Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
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Japon

Deuxième puissance industrielle du monde à la fin du xxe siècle, le Japon était encore un siècle auparavant un pays féodal. Il a connu un développement économique exceptionnel grâce à une synthèse réussie entre ses traditions nationales et le modèle occidental, et en s'appuyant sur le dynamisme individuel mais aussi sur des vertus collectives insufflées par un puissant appareil d'État.

Après un xvie siècle marqué par d'incessantes guerres civiles entre grands seigneurs féodaux (les daimyo) qui profitaient de la faiblesse de l'empereur, le pouvoir fut concentré entre les mains d'un petit aristocrate provincial, Tokugawa Iyeyasu, qui se proclama shogoun (généralissime) et parvint à unifier le Japon.

Durant la première partie du xixe siècle, la situation économique se dégrada, les paysans accablés d'impôts se soulevèrent, et un mouvement favorable à la restauration de l'autorité impériale se manifesta dans le pays. Parallèlement, les pays occidentaux obtenaient sous la menace que le Japon s'ouvre au commerce international (expédition de l'amiral américain Perry, 1853-1854). Cela suscita des incidents anti-occidentaux, et les flottes britannique, française et américaine menèrent plusieurs actions militaires, qui discréditèrent les derniers shogouns. Ceux-ci furent vaincus par les partisans de l'empereur Mutsohito, porté au pouvoir fin 1867 à l'âge de quinze ans.

L'ère du Meiji (1867-1912)

Commence alors une période de bouleversement complet de la société japonaise, qui restera connue sous le nom de Meiji (« gouvernement éclairé »).

Le jeune empereur et ses conseillers entreprirent en effet une réorganisation de l'administration des campagnes, qui remettait en cause le découpage féodal et donnait la propriété de la terre aux paysans ; ils instituèrent le droit d'acheter et de vendre des terres, ainsi que la liberté du commerce intérieur et extérieur, modifièrent l'impôt foncier et le système des pensions, et créèrent des écoles, des universités et une nouvelle armée impériale.

Après avoir écrasé un soulèvement armé (1874-1877), l'empereur poursuivit ses réformes inspirées de l'Occident : en 1889, il promulgua une constitution qui instituait une Chambre des pairs (nommés) et une Chambre des représentants (élus). Le droit japonais fut réformé sur les modèles français et allemand. L'armée reçut des instructeurs européens.

Sur le plan économique, les transformations furent spectaculaires. L'État créa des entreprises publiques, rapidement privatisées, aida les firmes privées, les poussa à se concentrer et à investir dans tous les domaines : exploitation des mines, métallurgie, textile, matériel militaire, chantiers navals, construction de voies ferrées, électrification. L'industrie de la soie (1re exportation japonaise) se développa rapidement et fut mécanisée. L'État créa également la Banque du Japon en 1881 et adopta l'étalon-or en 1895. Un système bancaire moderne et concentré vit aussi le jour, lié aux grandes entreprises industrielles, donnant naissance aux Zaibatsu (conglomérats géants, tels Mitsui, Mitsubishi, Yasuda, Sumimoto...). Il était complété par un dense réseau d'environ 1 000 petits établissements bancaires.

À la mort de l'empereur Mutsohito, en 1912, le Japon était une puissance industrielle, comme l'attestent le poids de ses secteurs modernes et la victoire de ses armées contre la Chine (1895), la Russie (1905) et la Corée, colonisée entre 1905 et 1910 et fournissant du riz et des matières premières.

En voulant se doter d'une armée capable de résister aux pressions extérieures, le Japon était devenu une nation impérialiste qui tentera d'imposer son hégémonie sur le continent asiatique.

Le MITI

Le ministère du Commerce international et de l'Industrie (Ministry of International Trade and Industry), créé en 1949, a joué un rôle important dans la reconstruction de l'économie japonaise et dans l'essor des exportations du pays. Il contribua à définir les industries-clefs qu'il fallait développer en priorité, aida les industries naissantes et la restructuration des industries déclinantes, dans le cadre d'une planification souple de l'économie mise en œuvre par l'État.

La libéralisation de l'économie japonaise et son ouverture croissante vers l'extérieur ont réduit son influence, mais il continue à orienter l'évolution du pays en guidant en particulier l'insertion du Japon dans l'économie mondiale.

Le Japon au xxe siècle

Le Japon participa à la Première Guerre mondiale aux côtés des Alliés et obtint de nouveaux droits sur la Chine et le contrôle des possessions allemandes du Pacifique.

Puis, de 1919 à 1931, le Japon connut une période de libéralisation interne et d'essor économique. La production industrielle se diversifia et le commerce extérieur japonais, excédentaire dès 1915, devint l'un des moteurs de la croissance.

Parallèlement s'affirmait le dualisme caractéristique de l'économie japonaise : un secteur moderne constitué de grandes entreprises industrielles, bénéficiant d'importants moyens de financement qui leur permettent d'acquérir des techniques performantes et d'assurer la stabilité de l'emploi, sert de moteur principal de la croissance ; un second secteur, composé de petites entreprises utilisant peu d'employés, assure la production de biens traditionnels (textile, cuir, petite métallurgie...).

Durant l'entre-deux-guerres, le premier secteur dépendait principalement des commandes publiques, alors que le second, aux faibles coûts de production, était tourné vers l'exportation. Mais, après la Seconde Guerre mondiale, ce seront au contraire les grandes firmes innovatrices (automobile, appareils ménagers, industries de l'image et du son, électronique...) qui seront les fers de lance du dynamisme du commerce extérieur japonais, alors que les petites entreprises, travaillant souvent en sous-traitance, assureront le rôle de pourvoyeur du marché intérieur, de fournisseur d'emplois peu qualifiés et d'amortisseur des crises : en cas de difficultés économiques majeures, les grandes firmes, assurant l'emploi à vie et de hauts salaires à leurs employés, diminuent leurs demandes aux petites entreprises, qui réduisent leurs marges et ajustent leur niveau d'emploi et de rémunération.