Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
E

École néoclassique (suite)

La critique radicale que J. M. Keynes formula à l'égard de la théorie néoclassique durant les années 1930 provoqua un clivage parmi les économistes. Certains (telle J. Robinson) suivirent Keynes et refusèrent toute conciliation avec les néoclassiques. D'autres (comme J. Hicks ou P. Samuelson) revendiquèrent l'appellation néoclassique, tout en s'efforçant de concilier l'essentiel de cette théorie avec l'idée keynésienne de la nécessité de l'intervention de l'État dans la régulation de l'économie quand les mécanismes de marché sont défaillants (courant dit « de la synthèse »)

F. E. et P. B.

➙ (S.) Jevons, (J. M.) Keynes, (A.) Marshall, (C.) Menger, (V.) Pareto, (P.) Samuelson, (L.) Walras

Économétrie

« L'économétrie est l'unification de la statistique, de la théorie économique et des mathématiques pour comprendre les relations quantitatives de la vie économique. »

Cette définition est de Ragnar Frisch (Nobel 1969), fondateur en 1930 de la Société économétrique puis de la revue Econometrica. L'objectif est de mesurer l'économie pour prévoir les évolutions macroéconomiques ou les comportements microéconomiques des agents afin d'enrichir la compréhension théorique et de prendre les mesures de politiques économiques adaptées. Ainsi, à partir de calculs de corrélation, il sera possible, par exemple, de connaître précisément l'évolution quantitative de la demande de café en fonction de son prix. L'économétrie est aujourd'hui un outil incontournable des économistes.

Le réalisme a remplacé le messianisme scientifique

L'économétrie naît véritablement en 1930 sous l'impulsion d'hommes nouveaux issus des sciences expérimentales et des mathématiques, qui désirent appliquer leurs méthodes à une science économique incapable de prévoir ni de traiter une crise comme celle de 1929. J. Tinbergen (Nobel 1969) construit dès 1936 un modèle cherchant à expliquer l'ensemble du fonctionnement de l'économie des Pays-Bas. Trygve Haavelmo (Nobel 1989) introduit en 1943 la démarche probabiliste, éloignant l'économétrie moderne du déterminisme des premières tentatives. Cette approche est développée aux États-Unis au sein de la Cowles Commission, célèbre centre de recherche, avec des modèles à équations simultanées. Depuis la fin des années 1960, d'autres voies sont explorées, moins axées sur les grands modèles macroéconomiques (comme le modèle DMS utilisé par l'INSEE) et davantage sur des modèles partiels, insistant, par exemple, sur l'analyse des données, les séries chronologiques ou les anticipations rationnelles. Les années 1970 et 1980 ont ainsi vu un second souffle pour l'économétrie, même si l'optimisme initial des fondateurs (comprendre pratiquement le fonctionnement de l'économie des nations et du monde) est oublié

E. L. H.

➙ Prévision économique

Économie (étymologie)

Discipline qui étudie la production, la consommation et la répartition des richesses existant en quantité limitée.

Le terme « économie » vient du grec oikonomia (terme issu lui-même de oikonomos, « administra-tion de la maison »). Il désigne dans le langage courant ce qui conduit à réduire la quantité utilisée de ressources relativement rares dont on dispose : restreindre ses dépenses monétaires (« faire des écono-mies ») ou énergétiques (« économiser ses forces »), économiser son temps, ses paroles... Dès l'Antiquité, cette notion fut étendue à la gestion des biens privés et déboucha sur celle d'« économie domestique », s'appliquant à l'administration des domaines et patrimoines privés : des traités d'économie domestique (tel celui du grec Xénophon, 430-335 av. J.-C.), font état des principes de saine gestion privée. Aristote (384-322) traite quant à lui de l'Économique, ou science de la vie familiale, forme noble de la chrématistique (activité visant à l'acquisition de biens ou de richesses).

De la sagesse domestique à la gestion de collectivités

Le terme d'« économie politique », ou économie de la cité, s'applique aux mécanismes de fonctionnement d'un ensemble plus vaste, mettant en relation un grand nombre d'unités économiques interdépendantes. Il aurait été employé pour la première fois par Antoine de Montchrestien au début du xviie siècle à propos des moyens à utiliser pour enrichir le royaume. Les grands auteurs classiques (Ricardo, Say, Malthus...) écrivirent des traités d'économie politique s'intéressant à l'origine de la valeur des marchandises, à la détermination des principales catégories de revenus, et à la meilleure façon de combiner les moyens dont on dispose pour satisfaire au mieux les besoins infinis des consommateurs.

Au xxe siècle, la diversification des problèmes concernant la réalité économique conduisit à l'abandon progressif des distinctions anciennes entre économie domestique et économie politique au profit des termes de « science économique » et de « science de gestion des entreprises »

P. B.

Économie d'endettement

Caractéristique d'un système financier dans lequel les entreprises se financent en priorité auprès des banques ; s'oppose à économie de marchés financiers.

Depuis une contribution majeure de John Hicks en 1974, les économistes distinguent les systèmes financiers dans lesquels prédominent les financements intermédiés, c'est-à-dire effectués par les banques (économies d'endettement), par opposition à ceux qui sont fondés sur les marchés de capitaux (économies de marchés financiers).

En économie d'endettement, les entreprises sont contraintes de trouver les financements nécessaires pour leurs investissements auprès des intermédiaires bancaires, étant donné que les marchés financiers sont peu accessibles.

Si aucune économie réelle ne correspond à un « type pur », jusqu'au début des années 1980 l'économie française était considérée comme une économie d'endettement (la part des crédits bancaires dans le total des financements externes des agents non financiers étant supérieure à 80 %). Avec l'intégration financière européenne et le développement progressif des marchés boursiers, le système financier français (et, dans un autre contexte, allemand) s'éloigne du type pur d'économie d'endettement, pour se rapprocher d'une économie financée par le marché financier

A. L.