») soit supérieur au taux d'intérêt. Pour les marxistes, l'investissement constitue l'utilisation obligatoire de l'épargne croissante des capitalistes : ils ne peuvent utiliser leur épargne autrement qu'en achetant des machines, et ouvrent ainsi des débouchés à ceux qui les fabriquent, ce qui permet le développement du système capitaliste

P. B.

IRPP (impôt sur le revenu des personnes physiques)

Impôt direct et progressif pesant sur le revenu des personnes disposant des ressources suffisantes pour être imposées.

L'impôt sur le revenu est le seul impôt en France, avec l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), à être progressif : son taux augmente avec les revenus, ce qui en fait un instrument fiscal redistributif. La moitié la moins aisée des Français y échappe. Les autres, selon leurs revenus, sont imposés à un taux qui varie entre 10,5 % et 54 % (par tranches progressives). Ces taux sont tempérés par les abattements successifs de 10 % et de 20 % pour les salariés et par le système de quotient familial pour les ménages avec enfants (les couples mariés sans enfant bénéficiant de deux parts). Au total, le taux moyen de l'impôt sur le revenu n'est pas plus lourd en France que dans les pays voisins, même si sa progressivité peut être plus forte. Il rapporte un peu plus de 300 milliards de francs par an.

L'impôt sur le revenu a été créé par la loi du 15 juillet 1914, après vingt ans de débats parlementaires orageux, opposant d'un côté les radicaux et les socialistes, favorables à cet impôt redistributif, et de l'autre les conservateurs, qui dressaient des tableaux apocalyptiques de ses effets. C'est Joseph Caillaux, radical et plusieurs fois ministre des Finances, qui en a dessiné les contours

V. M.

➙ Fiscalité, impôt

ISF (impôt de solidarité sur la fortune)

Impôt direct taxant le patrimoine des contribuables les plus fortunés.

En 2000, pour faire partie de ce club très fermé – un peu moins de 200 000 contribuables –, il faut détenir un actif net de plus de 4,73 millions de francs. Cet impôt, dont le taux est progressif, rapporte à l'État quelque 13 milliards de francs par an. L'Espagne, les Pays-Bas, la Suède, le Luxembourg et la Finlande sont également dotés d'un instrument fiscal du type ISF. Les États-Unis n'en ont jamais eu et l'Allemagne y a récemment renoncé.

L'ISF trouve ses racines dans les « 110 déclarations » de François Mitterrand, qui l'ont mené à la présidence de la République le 10 mai 1981. L'impôt sur les grandes fortunes (IGF) entre en application le 1er janvier 1982. En arrivant à Matignon en 1986, Jacques Chirac le supprime. Revenus au pouvoir, les socialistes instaurent, le 1er janvier 1989, l'ISF, présenté comme un instrument de solidarité nationale destiné à financer le tout nouveau revenu minimum d'insertion (RMI)

V. M.

➙ Fiscalité, impôt

Italie

Cinquième puissance économique du monde dans la dernière décennie du xxe siècle, l'Italie est aussi le pays où ont germé, au cours de l'histoire, les ingrédients essentiels du capitalisme moderne.

À partir du iie siècle av. J.-C., Rome étend progressivement son empire à toute la Méditerranée. Les réseaux de routes, les villes, l'organisation administrative, l'unité monétaire et fiscale, l'usage du latin et le droit romain structurent l'Europe. Après la chute de l'Empire, l'Église restaure en partie cette organisation, qui survivra par-delà les divisions politiques. Les villes italiennes, entre le xiie et le xve siècle, font naître l'économie moderne : les « Lombards » venus des centres marchands du nord de la péninsule diffusent dans toute l'Europe les nouvelles techniques financières – banque, taux d'intérêt, « capital-risque », comptabilité. Les Médicis de Florence sont des banquiers, la première famille régnante de l'histoire à asseoir son pouvoir non sur le lignage mais sur la fortune. Venise est au xive siècle la première « économie-monde », selon l'expression de l'historien Fernand Braudel ; elle domine la Méditerranée orientale, comme Gênes, patrie de Christophe Colomb, domine la Méditerranée occidentale.

À partir du xvie siècle, l'Italie, ravagée par les guerres, occupée par des dynasties étrangères, s'assoupit peu à peu et c'est en Europe du Nord qu'éclôt la révolution industrielle. L'occupation napoléonienne, en balayant provisoirement des aristocraties fourbues, ouvre la voie au réveil national qui, en 1860 aboutit à l'unité italienne, sous la houlette de l'État le plus éclairé de la péninsule, le Piémont. L'unité est parachevée avec la prise de Rome, en 1870. « L'Italie est faite, il faut maintenant faire les Italiens », constate Camillo Cavour, le bâtisseur de cette unité. Cent quarante ans plus tard, cette partie-là n'est toujours pas gagnée.

L'instauration de la coupure Nord-Sud

En 1861, seul 20 % du commerce était « intra-italien ». La suppression des droits de douane, l'instauration d'une monnaie et d'une fiscalité uniques portent un coup très dur au Sud agraire. Au lieu de progresser, le Mezzogiorno régresse dans les premières décennies de l'Italie. Le libre-échange en vigueur jusqu'en 1878 tue dans l'œuf les industries naissantes. Les années 1880 voient le pays s'orienter, sous l'influence des milieux industriels, vers une politique protectionniste qui portera ses fruits en termes de croissance et de modernisation (surtout au Nord). Mais le pays manque de capitaux nationaux et une crise financière, doublée d'une crise agricole, provoque une vague d'émigration exceptionnelle : 2,8 millions d'Italiens partent pour les Amériques entre 1891 et 1900, et le flux se poursuit, par centaines de milliers, jusqu'à la Première Guerre mondiale. Le capitalisme industriel prend son essor sur l'axe Gênes-Turin-Milan. Les grandes dynasties Agnelli (les automobiles Fiat), Pirelli (les pneus), Falck (la sidérurgie) et Olivetti (les machines à écrire) construisent alors leur fortune. Mais engagée en 1915 contre les empires centraux, l'Italie se coupe des capitaux germaniques. Ruinée, en proie au désordre, elle tourne le dos à la démocratie et, en 1922, tombe aux mains de Benito Mussolini.