Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
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Saint-Simon (Claude Henri de Rouvroy, comte de)

Écrivain contestataire français (1760-1825), à l'origine d'un courant « industrialiste » qui a inspiré de nombreux entrepreneurs du xixe siècle.

Saint-Simon se rend célèbre en affirmant que, pour réaliser le progrès économique et social, il faut mettre en place un « système industriel » visant à améliorer le sort de la classe la plus pauvre et la plus nombreuse, reposant sur la complémentarité des intérêts de tous les « productifs », et encadré par un État veillant à satisfaire l'intérêt général.

Saint-Simon fit de nombreux adeptes, dont les plus célèbres furent Prosper Enfantin, Michel Chevalier, ministre de Napoléon III (lui-même sensible aux idées de Saint-Simon), le banquier Laffitte, les frères Pereire et Ferdinand de Lesseps. Saint-Simon fit également œuvre de prophète en appelant le « rassemblement des peuples de l'Europe en un seul corps politique, conservant à chacun son indépendance nationale », ce qui est en cours de réalisation à l'aube du xxie siècle.

P. B.

➙ France, industrialisation

Salaire

Rémunération versée par un employeur à un employé en contrepartie de l'utilisation d'un certain temps de travail mis à la disposition du premier par le second.

Le salaire peut être versé en nature (nourriture, hébergement...), mais il prend généralement une forme exclusivement monétaire dans les sociétés marchandes. Il peut faire l'objet d'un simple accord particulier entre l'employeur et l'employé, ou être réglementé dans le cadre de conventions collectives fixant la grille des rémunérations en fonction d'un degré de qualification reconnu nationalement, et être de ce fait au moins égal à un minimum légal. Le salaire nominal est calculé à prix courant ; le salaire réel, à prix constant.

Naissance et développement du salariat

Le salariat s'est développé historiquement avec le capitalisme industriel, c'est-à-dire à partir de la fin du xviiie siècle. Auparavant, le travail était rémunéré indirectement à travers l'achat de produits façonnés à domicile ou dans de petits ateliers urbains. Le salariat existait cependant (mais d'une façon marginale) dans le cadre de l'artisanat urbain : un maître artisan, propriétaire de son échoppe et de ses instruments de travail, employant un ou plusieurs compagnons ou apprentis, payés partiellement sous forme monétaire et partiellement en nature (nourriture, hébergement...). Mais la révolution industrielle bouleversa les techniques de production et les rapports sociaux. La mécanisation et le développement de l'industrie impliquèrent l'utilisation sur une grande échelle d'une main-d'œuvre salariée à temps complet. Celle-ci est désormais rémunérée pour le temps passé à produire des marchandises.

Durant le xixe siècle, l'essor du capitalisme industriel et des grandes unités de production s'accompagna de l'essor du salariat, qui s'étendit encore plus au xxe siècle avec la croissance des activités de services et des administrations publiques, et le déclin concomitant de l'artisanat et de la petite agriculture.

Les théories du salaire

Dans la théorie classique anglaise, le salaire des ouvriers correspond à la rémunération nécessaire à la simple survie d'une famille ouvrière, la concurrence entre ouvriers empêchant les salaires de s'élever durablement au-dessus de ce niveau. Pour Marx, le salaire est fonction des conditions sociales de « reproduction de la force de travail », mais aussi du rapport de force entre « bourgeoisie » et « prolétariat ». Selon les théoriciens néoclassiques, le salaire est le « prix du facteur travail » et fluctue en fonction de l'offre et de la demande de ce facteur. Sous l'effet de la concurrence, il tend à correspondre à la productivité marginale en valeur du travail (c'est-à-dire ce que rapporte la dernière unité de travail utilisée), puisque la demande de travail (et donc le salaire) augmente tant que la productivité du travail est supérieure au coût salarial, et qu'inversement la demande de travail diminue si le coût salarial excède la productivité du travail.

Le salaire aujourd'hui

En France, les salaires nets moyens étaient en 1993 égaux à 14 000 francs environ pour les hommes et de 10 200 francs pour les femmes travaillant en Île-de-France, de 9 900 francs pour les hommes et de 7 700 francs pour les femmes travaillant en province. Le salaire minimum horaire brut était quant à lui égal à environ 40 francs en 1998, soit environ 7 000 francs brut par mois pour 175 heures travaillées.

Analyse du salaire

En deux siècles, la part des salariés dans l'ensemble de la population active est passée d'environ 15 % à plus de 80 % aujourd'hui. On distingue les salaires bruts (comprenant les cotisations sociales supportées par les salariés et retenues par les employeurs qui les versent aux organismes de protection sociale), les salaires nets, effectivement perçus par les employés, et (en comptabilité nationale française) la rémunération des salariés, versée par les employeurs, qui englobe les salaires et l'ensemble des cotisations sociales à la charge des employeurs et des employés.

La part des salaires dans la valeur ajoutée globale de l'économie française, qui était de l'ordre de 60 % en 1970 et qui avait atteint environ 70 % au début des années 1980, est revenue à son niveau de 1970 au milieu des années 1990. Cela s'explique par des politiques salariales relativement restrictives, destinées à lutter contre l'inflation et à restaurer la compétitivité et la rentabilité des entreprises.

P. B.

➙ (T. R.) Malthus, marxisme, répartition des revenus, (D.) Ricardo, SMIC, (A.) Smith, valeur ajoutée

Salaire d'efficience

Théorie selon laquelle le salaire exerce un effet incitatif sur l'effort productif des travailleurs, dont la productivité augmente avec la rémunération.

Le salaire n'est plus seulement un coût pour les firmes mais aussi un facteur d'efficacité. Dans un cadre de concurrence et d'information imparfaites, les employeurs ne peuvent pas vraiment connaître les qualités des salariés. Aussi, certaines entreprises proposent des salaires plus élevés qu'ailleurs pour attirer une main-d'œuvre compétente, éviter une rotation du personnel trop fréquente, coûteuse en termes de formation, et pour dissuader les comportements de « tire-au-flanc ». Elle fait ainsi du licenciement une menace plus coûteuse par la perte de revenu qui en découlerait.