Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
L

Levier (effet de) (suite)

Lorsque la rentabilité économique est supérieure au taux d'intérêt, il existe un effet de levier positif : plus l'endettement est important par rapport aux capitaux propres, plus le levier est élevé et plus la rentabilité financière est élevée. Inversement, si le taux d'intérêt sur la dette est supérieur à la rentabilité économique, alors le levier agit négativement. On dit que l'effet de levier se transforme en effet de massue.

Dans les années 1970, les entreprises françaises ont bénéficié d'un effet de levier. En effet, l'inflation allégeait considérablement leurs charges d'intérêt, de sorte que la rentabilité économique était très supérieure au taux d'intérêt. Avec la désinflation des années 1980, les entreprises ont connu des charges d'intérêt réelles croissantes. Pour ne pas être confrontées à un effet de massue, elles se sont désendettées

A. L.

➙ Désinflation, inflation, ratio

Lewis (modèle de)

Modèle dû à Arthur Lewis (né en 1915, à Sainte-Lucie, Petites Antilles, prix Nobel d'économie en 1979), expliquant la stagnation des salaires industriels dans les pays du tiers-monde par l'existence d'un surplus de main-d'œuvre agricole.

L'existence de chômage « déguisé » (travailleurs en surnombre) dans le secteur agricole exerce une concurrence sur les salaires industriels : chaque travailleur qui s'embauche pourrait être remplacé par un paysan déraciné. Le marché du travail est donc « dual » – en « porte-à-faux » sur les deux secteurs – avec des salaires industriels inférieurs à la productivité des travailleurs. Ce « dualisme » facilite l'industrialisation naissante en ce sens que l'écart entre salaires et productivité permet l'accumulation de profits industriels qui, à leur tour, financeront l'investissement

J.-M. F.

➙ Dualisme

Libéralisme économique

Doctrine prônant la liberté d'entreprendre et l'absence d'intervention de l'État dans l'économie.

La pensée libérale est née au xviiie siècle et s'imposa dans la plupart des pays industriels au xixe siècle. Elle fut remise en cause au xxe siècle à la suite de la crise de 1929, puis revint au premier plan à la fin du siècle.

Historiquement, l'apparition des premiers économistes libéraux du xviiie siècle (D. Hume, A. Smith, D. Ricardo, J.-B. Say...) s'explique par l'émergence d'une philosophie individualiste et critique face à l'absolutisme du pouvoir politique.

Cette tendance s'était déjà manifestée en Grande-Bretagne au xviie siècle au moment des révolutions politiques débouchant sur la reconnaissance des droits des individus (Déclaration des droits de 1689). Parallèlement, sur le plan économique, se propagea l'idée que l'enrichissement de chacun conduit à la prospérité collective, et que le libre essor de l'échange marchand améliore la richesse nationale. Cela conduisit à la critique des  politiques mercantilistes et protectionnistes menées depuis deux siècles.

La Révolution française associa libertés politiques et libertés économiques

En France, les mêmes idées se propagèrent parmi ceux qui dénonçaient les obstacles à la libre circulation des denrées, à l'intérieur comme à l'extérieur du pays, le poids excessif de la fiscalité royale (pesant de plus en plus sur les marchands et les agriculteurs productifs) et les réglementations de toutes sortes, héritages du système médiéval des corporations et du colbertisme.

Dans les deux pays, le libéralisme finit par l'em- porter : la Révolution française supprima les corporations, institua la liberté des échanges, la notion de liberté des prix et de contrats libres (lois d'Allarde et Le Chapelier), tout en associant dans sa Déclaration des droits de l'homme et du citoyen les idées de liberté et de propriété individuelle. En Grande-Bretagne, les mesures protectionnistes (Actes de navigation, Corn Laws) furent abolies durant la première moitié du xixe siècle et le pays resta libre-échangiste jusqu'à la crise de 1929.

Recul et retour en force du libéralisme au xxe siècle

La crise de 1929 accentua le protectionnisme des divers pays (la Grande-Bretagne elle-même y eut recours) tandis que les gouvernants intervenaient dans l'économie pour tenter de relancer l'activité et réduire le chômage (New Deal aux États-Unis, hausse générale des salaires et essor des conventions collectives en France, mesures autoritaires en Allemagne et en Italie...).

Après la Seconde Guerre mondiale, le libéralisme fut encore plus rejeté, en raison de la place occupée par les institutions publiques dans la plupart des pays et du rôle de régulateur de l'activité joué par les autorités économiques. Mais la crise des années 1970 et l'inefficacité apparente des politiques de relance étatique permirent un retour en force du libéralisme économique. Celui-ci se traduisit par le recul du secteur public (privatisations en Grande-Bretagne et en France...), par la restriction de l'aide apportée aux entreprises en difficulté, par une politique de création monétaire moins active de la part des banques centrales, par la réactivation des marchés boursiers et par l'acceptation des règles de la concurrence internationale (baisse des protections douanières ou des quotas à l'importation, libre circulation des capitaux...)

P. B.

➙ École classique, école néoclassique, États-Unis, France, Grande-Bretagne, nouvelle économie, physiocratie

Libre-échange

Mode d'organisation des relations commerciales internationales dans lequel les États ne mettent aucun obstacle à l'entrée de biens produits à l'étranger et destinés à être vendus ou transformés sur le territoire national, aux mêmes conditions fiscales et réglementaires que les produits nationaux.

La mise en œuvre d'une politique de libre-échange implique le démantèlement des mesures relevant du protectionnisme : abolition des droits de douane, suppression des barrières non tarifaires (quotas d'importation, normes discriminatoires, etc.).

Le libre-échange a été préconisé par les auteurs libéraux classiques comme Adam Smith ou David Ricardo. Mais il n'a vraiment commencé à être mis en place en Grande-Bretagne qu'avec l'abolition des Corn Laws (1846) et le traité de libre-échange franco-britannique (1860). Cette orientation politique a pourtant été infléchie à la fin du xixe siècle et inversée après la crise de 1929. Elle a été remise en selle après la Seconde Guerre mondiale avec la création du GATT, qui a permis une baisse progressive, mais spectaculaire, des droits de douane. Dans les années 1980 et 1990, la plupart des pays ont infléchi leur politique commerciale dans le sens du libre-échange, y compris des pays émergents, en développement ou ex-socialistes, auparavant très protectionnistes.