Illusion monétaire
Comportement irrationnel conduisant un agent à confondre la valeur nominale d'un montant monétaire (salaire, encaisse, loyer) avec son pouvoir d'achat dépendant de l'évolution des prix.
Il y a illusion monétaire quand on préfère avoir un salaire de 10 000 F plutôt que de 5 000 F, même avec un niveau des prix deux fois plus élevé.
Les économistes pour lesquels la monnaie est neutre sur l'économie supposent l'absence d'illusion moné-taire : les variations de valeur nominale affectant simultanément tous les prix (salaires et produits) sont sans effet sur les choix des agents. Un doublement du salaire nominal (salaire à prix courant, par opposition à salaire réel, salaire à prix constant) ne pousse pas les salariés à travailler plus si les prix doublent aussi.
Les agents économiques peuvent néanmoins avoir du mal à juger dans quelle mesure l'augmentation de leur revenu est supérieure ou inférieure à celle de tous les autres prix, ce qui pose le problème de l'imperfection de l'information
P. L.
➙ Dichotomie, encaisse, école néoclassique, neutralité, rationalité
Immigration
Lois sur l'immigration, manifestations de « sans-papiers », difficultés d'intégration, afflux de réfugiés…, l'actualité nous renvoie quotidiennement des réalités présentées comme liées au phénomène de l'immigration, au risque de masquer le sens véritable de ce mot. Il désigne simplement le fait pour des personnes de quitter le pays où ils sont nés pour s'installer ailleurs, le plus souvent afin d'améliorer leur situation économique, de fuir l'oppression politique, voire la guerre. Après avoir « émigré » de leur pays d'origine, ces personnes deviennent des « immigrés » dans celui qui les accueille.
Depuis plus d'un siècle, la France est devenue l'un des principaux pays d'immigration du monde. Aujourd'hui, elle compte 4,1 millions d'immigrés sur une population de 56,6 millions d'habitants, soit 7,3 % (recensement de 1990).
Le parcours individuel des immigrés et de leurs enfants tresse autant de liens entre la France et les pays d'origine. Enjeu politique et social en France, l'immigration est donc avant tout un phénomène inter- national : les flux de populations migrantes traduisent les inégalités économiques mondiales et les soubresauts politiques de la planète.
Cette intense circulation des hommes génère des relations humaines (mariages mixtes, musique, etc.) et se traduit aussi par d'importants transferts financiers, car les immigrés adressent à leurs familles restées au pays une partie de leur salaire, au moins au début de leur séjour. Ces fonds, s'ils sont orientés vers des dépenses productives créatrices d'activité pour les autochtones, peuvent aider au développement des pays pauvres.
Un phénomène séculaire lié à l'histoire et à l'activité économique du pays
La France, par sa situation géographique de carrefour en Europe, se trouve plus que jamais au cœur de ce système migratoire. Depuis la nuit des temps, le territoire qui correspond à l'Hexagone actuel se caractérise par l'accumulation et le mélange de populations venues du nord, de l'est et du sud. Mais la France n'est devenue un pays d'immigration au sens moderne du mot que depuis le milieu du xixe siècle, lorsque la révolution industrielle a provoqué un intense besoin de main-d'œuvre non qualifiée. Depuis lors, économie et immigration n'ont cessé d'être intimement liées : aux périodes de prospérité, favorables à l'afflux d'étrangers, ont succédé des années de crise, propices aux accès de xénophobie et aux politiques restreignant l'immigration.
Jusqu'à la Première Guerre mondiale (1914-1918), les immigrés viennent presque uniquement des pays immédiatement voisins de la France (Italie, Belgique, Allemagne, Espagne, Suisse). Mais l'appel à la main-d'œuvre et aux soldats coloniaux (Maghrébins, Africains et Indochinois) lors de la guerre de 1914-1918 donne le signal de migrations plus lointaines, qui viennent limiter les conséquences de la saignée humaine. Pendant l'entre-deux-guerres, Italiens, Polonais et Russes sont appelés en renfort pour reconstruire le pays ou fuient vers la France des régimes politiques honnis. La crise des années 1930 déclenche une vague de xénophobie et de racisme qui se traduit par le rapatriement forcé de nombreux étrangers et culmine sous l'occupation nazie.
Stoppée par la guerre, l'immigration reprend de plus belle durant les trente années de rapide expansion économique qui suivent la Libération (les Trente Glorieuses). Avec l'arrivée de 4 millions de personnes, ce sera la vague la plus massive qu'ait connue la France. Pas un chantier, pas une usine où ils ne sont appelés pour moderniser le pays, prendre la relève des Français pour les tâches les plus pénibles. Nul problème de papiers à l'époque : les besoins de l'industrie sont si pressants que la régularisation s'effectue automatiquement dès l'arrivée en France. Aux Européens (Italiens, Espagnols, Polonais) se joignent bientôt les Algériens, puis les Marocains et les Tunisiens (à partir de la fin des années 1950), puis les Portugais (années 1970). Les Africains et les Asiatiques comptent parmi les derniers installés.
Un débat où la réalité économique et sociale prime sur les principes
Le début de la crise économique provoque, en 1974, la décision de stopper l'immigration de travailleurs en France. Les arrivées sont freinées. Limitées, elles se poursuivent surtout par le biais du regroupement familial, processus qui donne droit aux travailleurs déjà installés de faire venir femme et enfants. Alors que les immigrés étaient surtout des travailleurs seuls jusqu'aux années 1970, l'arrivée des familles va transformer profondément leur image et leur fonction dans la société. Depuis les années 1980, les immigrés ne sont plus seulement considérés comme une force de travail provisoire, d'autant qu'ils comptent parmi les premières victimes du chômage (20 % en 1995 contre 12 % chez les Français). Ils forment une nouvelle composante de la population, plus ou moins bien acceptée.