Aujourd'hui quatrième puissance industrielle du monde, la France fut partie prenante des grandes transformations économiques et sociales qu'ont connues les pays européens depuis mille ans. Elle suivit de près la Grande-Bretagne, engagée à la fin du xviiie siècle dans la révolution industrielle, et joua un rôle majeur dans les innovations du xixe siècle. Après la Seconde Guerre mondiale, la France sut renouveler son appareil industriel et conserver son rôle pionnier dans divers domaines de haute technologie (transport, aéronautique, télécommunications).
Comparée aux autres grands pays développés, la France possède deux originalités majeures. D'une part, son développement fut plus lent, mais aussi plus régulier. D'autre part, elle combina plus qu'ailleurs l'initiative privée et l'interventionnisme de l'État, comme à l'époque de Colbert ou de Napoléon et à celle des grands plans de développement économique qui suivirent la Seconde Guerre mondiale.
Du féodalisme à la France « féodo-marchande » (xve-xviiie siècle)
La France connut, du xe au xiiie siècle, un essor économique comparable à celui des autres royaumes européens, reposant sur un accroissement de la production agricole, un échange intense entre les villes et les campagnes, et des innovations techniques augmentant la productivité. L'augmentation du surplus agricole permit la croissance de la population : comptant de 5 à 6 millions d'habitants aux environs de l'an mille, elle passa à une vingtaine de millions au début du xive siècle.
La France (comme le reste de l'Europe) traversa ensuite une grave crise durant le xive siècle (disette, peste, soulèvements populaires...), aggravée par les effets de la guerre de Cent Ans (1340-1453). Pourtant, dès la fin du règne de Charles VII (1422-1461), la reconquête du royaume et les réformes entreprises par Jacques Cur contribuèrent à redresser la situation économique du pays. Louis XI (1461-1483) mena ensuite une politique « intervention-niste » en améliorant les voies de communication, en attirant les marchands étrangers, en développant la production minière et en tentant de créer une industrie de la soie à Lyon et à Tours. Pour mener à bien cette politique, il développa la fiscalité royale (limitée auparavant au domaine royal proprement dit), objet de multiples oppositions et de soulèvements.
Au xvie siècle, l'économie française connut, comme les autres pays européens, de graves difficultés, dues au plafonnement de la production agricole et à la hausse des prix (provoquée par l'afflux d'or et d'argent arrivant d'Amérique et circulant dans une Europe en guerre).
La situation s'améliora durant le règne d'Henri IV (1589-1610), en raison du retour de la paix civile et extérieure, et de l'action énergique du souverain s'appuyant sur des conseillers avisés et efficaces : Sully allégea les impôts frappant les paysans, rénova les voies de communication et passa commande aux usines d'armement ; Barthélemy de Laffemas favorisa l'essor de l'industrie textile, attira les artisans étrangers et protégea la production nationale ; Olivier de Serres expérimenta de nouvelles méthodes d'assolement et introduisit de nouvelles espèces végétales (houblon, maïs, mûrier...).
Mais le retour de la guerre et des lourds impôts durant les règnes de Louis XIII (1610-1643) et de Louis XIV (1643-1715) s'accompagna d'une nouvelle stagnation de l'économie française, qui dura jusqu'aux années 1720. L'inflation avait certes disparu, mais les prix fluctuaient au gré des aléas du climat et des guerres, provoquant pénuries et disettes.
La politique mercantiliste menée par Colbert (entre 1661 et 1683) avait pourtant permis un essor important des manufactures et du commerce extérieur français, mais les durs épisodes guerriers des années 1690-1714 détruisirent en partie son œuvre, d'autant que l'agriculture était délaissée et que de terribles hivers éprouvaient la population et provoquaient un recul démographique.
La situation économique s'améliora durant le xviiie siècle grâce au retour de la paix, à des conditions climatiques plus clémentes et à un essor agricole et industriel. Cependant, les mauvaises récoltes du milieu des années 1780, l'insoluble problème du déficit des finances royales et la concurrence commerciale anglaise conduisirent à la révolution de 1789.
Les effets économiques de la révolution de 1789 et de l'ère napoléonienne (1799-1814)
Durant la nuit du 4 août 1789 furent abolis les « droits féodaux per- sonnels », qui pesaient encore sur une partie de la paysannerie. Le 26 août fut proclamée la Déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen, qui supprimait les inégalités de statut juridique et affirmait le caractère « sacré et inviolable » de la propriété, garantissant la liberté individuelle. Fin 1789, les terres d'Église furent « mises à la disposition de la nation » et vendues aux porteurs d'assignats, nouveaux titres émis par l'Assemblée nationale.
Au printemps de 1791 furent promulguées les lois d'Allarde et de Le Chapelier, fondatrices du libéralisme économique français : elles supprimaient les corporations, interdisaient les coalitions et instituaient la totale liberté du commerce.
En 1800, Napoléon Bonaparte créa la Banque de France et, en 1803, le franc germinal, défini par un poids d'or et d'argent qui restera quasiment inchangé jusqu'en 1914. Il élabora le droit écrit français : le Code civil fut promulgué en 1804, le Code de commerce en 1807 et le Code pénal en 1810. Il obligea les ouvriers à posséder un livret portant les observations patronales et mit en place des sanctions pénales pour fait de grèves.
C'est également durant cette période que l'on créa les bourses et les chambres de commerce, ainsi que le cadastre permettant de mieux connaître les patrimoines fonciers, principales sources des impôts directs (la fiscalité sur l'ensemble des revenus ne sera instituée qu'à la veille de la Première Guerre mondiale).