Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
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Monnaie (suite)

Comment naît la monnaie ?

Si l'on veut être riche, peut-on imprimer des billets qui, en circulant, permettront d'acheter de nombreux produits de luxe et donneront l'impression que la masse monétaire a augmenté ? Non, malheureusement, car avant même que l'on voie que les billets sont faux, on s'apercevra que cette « monnaie » n'a pas de « contrepartie ». Sous cette appellation, on fait référence à l'ensemble des créances qui permettent la création monétaire. Seules, les banques commerciales, la Banque de France et le Trésor public peuvent faire de la création monétaire.

Si, par exemple, une banque commerciale consent un prêt immobilier à une famille pour l'achat d'un appartement à Paris, elle peut présenter cette créance (la promesse de remboursement du prêt), avec toutes les autres qu'elle détient, à la Banque de France. Muni de ces « contreparties », l'institut d'émission (la Banque de France) transférera à la banque une masse de billets qui approvisionneront les distributeurs dans la rue et seront consolidés (gérés) par les institutions financières. Lorsque la famille aura fini de rembourser son prêt immobilier, la créance disparaîtra. Il y aura alors une « destruction monétaire ».

Les banques centrales peuvent être tentées de faire marcher la « planche à billets », c'est-à-dire d'émettre des billets de banque sans contreparties suffisantes. Mais l'opération se solde par une hyperinflation et un dérèglement de l'économie, car il y a rapidement trop de transactions par rapport à l'activité réelle dans le pays.

Progressivement, il est devenu obligatoire d'accepter les reçus. Ces billets, gagés par l'État, avaient « cours légal » (tous, sur un même territoire, étaient contraints de les accepter, sans pouvoir en demander la conversion en or). Après la généralisation du papier-monnaie dans la seconde moitié du xixe siècle sont apparues des formes toujours plus immatérielles de monnaie : les chèques et les virements de compte à compte, puis les cartes de crédit.

L'un des avantages de la monnaie, c'est d'être immédiatement disponible (les experts disent liquide, ou fongible, d'où l'expression « liquidités »). La monnaie fait référence à des éléments distincts (pièces nationales ou étrangères, virements bancaires, prêts, obligations...). L'un des moyens commodes pour la quantifier et la classifier est l'utilisation des agrégats monétaires, qui classent la monnaie depuis son appellation la plus étroite (M1) jusqu'à la plus large (M4).

La formule magique MV = PT

L'un des outils centraux de réglage des économies est appelé « vitesse de circulation de la monnaie ». Cet outil est calculé en utilisant une équation magique, inventée au début du siècle : M x V = P x T (M est la masse monétaire, V la vitesse de circulation de la monnaie, P le niveau général des prix et T le volume des transactions. Pour un pays donné, V doit être constante et pas trop élevée, sinon une ou plusieurs autres variables doivent augmenter afin de préserver l'équilibre : soit M, la quantité de monnaie offerte sur le marché ; soit P, les prix (donc inflation) ; soit T, les transactions (donc risque de surchauffe de l'activité). Plus concrètement, la vitesse de circulation mesure la vitesse à laquelle un billet de banque donné (par exemple un billet de 500 francs) effectue un nombre de transactions différentes. Si cette vitesse est trop rapide, c'est un signe d'inflation ; si elle est trop lente, cela peut être un signe de l'atonie d'une économie

F. L.

➙ Agrégats monétaires, Banque centrale, Banque de France, monétarisme, Trésor public

Monométallisme

Système monétaire gagé sur un seul métal précieux.

L'étalon-or est le plus connu des systèmes monométallistes, puisque les principales monnaies convertibles aux xixe et xxe siècles ont été gagées sur l'or. Auparavant, l'Europe du Sud (l'Espagne, les cités italiennes...) puis la Grande-Bretagne étaient fermement monométallistes-or, alors que de nombreux États de l'Europe centrale et de l'Europe du Nord pratiquaient le bimétallisme (leurs monnaies étant gagées sur l'or et l'argent), voire utilisaient comme référence seulement l'argent. La France jouait souvent d'intermédiaire entre les deux systèmes. À la fin du xixe siècle, le rapport du prix de l'argent et de l'or se détériora au profit de l'or, et le bimétallisme disparut

F. L.

➙ Or, SMI

Monopole

Situation où une seule entreprise approvisionne un marché.

Ainsi, je suis obligé d'en passer par la SNCF si je veux voyager en train de Paris à Toulouse ou par La Poste pour acheter un timbre. On peut citer comme autres exemples de monopole le médicament de marque Viagra ou le fromage de Beaufort.

Ces exemples montrent qu'il n'existe pas de monopole absolu parce que tout produit possède des substituts plus ou moins proches auxquels on peut recourir. Je peux prendre l'avion si le train est trop cher ou trop lent ; je peux recourir au courrier électronique au lieu d'acheter un timbre ; je peux piler de la corne de rhinocéros ; je peux manger du Boursin.

Une entreprise monopolise une branche dans trois cas :

• si l'État en interdit l'accès aux autres (c'est le cas pour la SNCF et en partie pour La Poste) ;

• si un brevet d'invention en protège l'accès (Viagra) ;

• si la nature n'en permet pas la concurrence (beaufort).

On a étudié le comportement du monopole pour déterminer à quel prix il va proposer son produit. Celui-ci sera plus cher qu'en situation concurrentielle puisque les acheteurs ne pourront pas facilement se passer de ses services, mais il ne devra pas être trop cher non plus car des produits de substitution pourraient en profiter, et des entreprises pourraient s'implanter dans la branche et vendre le même produit moins cher.

Il arrive que des raisons techniques justifient qu'une seule entreprise accapare une branche, appelée alors « monopole naturel ». Le transport de l'électricité en est un exemple : il serait absurde de multiplier les poteaux et les fils électriques sur le territoire, ce qui justifie le fait que EDF soit un monopole public. Mais on a objecté que la concurrence pourrait rendre la production plus efficiente. On cherche alors, comme pour la SNCF, le transport aérien et les télécommunications, à attribuer les réseaux à des monopoles, mais à en garantir l'accès à d'autres entreprises, sous    certaines conditions de tarifs et d'agréments techniques

F. E.

➙ Concurrence, marché, optimum, prix, substituables