Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
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Capitalisme (suite)

On peut parler également de capitalisme agricole quand des capitaux servent à l'achat ou à la location de terres, de semences et d'engrais..., et à rémunérer des salariés agricoles.

Les premières manifestations du capitalisme

À l'époque romaine, de grands marchands avançaient des sommes importantes pour acheter des denrées alimentaires, des armes ou des vêtements qu'ils revendaient ensuite aux responsables de l'approvisionnement des villes ou de l'armée. D'autre part, la classe dite « équestre » était composée de financiers qui étaient chargés de récolter les impôts et qui s'enrichissaient par le jeu de manipulations monétaires. De plus, des fabricants d'armes, d'amphores, de matériaux de construction, de vêtements... investissaient des capitaux parfois avancés par des banques dans l'achat d'esclaves et de matières premières.

À l'époque féodale, et surtout au xiiie siècle durant lequel les échanges marchands furent particulièrement intenses,     de grandes     « maisons » – souvent italiennes (florentines et sien-noises) – constituèrent des réseaux commerciaux de nature capitaliste : ils achetaient des marchandises revendues dans leurs comptoirs français, flamands, allemands..., engageaient des employés rémunérés et prêtaient de l'argent aux seigneurs et aux souverains en quête de liquidités. Parallèlement se constituèrent des sociétés de commerce dans lesquelles des « capitalistes » risquaient leur argent en achetant des parts leur permettant de se partager les bénéfices.

Aux xve-xvie siècles, ce capitalisme marchand prit une dimension nouvelle : les Médicis en Italie, Jacques Cur en France, les Fugger en Allemagne réalisèrent d'énormes fortunes grâce au commerce international et en fournissant les cours européennes.

Durant les xviie et xviiie siècles, le capitalisme marchand prit une extension nouvelle avec l'essor des échanges entre l'Europe, l'Amérique et l'Orient. Les compagnies hollandaises (dont la Compagnie des Indes orientales) développèrent le commerce vers l'Asie. Elles constituèrent un véritable empire colonial et bénéficièrent de l'apport de capitaux réunis à la Bourse d'Anvers, puis à celle d'Amsterdam. Les Anglais réussirent à supplanter les transporteurs hollandais vers la fin du xviie siècle, et contrôlèrent le commerce triangulaire entre les ports britanniques, les côtes africaines et l'Amérique. Ce capitalisme commercial fut à l'origine du capitalisme industriel, car il avait permis d'amasser d'importants moyens de financement, d'importer des matières premières industrielles (coton) et de développer l'esprit capitaliste.

Les premières étapes du capitalisme industriel

Durant les années 1770-1780, un nouveau capitalisme commença à se constituer. Les détenteurs de capitaux ne se contentèrent plus d'acheter et de revendre des marchandises, d'acheter des matières premières (laine ou coton) et de les faire transformer par des petits artisans urbains ou des paysans travaillant à domicile (domestic system). Ils commencèrent à utiliser des métiers mécaniques et une main-d'œuvre salariée à temps plein dans de grands ateliers permettant de produire plus et à moindre coût.

Cette pratique se généralisa durant le xixe siècle en englobant l'essentiel des activités : textile, extraction minière, métallurgie, construction du matériel ferroviaire, chimie, puis, au début du xxe siècle, automobile, appareils électriques, aviation... La nécessité de disposer de capitaux importants pour investir dans ces divers domaines eut deux conséquences : l'exclusion des petits producteurs indépendants, qui ne pouvaient trouver les sources de financement ni résister à la concurrence des entreprises modernes ; la création d'un système bancaire et de Bourses de valeurs assurant la collecte de capitaux pour financer les nouvelles entreprises et permettant aux acheteurs d'actions de recevoir une partie des profits. Le capitalisme industriel est donc nécessairement aussi marchand et financier.

Durant le xixe siècle, le capitalisme fut marqué par plusieurs traits majeurs : une grande instabilité de l'activité (il connut de nombreux cycles) ; une flexibilité des salaires et des profits (fonction des aléas conjoncturels) ; une forte concurrence entre les entreprises (à cause de leur petite taille et de l'évolution rapide des techniques) ; une tendance à la baisse des prix sur longue période ; la dureté des conditions de vie de la classe ouvrière (bas salaires, longueur de la journée de travail, pénibilité des tâches, absence de droit syndical et de législation sociale, insalubrité de l'habitat).

Le capitalisme du xxe siècle

Ce capitalisme concurrentiel se transforma dès la fin du xixe siècle en raison de la concentration de l'appareil productif, particulièrement visible aux États-Unis, en Allemagne et au Japon. De grandes firmes se constituèrent dans les secteurs industriels les plus avancés (sidérurgie, chimie, automobile, pétrole...) ; elles absorbèrent leurs concurrents ou passèrent entre elles des accords pour limiter la concurrence, qui obligeait les entreprises à baisser leurs prix et menaçait les profits. Parallèlement, l'organisation de la classe ouvrière, la reconnaissance de ses droits et le progrès des institutions démocratiques débouchèrent sur une stabilisation des salaires nominaux et sur une amélioration des conditions de travail. Cette rigidité des coûts salariaux explique en grande partie les tendances à l'inflation qui se manifestèrent durant le xxe siècle.

Enfin, l'État joua un rôle plus direct dans la vie économique. Au xixe siècle, il se contentait d'assurer l'ordre public, de défendre la propriété privée et la valeur de la monnaie, et de promouvoir les intérêts du pays. Au xxe siècle, l'État intervint plus directement : soit à travers son budget (dépenses de redistribution des revenus vers les plus pauvres, soutien de la demande globale et donc de l'activité et de l'emploi) ; soit avec une politique industrielle favorisant certains secteurs essentiels ; soit, enfin, en s'appuyant sur un secteur public plus ou moins important selon les pays.