Dictionnaire de la danse 1999Éd. 1999
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Bronislava NIJINSKA (1891-1972). (suite)

Excellente danseuse de *demi-caractère, réputée pour sa force et la puissance de ses sauts, elle crée le rôle de Papillon dans *Carnaval (1910), une danseuse de rue dans *Petrouchka (1911) avant de reprendre le rôle de la Ballerine en 1912, et une Bacchante dans Narcisse (1911, Fokine). En 1922, elle reprend à Paris le rôle de son frère dans l'*Après-midi d'un faune. C'est cependant dans ses propres œuvres que son talent original d'interprète s'exprime avec le plus d'éclat.

L'enseignement qu'elle dispense à Kiev est conçu afin de préparer ses élèves à répondre aux exigences artistiques de son frère (elle était le " cobaye " de ses créations) et pour transmettre les pas aux danseurs : ce projet est rendu caduc par la maladie de V. Nijinski, mais la recherche qu'elle a menée nourrit sa propre démarche de chorégraphe. Celle-ci commence à prendre forme en Russie où elle publie l'École du mouvement (19XX), essai influencé par les théories de R. *Laban, mais c'est chez Diaghilev que son talent s'impose. En 1921, elle collabore à The *Sleeping Princess, et il lui confie en 1922 sa première création pour les Ballets Russes, *Renard, où s'affirme son style novateur. Son œuvre (près de 60 ballets), d'une grande variété d'inspiration, révèle la puissance de son imagination et son sens de la stylisation, qui se traduit par une abstraction expressive dépouillée de tout détail narratif. Elle construit, avec une gestuelle claire et minimale, un langage *néoclassique fondé sur une approche plastique du mouvement, et un rapport au rythme riche et subtil influencé par les théories de E. *Jaques-Dalcroze. La modernité de ses conceptions se heurte parfois à l'incompréhension du public, mais des œuvres comme les *Biches, le *Train bleu ou *Noces sont passées à la postérité.

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Autres chorégraphies. Fear (1919, solo sans mus.) ; les *Fâcheux (1924) ; *Roméo et Juliette (1926, mus. *Lambert) ; le *Baiser de la fée (1928), *Boléro (1928) ; la *Valse (1929) ; les Cent Baisers (1935, mus. Philippe d'Erlanger) ; Brahms Variations (1944) ; Rondo Capricioso (1950, mus. *Saint-Saëns).

Vaslav NIJINSKI (1889-1950).

Danseur russe.

Issu d'une famille de danseurs polonais, il entre à l'École de danse de *Saint-Pétersbourg en 1898 et se produit au *Mariinski dès 1905, célèbre avant même d'être diplômé. Engagé en 1907, il est le partenaire de M. *Kschessinska, N. *Pavlova et T. *Karsavina. Il est la coqueluche de la vie mondaine russe et rencontre en 1908 S. de *Diaghilev dont il devient le protégé. Il participe en 1909, avec sa sœur Bronislava *Nijinska, à la première saison des *Ballets Russes, contribuant largement à son succès. Il se partage entre les deux compagnies, ne quittant le Mariinski qu'en 1911, après y avoir fait scandale avec un costume trop dépouillé dans *Giselle. Adulé du public occidental, il crée les œuvres les plus célèbres de M. *Fokine, et réalise sa première chorégraphie en 1912. En 1913, il épouse une jeune hongroise, Romola de Pulsky, dont il aura deux filles, Kyra en 1914 et Tamara en 1920. Ce mariage inopiné bouleverse Diaghilev, qui le licencie aussitôt. Une tentative de monter sa propre compagnie échoue à Londres en 1914. En 1916 et 1917, il est de nouveau engagé par Diaghilev pour les tournées américaines de la troupe, au cours desquelles il crée sa dernière chorégraphie, *Till Eulenspiegel. À son retour, il s'installe en Suisse, où apparaissent les premiers signes de sa maladie mentale. Entre deux séjours à l'hôpital, il travaille à un système d'écriture de la danse, dessine, et commence à rédiger son journal, aujourd'hui publié. Il danse en 1919 un dernier solo terrifiant sur la guerre. Il sombre ensuite définitivement dans la folie et meurt à Londres en 1950 ; son corps est transporté en 1953 au cimetière Montmartre à Paris.

Passant inaperçu en société, doté d'un physique ingrat pour un danseur, avec sa petite taille et ses cuisses épaisses, Nijinski entre dans la légende à une époque où la danse masculine est peu appréciée en Europe occidentale. À la perfection de sa technique, marquée par une *élévation et un *ballon exceptionnels, il joint un pouvoir de séduction et de transfiguration scénique stupéfiants qui font de lui un véritable génie de la danse à la grâce inégalée. Inspirant à Fokine ses plus beaux ballets, il marque à jamais les rôles qu'il a créés, le plus souvent aux côtés de Karsavina. Poète romantique dans les *Sylphides, Esclave sensuel dans *Schéhérazade, bondissant Arlequin dans *Carnaval, douloureux Pantin dans *Petrouchka, Fleur androgyne dans le *Spectre de la rose, il investit chaque personnage avec une justesse et une plénitude qui emporte le public dans un émerveillement sans cesse renouvelé.

Chorégraphe, Nijinski tourne le dos à la danse qui a fait sa gloire et élabore, avec l'appui de Diaghilev, des œuvres qui déconcertent le public (*Jeux), ou le scandalisent (l'*Après-midi d'un faune, le *Sacre du printemps). Lent à créer, il ne sait pas se faire comprendre des danseurs, hostiles à une danse si étrangère à leur formation, mais bénéficie de l'assistance constante de sa sœur. Écartant toute virtuosité, il sculpte les corps dans une gestuelle différente pour chaque ballet, totalement originale, et dont seuls quelques artistes (A. *Rodin, J. *Cocteau, Valentine *Hugo entre autres) apprécient la valeur artistique et la puissance d'expression. Comète au destin tragique, son personnage hante l'imaginaire de nombreux artistes, comme M. *Béjart qui en donne sa vision dans *Nijinski, clown de Dieu.

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Alice NIKITINA (1904 ou 1909-1978).

Danseuse et pédagogue russe.

Formée à l'École de danse de *Saint-Pétersbourg, elle quitte la Russie pendant la Révolution. Elle se produit à Ljubljana (1920), à Vienne avec L. *Kyasht, puis rejoint les Ballets romantiques de B. *Romanov à Berlin (1921-1922) avant d'être engagée par les *Ballets russes de *Diaghilev (1923-1929). Elle danse dans les revues Cochran à Londres (1930), en récital avec A. *Vilzak puis avec les *Ballets russes du colonel de *Basil en 1937. Chanteuse lyrique (soprano colorature) en Italie dès la fin des années 1930, elle se consacre à l'enseignement de la danse à partir de 1949.