Dictionnaire de la danse 1999Éd. 1999
D

Anne-Teresa DE KEERSMAEKER (née en 1960). (suite)

Autour de cette ligne musicale, elle incorpore des matériaux dramaturgiques tels que texte et voix, film et vidéo. Dès 1986, elle signe une mise en scène, surprenante et magistrale, d'une pièce de Heiner Müller. Dans Stella ((1990), des textes de Johann Wolfgang Goethe, de Tennessee Williams, et des dialogues d'un film d'Akira Kurosawa émaillent la chorégraphie d'éclats qui portent l'interprétation à son point d'incandescence. L'acuité de ses chorégraphies relève d'une tension permanente entre structure et émotion : la maîtrise formelle permet à Anne-Teresa De Keersmaeker de s'aventurer dans un art de danser au-dessus de l'abîme.

JMA

Autres chorégraphies. Asch (1980) ; Elena's Aria (1984) ; Mikrokosmos (1987) ; Mozart/Concert Arias (1992) ; Amor constante mas allá de la muerte (1994) ; Kinok (1994) ; Erwartung/Verklärte Nacht (1995, mus. A. *Schoenberg, m. en sc. Klaus Michael Grüber) ; Toccata (1995) ; Just Before (1997) ; Woud-Three Movements to the Music of Berg, Schoenberg and Wagner (1997).
Filmographie. Hoppla ! (1989, réal. Wolfgang Kolb) ; Ottone, Ottone/1991 (1991, réal. Walter Verdin) ; Rosa (1992, réal. Peter Greenaway).

Carmen DE LAVALLADE (née en 1932).

Danseuse et comédienne américaine.

Élevée en Californie, elle hésite entre le théâtre et la danse, avant de suivre les traces de sa cousine, J. *Collins, la première prima ballerina noire du *Metropolitan Opera. En 1949, elle obtient une bourse pour se former auprès de L. *Horton, et devient bientôt la danseuse principale de la compagnie reformée par ce dernier, où elle rencontrera A. *Ailey. Elle fait ses débuts dans le rôle-titre de *Salomé (1950), où elle est applaudie pour son lyrisme et son talent dramatique, et crée des rôles dans Brown County (1950), Indiana (1950), Another Touch of Klee (1951), *Medea (1951), Liberian Suite (1952) et *To José Clemente Orozco (1953). Elle danse dans plusieurs films, notamment dans Carmen Jones (1954) avec Ailey pour partenaire. Installée à New York, elle le retrouve à *Broadway pour la *comédie musicale House of Flowers (1954, H. *Ross). C'est à ce moment qu'elle rencontre G. *Holder, qui devient son époux. Son association scénique avec Ailey se poursuit avec succès et sa technique se renforce ; elle se produit en artiste invitée avec le *Metropolitan Opera, l'*ABT, le New York City Opera, compagnies d'Ailey et de J. *Butler. Au Proche-Orient, en 1962, elle est tête d'affiche d'une tournée de quatre mois, « Carmen de Lavallade - Alvin Ailey and Company », financée par le gouvernement américain. Pendant les années 1960, elle forme à la danse les acteurs de la Yale Drama School, tout en interprétant *Shakespeare, des classiques et du théâtre expérimental. Jusque dans les années 1990, elle se produit à l'écran et en artiste invitée.

TDF

Michèle Anne DE MEY (né en 1959).

Danseuse et chorégraphe belge.

Formée à *Mudra, elle participe aux débuts d'A.-T. *De Keersmaeker, puis crée deux duos, Balatum (1984) et Face à face (1986), évocations d'espaces intimes. Elle aborde ensuite des œuvres au format plus imposant où, à l'image de Sinfonia eroïca (1990), elle crée sur des musiques classiques à des ambiances pleines d'énergie, généreuses et gaies qui communiquent le plaisir ludique de la danse et du corps, avec un zeste de nonchalance.

