Dictionnaire de la danse 1999Éd. 1999
P

Lucien Petipa (1815-1898). (suite)

Interprète de J. *Coralli (la *Péri), J. *Perrot (la Filleule des fées, 1849) et J. *Mazilier (le *Diable à quatre, *Paquita, *Marco Spada), il crée le rôle du prince dans *Giselle (1841). Sa prestance physique, sa grâce, sa distinction, son excellente élévation ajoutées à ses qualités de mime séduisent le public et les critiques. Partenaire de F. *Cerrito, C. *Rosati et A. *Ferraris, il est celui attitré de C. *Grisi à l'Opéra de Paris. Il signe Graciosa (mus. Théodore Labarre, 1841) et le Roi d'Yvetot (mus. Labarre, 1865), mais surtout il règle les *divertissements de nombreux opéras (de G. *Verdi, G. *Rossini, C. *Gounod), notamment la Bacchanale » de Tannhäuser de R. *Wagner (1861). Chorégraphe moins inspiré que son frère, il assiste au déclin de la danse masculine au sein de l'école française dont il est l'un des derniers et plus éblouissants représentants.

NL

Maria M. Petipa (1857-1930).

Danseuse russe.

Fille de M. *Petipa, elle étudie avec lui et avec C. *Johansson. Elle débute en 1875 dans un ballet de son père le Dahlia bleu et danse au *Mariinski jusqu'en 1907 puis par intermittence de 1909 à 1911. Dotée d'une grande beauté, elle est principale danseuse de *caractère dans les ballets et opéras montés par son père, interprétant notamment les rôles de Maria (la Halte de cavalerie), Gamzatti (la *Bayadère), Giannina (la Naïade et le Pêcheur), la Fée Lilas (la *Belle au bois dormant).

ESou

Marius Petipa (1818-1910).

Danseur, chorégraphe et pédagogue français.

Frère cadet de Lucien *Petipa, il étudie le violon et parallèlement est formé au Conservatoire de la danse de Bruxelles par son père. Il débute enfant au théâtre de la Monnaie, puis sa carrière le mène de Bordeaux (1834) à Nantes (1838), des États-Unis (1839) à Bordeaux (1841-1842), de Madrid (1843-1846) à Paris (Comédie-Française, 1847). Engagé comme premier danseur à *Saint-Pétersbourg en 1847, il reste au service du Ballet impérial russe jusqu'à sa retraite en 1904 : il se produit jusqu'en 1868, assiste J. *Perrot et A. *Saint-Léon avant de devenir *maître de ballet en titre en 1869, enseigne (avec C. *Johansson et E. *Cecchetti) à l'école de danse qu'il dirige de 1855 à 1887. Il ne revient qu'une fois en France, pour monter le Marché des innocents en 1861 à l'Opéra de *Paris. Il fait souche en Russie où ses deux épouses (Maria Sourovtchikova *Petipa et Lioubov Savitskaïa) et l'une de ses filles (Maria *Petipa) sont danseuses. Après avoir été congédié en 1904, il rédige (en français) ses Mémoires qui sont traduits en russe, puis en anglais (Russian Ballet Master : The Memoirs of Marius Petipa, Londres, 1968), et, le manuscrit original étant perdu, en français (Actes Sud, Arles, 1990).

