Dictionnaire de la danse 1999Éd. 1999
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TAGLIONI

Famille de danseurs et chorégraphes italiens.

Fondateur de la dynastie, Carlo Taglioni né au milieu du XVIIIe s. travaille comme danseur et chorégraphe de 1782 à la fin du siècle dans différentes villes d'Italie (Venise, Rome, Sienne, Udine). Ses deux fils, Philippe et Salvatore, et une de ses filles Louise (l'autre fille Giuseppa s'est mariée trop tôt pour faire une carrière de ballerine) sont à des degrés divers des notoriétés du monde de la danse, ainsi que Marie et Paul, les enfants de Philippe, et Marie (dite Marie junior), la fille de Paul (Augusta l'autre fille de Paul fera une carrière d'actrice à Berlin). Cette famille présente la rare particularité dans les milieux du théâtre de l'époque, d'entretenir des liens étroits avec l'aristocratie. Ces relations sociales privilégiées, importantes dans l'Europe du XIXe s., expliquent en partie la considération dont furent honorés Philippe et Marie.

SJM

Marie TAGLIONI (1804-1884) .

Danseuse et pédagogue italo-suédoise.

Née à Stockholm de *Ph. Taglioni et d'une mère suédoise issue de la noblesse polonaise, elle travaille dans sa jeunesse à Paris avec J.-F. *Coulon, mais c'est surtout à son père qu'elle doit sa technique exceptionnelle. Le début de sa carrière est lié aux engagements de celui-ci comme *maître de ballet : il la fait débuter à Vienne en 1822 (Réception d'une jeune nymphe à la cour de Terpsichore). Elle le suit, avec un succès de plus en plus marqué, à Stuttgart et Munich. En 1827, ils sont engagés à l'Opéra de *Paris où elle paraît d'abord dans des *pas chorégraphiés par son père, ajoutés aux ballets ou aux opéras avant de devenir, avec la *Sylphide (1832), la première ballerine de la troupe. Sa renommée s'étend très vite à l'Europe entière : jusqu'en 1847, elle se produit à Londres, Vienne, Berlin, Milan, Saint-Pétersbourg, etc. Elle s'illustre dans des rôles traditionnels (la *Fille mal gardée, la *Laitière suisse), mais elle triomphe principalement en jouant les fantômes (la *Fille du Danube, l'*Ombre). Sa dernière création est le *Pas de quatre dont J. *Perrot lui confie la place centrale au milieu des autres gloires de l'époque (1845). En 1860, professeur de la classe de perfectionnement à l'Opéra de Paris, elle compte parmi ses élèves Mlle Salvioni et surtout E. *Livry pour qui elle règle sa seule chorégraphie, le *Papillon (1860). Après la guerre de 1870, elle gagne sa vie en enseignant la danse aux jeunes filles de la bonne société londonienne et tout particulièrement à celles de la princesse de Galles. En 1880, elle rejoint son fils à Marseille, où elle meurt dans le dénuement.

Ses premiers spectacles sont un éblouissement pour le public parisien qui découvre un nouveau genre de danse que G. *Gosselin avait laissé entrevoir avant sa mort prématurée. Toutefois, elle ne le séduit définitivement que lorsqu'on lui confie de vrais rôles où elle peut donner toute sa mesure, la Naïade de la *Belle au bois dormant (1829, J.-P. *Aumer), puis le premier rôle-titre de *Flore et Zéphire (1831, Ch. L. *Didelot). Elle entre dans la légende avec la Sylphide ; grâce à l'art de son père et à sa technique aérienne elle parvient à suggérer l'immatérialité de l'évanescent personnage éponyme. Élégante, raffinée, elle conjugue des talents rarement réunis dans une même artiste, à la fois technicienne virtuose et mime subtile, piquante ou pathétique selon les rôles. Elle est surtout l'une des premières à maîtriser les *pointes, qu'elle met au service d'une esthétique de l'*élévation avec ses sauts fluides, ses équilibres fugaces et ses ralentis. Sa célébrité tient à la conjonction exceptionnelle entre sa personnalité artistique et les aspirations de son temps : les compositions de son père, s'appuyant sur sa silhouette élancée et sa technique éthérée, la métamorphosent en âme dansante, donnent à voir l'immatériel, si bien que le romantisme reconnaît en elle une expression privilégiée de ses aspirations spirituelles et esthétiques. Elle est la première ballerine à conquérir une célébrité internationale qui confine au mythe.

SJM

Marie junior TAGLIONI (1833-1891).

Danseuse allemande.

Fille et élève de Paul *Taglioni, elle se produit à Londres dans les ballets de son père : elle débute dans Coralia (1847) où elle se distingue par sa grâce, son tempérament et sa force, et crée ensuite le rôle de la Fée aux fleurs dans Théa (1847). En 1848, elle danse avec C. *Grisi, F. *Cerrito et C. *Rosati dans les Quatre *Saisons de J. *Perrot. À Berlin en 1852, son père lui confie le rôle principal de *Satanella. De 1853 à 1856, elle travaille à Vienne, puis se produit comme prima ballerina dans de nombreuses créations de son père dont les *Aventures de Flick et Flock (1858) et Sardanapal (1865). Elle achève sa carrière en 1866. J. *Strauss junior lui dédie sa Marie Taglioni-Polka.

CC

Paul TAGLIONI (1808-1884).

Danseur et chorégraphe d'origine italienne.

Né à Vienne, il étudie à Paris avec son père Ph. *Taglioni et J.-F. *Coulon. De 1825 à 1829, il est le partenaire de sa sœur Marie à Stuttgart, Vienne, Munich, Paris et Berlin. En 1829, il épouse la danseuse Amalia Galster avec qui il danse aux États-Unis en 1839. Il présente ses premiers ballets en 1831 au Hofoper de *Berlin où il est chorégraphe permanent de 1856 à 1883. De 1847 à 1867, il est aussi chorégraphe invité au Her Majesty's Theatre de Londres, au Hofoper de *Vienne et à la *Scala de Milan. Il est le père de Marie *Taglioni junior.

Chorégraphe prolifique au métier solide, il se révèle riche de fantaisies. Ses "balli grandi" se conforment au nouveau goût du public dont l'intérêt se détourne alors de l'intrigue dramatique au profit des effets spectaculaires et des *ballabiles. C'est dans cet esprit qu'il compose la scène aquatique d'*Ondine (1836, mus. H. Schmidt, Berlin ; repris à Londres en 1847 sous le titre Coralia, mus. *Pugni) ou le tableau des fleurs animées dans Théa ou la Fée aux fleurs (1847, mus. Pugni, Londres ; rep. 1867, mus. *Dall'Argine, Milan). Ses innovations vont de l'utilisation de la lumière électrique dans Électra ou la Pléiade perdue (1849, mus. Pugni, Londres) à celle de patins à roulettes dans les Plaisirs de l'hiver ou les Patineurs (id.). Les Métamorphoses (1850, Londres) repris dans une nouvelle version sous le titre *Satanella (1852, Berlin), les *Aventures de Flick et Flock (1858), Sardanapal (1865, mus. *Hertel, Berlin) comptent parmi ses plus grands succès. Certains de ses ballets seront donnés jusqu'à la fin du XIXe s.

CC