Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
I

Inflation

L'inflation désigne un phénomène inscrit dans la durée et touchant la plupart des prix des biens et des services. On ne saurait donc parler d'inflation s'il se produit une hausse de prix ponctuelle, même de forte importance. Il en est de même si cette hausse des prix provoque simplement une baisse de la demande des biens concernés et ne provoque pas d'effet en chaîne sur les autres prix.

Hausse des prix généralisée et durable qui peut s'amplifier et devenir incontrôlable.

Les différentes formes d'inflation sont : l'inflation par la demande (excès de demande sur l'offre), l'inflation monétaire (croissance de la masse monétaire supérieure à la production réelle), l'inflation importée (augmentation du prix des produits primaires importés, comme le pétrole), l'inflation par les coûts (hausse des facteurs de production et/ou de commercialisation) et l'inflation budgétaire (déficit du budget de l'État financé par la création monétaire).

Le terme d'« inflation » implique donc l'existence d'un mécanisme de transmission des hausses de prix (des « relais inflationnistes ») qui fait que, de proche en proche, un grand nombre de prix de biens et de services et la plupart des revenus sont touchés. Cela se produit en particulier quand il existe des règles d'indexation des revenus sur les prix (instituées par l'État ou par des conventions collectives) prévoyant des hausses automatiques de rémunérations quand la hausse des prix devient supérieure à un taux plancher.

Le phénomène inflationniste est compatible avec la stabilité (voire la baisse) de certains prix, l'indicateur de l'inflation étant un indice qui mesure la variation du prix d'un « panier de biens » ordinairement consommés. Si le poids des biens dont le prix augmente l'emporte sur celui des biens dont le prix diminue, l'indice marquera une hausse du niveau moyen des prix, qui sera « inflationniste » si la hausse se poursuit et s'étend.

L'indice mensuel des prix à la consommation

Construit par les économistes de l'INSEE, il est constitué d'une moyenne pondérée des prix d'un panier de biens consommés par les ménages et regroupés en 265 postes de dépenses (l'alimentation représentant 22,1 % du total, l'habillement 6,9 %, le logement 11 %, les achats de mobiliers divers 8,3 %, la santé 9,5 %, les transports et télécommunications 19,3 %, les loisirs et l'enseignement 8,4 %, les autres biens et services 14,5 %).

D'autres indices mesurent l'évolution des prix de gros, des prix à la production, des prix du PIB... Ces indices servent également à corriger l'effet de la hausse des prix quand on cherche à mesurer l'évolution des revenus « réels » des agents ou celle de divers agrégats (comme le produit national brut) : ainsi, « déflater » la hausse des salaires nominaux par l'indice des prix à la consommation permet de connaître l'évolution du pouvoir d'achat des ménages.

On parlera d'inflation « rampante » ou « con- tenue » quand la hausse des prix reste faible (moins de 2 % par an), d'inflation « ouverte » quand le taux d'inflation s'élève au-dessus de ce niveau, d'inflation « galopante » quand on atteint une inflation « à deux chiffres » et d'« hyperinflation » quand l'inflation ne cesse de s'accélérer pour atteindre des niveaux incontrôlables.

Les effets de l'inflation

Le terme d'« inflation » (étymologiquement du latin inflare, « enfler ») évoque un phénomène pathologique, anormal, qu'il conviendrait d'éliminer.

Une économie « saine » serait donc une économie sans inflation, la stabilité des prix reflétant une situation sans tension particulière, sans « excès », et permettant aux différents agents de pouvoir apprécier correctement leurs revenus réels actuels et futurs.

Un des effets pervers les plus importants de l'inflation, surtout quand celle-ci est instable, est de rendre difficile le calcul économique ainsi que les prévisions en général. Les agents sont alors amenés à anticiper des taux d'inflation (le plus souvent en extrapolant les taux récents) et, de ce fait, à se faire eux-mêmes les vecteurs de l'inflation. Ainsi, lors de négociations salariales, les syndicats intègrent dans leurs revendications la perte de pouvoir d'achat liée à la dépréciation attendue des salaires nominaux, et les prêteurs majorent leurs taux d'intérêt. Les anticipations inflationnistes tendent donc à devenir « auto-réalisatrices ».

Mais ce processus, qui pourrait être « neutre » si tous les prix et tous les revenus augmentaient dans la même proportion, s'accompagne le plus souvent d'une distorsion des prix relatifs et d'une croissance inégale des revenus. En effet, les prix des différents biens et services n'augmentent jamais au même rythme, pour des raisons tenant soit aux mécanismes de transmission de l'inflation, soit au comportement des agents, ou aux différences de gains de productivité. De plus, les revenus nominaux et réels des différentes catégories sociales n'évoluent pas non plus de la même façon, suivant leur rôle dans l'économie, leur capacité de négociation et la nature même de leurs revenus. Ainsi, on considère que les « actifs » se protègent mieux de l'inflation que les retraités et les pensionnés, et que l'inflation qui s'accélère bénéficie aux emprunteurs, dont le poids de la dette s'allège au détriment des prêteurs.

L'inflation exerce un autre effet négatif sur l'économie d'un pays quand son taux s'écarte de celui de ses concurrents. Si ce « différentiel d'inflation» devient important, il détériore en effet la compétitivité-prix des produits des pays les plus inflationnistes, autant à l'exportation que sur leur marché intérieur. La détérioration de la balance commerciale qui en résulte déprécie la monnaie du pays déficitaire, ce qui enchérit le coût de ses importations. Cette « inflation importée » accentue encore la hausse de ses prix intérieurs. C'est la raison pour laquelle la plupart des grands pays industriels se sont engagés après les chocs pétroliers des années 1973 et 1979 dans des politiques de rigueur, dites de « désinflation compé-titive », pour s'aligner sur les taux d'inflation des pays les moins inflationnistes.