Bon danseur, mais loin d'atteindre le niveau de son frère Lucien, de C. Johansson, Perrot ou Saint-Léon, il brille dans les rôles de caractère et s'affirme comme un excellent mime, interprétant un impressionnant Conrad dans le *Corsaire. Il donne toute sa mesure comme chorégraphe, signant une soixantaine de ballets et les danses d'une trentaine d'opéras. Outre les œuvres originales, il reprend le répertoire qui à l'époque disparaît de l'affiche dans le reste de l'Europe : ainsi il adapte au goût pétersbourgeois et à l'évolution de la technique les ballets de J. *Dauberval (la Précaution inutile d'après la *Fille mal gardée, 1885), Ph. *Taglioni (la *Fille du Danube, 1880 ; la *Sylphide, 1892), J. *Mazilier (*Paquita, 1847 et 1881 ; Satanilla d'après le *Diable amoureux, 1848 ; le Corsaire, 1858, 1868 et 1899 ; le *Diable à quatre, 1885), Perrot (*Catarina ou la Fille du bandit, 1870 ; la Naïade et le Pêcheur d'après *Ondine, 1874 et 1892 ; la *Esméralda, 1886 ) et Saint-Léon (la *Vivandière, 1881 ; *Coppélia, 1884 ; le *Petit Cheval bossu, 1895). Surtout, il monte plusieurs versions de *Giselle (1884, 1887 et 1899) en lui donnant la structure qu'on lui connaît aujourd'hui. S'il collabore parfois avec H. *Vernoy de Saint-Georges et I. *Vsevolojski, il est la plupart du temps l'auteur de ses livrets. Il propose une majorité de ballets à thème fantastique (le Dahlia bleu, 1860 ; Trilby, 1870 ; la *Fille de neige, 1879 ; les Pilules du diable, 1886 ; le Talisman, 1889 ; *Casse-Noisette avec *Ivanov, 1892 et le *Lac des cygnes, également avec Ivanov., 1895), s'inspirant notamment des contes de Ch. *Perrault (la *Belle au bois dormant, 1890 ; *Cendrillon, 1893 ; *Barbe-Bleue, 1896). Il fait montre d'un grand sens du pittoresque, attentif au cadre historique (le Moyen Âge de *Raymonda, 1898) et exotique (la *Fille du pharaon, 1862 ; la *Bayadère, 1877), montrant un goût plus que prononcé pour l'Espagne (la Perle de Séville, 1845 ; l'Étoile de Grenade, 1855 ; Don Quichotte, 1869).

Il établit d'emblée un canevas précis de l'action et commande à ses compositeurs (C. *Pugni, L. *Minkus, P. *Tchaïkovski, A. * Glazounov, R. *Drigo) une partition qui doit répondre à ses exigences stylistiques et musicales (caractère de la scène, nombre de mesures, tempo, etc.) Il développe le grand ballet, en trois ou quatre actes, qui occupe toute une soirée, splendidement mis en scène et rassemblant un grand nombre d'interprètes (danseurs, élèves de l'école de danse et figurants). Il construit ses intrigues en alternant scènes de *pantomime et séquences dansées, déployant les cortèges et les évolutions du corps de ballet, les pas pour groupes restreints (six, cinq, trois, etc.) qui mettent en avant des solistes, les pas de deux et solos réservés aux meilleurs artistes. Attachant autant d'importance à la pantomime (certains rôles sont entièrement mimés) qu'à la danse, il compose dans un style brillant, ample, lyrique et élégant. Si ses enchaînements de pas sont d'une grande virtuosité, ils n'en contribuent pas moins à définir le caractère des situations et des personnages (telle la série de *fouettés d'Odile envoûtant le prince à l'acte III du Lac des cygnes). Loin d'un académisme rigide, il règle chaque variation féminine en tenant compte des aptitudes de l'interprète, trouvant des mouvements et des poses qui l'avantagent et créent une impression d'évidence. Il donne au pas de deux une structure obligée (*adage, variations masculine et féminine, *coda) et développe un travail de partenariat qui nécessite un apprentissage spécifique, mais il délègue à d'autres le soin de chorégraphier les solos masculins. Son attention pour la ballerine culmine dans les ensembles féminins où il brode avec raffinement de savants déplacements et dispositions de groupes. Les danseuses C. *Brianza, A. *Dell'Era et P. *Legnani l'inspirent, mais il trouve en M. *Kschessinska, *Nikita et O. *Preobrajenska ses interprètes idéales. Il affectionne les divertissements de *caractère (italien, espagnol, polonais, russe, etc.) et peut emprunter aux danses traditionnelles des éléments caractéristiques qu'il adapte dans un style classique (grand pas hongrois de Raymonda).