JMA

Autres chorégraphies. Passé simple (1981, Cie Serge Keuten) ; Trois Danses hongroises (1989) ; Vendredi 10 mars : Angers (1989, CNDC d'Angers) ; Châteaux en Espagne (1991) ; Sonatas (1992) ; *Pulcinella (1994) ; Katamênia (1997).
Filmographie. Face à face (1987, réal. Éric Pauwels).

Thierry DE MEY (né en 1956).

Compositeur et réalisateur belge.

Élève de F. *Schirren, il aborde très tôt la composition en rapport avec la danse. Ses études cinématographiques, son intérêt pour les mathématiques et l'informatique musicale enrichissent aussi sa pensée compositionnelle qui tend vers un équilibre entre formalisme et expressivité. Son travail avec A. T. *De Keersmaeker (Rosas danst Rosas, 1983 ; Kinok, 1994) et W. *Vandekeybus (What the Body Does not Remember, 1987 ; les Porteuses de mauvaises nouvelles, 1989 ; The Weight of the Hand, 1990) explore les rapports possibles entre danse et musique, de l'indépendance à l'interpénétration.

MJS

Agnes De Mille (1905-1993).

Danseuse, chorégraphe et écrivain américaine.

Fille d'un producteur de cinéma et nièce du cinéaste Cecil B. De Mille, elle fait des études à l'université de Los Angeles. Elle commence en 1918 sa formation à la danse classique auprès de Koslov qu'elle parfait plus tard avec M. *Rambert et A. *Tudor. À partir de 1928, elle se produit en soliste à New York, puis en tournée aux États-Unis, faisant ses débuts de chorégraphe dès 1929 (The *Black Crook, Hoboken, New Jersey). Elle tourne aussi en Europe, travaille en Grande-Bretagne pour le Ballet Club (1933) et le Tudor's Dance Theatre (futur *ABT), compagnie pour laquelle elle règle la plupart de ses ballets, de Black Ritual (1940, mus. D. *Milhaud) à The Other (1992, mus. F. *Schubert). Elle fonde et dirige l'Agnes De Mille Dance Theatre (1953-1954). Le succès de Rodeo (1942) lui ouvre les portes de *Broadway, où elle chorégraphie et parfois met en scène une série de *comédies musicales à succès (*Oklahoma, 1943 ; *Carousel, 1945 ; Brigadoon et Allegro, 1947 ; Gentlemen Prefer Blondes, 1949 ; Paint Your Wagon, 1951 ; Girl in Pinktights, 1954). Elle écrit de nombreux livres sur la danse, dont quatre de souvenirs (Dance to the Piper, 1952; And Promenade Home, 1956 ; Speak to Me, Dance with Me, 1973 ; Where the Wings Grow, 1977), ainsi qu'une biographie de M. *Graham publiée en 1991. Conférencière et militante pour la défense des professions artistiques, elle est jusqu'à sa mort l'une des personnalités influentes de la vie culturelle américaine.

À l'instar de la première génération de chorégraphes classiques américains (L. *Christensen, M. *Kidd, C. *Littlefield, E. *Loring, ? ?*Page), elle puise ses sources de création dans le patrimoine de son pays ; une page d'Histoire (The *Harvest According), un fait divers (*Fall River Legend), les coutumes de l'Ouest (*Rodeo) lui inspirent ses pièces maîtresses, tandis que chants et musiques populaires font naître The Wind in the Mountains (1965) et Texas Fourth (1976). Son intérêt pour le folklore anglo-saxon s'exprime aussi dans les ballets où elle retravaille la gestuelle traditionnelle (écossaise dans The Bitter Weird, 1962 ; irlandaise dans The Informer, 1988). Possédant le sens de la mise en scène, elle signe des œuvres d'un réalisme parfois âpre, souvent humoristique (The Three Virgins and a Devil, 1941, mus. O. *Respighi ; The Four Marys, 1965 ; A Rose for Miss Emily, 1970).