chanson

(latin cantionem, accusatif de cantio, -onis, action de chanter)

Thibaut IV le Chansonnier, Chansons notées
Thibaut IV le Chansonnier, Chansons notées

Les premières formes de chansons

Une part importante des textes du Moyen Âge consiste en recueils de chansons dont on distingue différentes variétés : les chansons courtoises, constituant le répertoire essentiel des trouvères et des troubadours ; les chansons d'histoire ; les chansons de croisade. On distingue encore les chansons d'après le sujet (par exemple, la mal mariée) ou la fonction (chanson à boire ou à danser).

L'esthétique d'un genre aussi vaste, qui va de la chanson de geste à la chanson religieuse, relève d'abord de l'art musical. Le divorce de la poésie et de la musique prévaut à partir des xive et xve s. et se précise sous la Renaissance. La chanson devient genre populaire et la poésie, genre noble.

Pour en savoir plus, voir l'article Littérature et amour courtois.

L'essor d'un genre à part entière

La verve satirique et licencieuse se développe à l'époque de la Fronde. Sous Louis XIV, les bergeries ou vaudevilles se mêlent aux chansons satiriques, galantes et bachiques. Elles ont pour auteurs Benserade, Voiture ou Boursault, et sont signées par les meilleurs musiciens.

Aux xviiie et xixe s., la chanson parvient à son épanouissement grâce à des sociétés : le Caveau, la Société d'Apollon, les Enfants de la Lyre. C'est l'époque, entre autres, de Piron, de Crébillon père et fils, de Favart, d'Helvétius, du Gentil Bernard (Pierre Joseph Bernard). Les romances sont signées  J.-J. Rousseau, Florian, Marmontel. Philidor, Rameau, Monsigny, Grétry, Piccinni les mettent en musique.

Avec la Révolution, la chanson se fait violente, puis lyrique : le Chant du départ, la Marseillaise. Le Directoire, le Consulat et l'Empire amènent un renouveau de la chanson classique (Désaugiers, Armand Gouffé).  V. Hugo,  A. de Musset,  T. Gautier comptent parmi les auteurs de chansons, à la tête desquels se trouvent Béranger, Nadaud ou encore J.-B. Clément.

Du café-concert au music-hall

Vers 1846 est créé le café-concert, dont les étoiles sont Paulus, Y. Guilbert, Polin, Mayol. Le chant patriotique, avec P. Déroulède, obtient un vif succès. En 1882, la chanson littéraire renaît dans le cabaret du Chat-Noir, créé par Rodolphe Salis. D'autres cabarets artistiques, comme celui d'A. Bruant, ouvrent à Montmartre et au Quartier latin. La chanson d'actualité prend le pas sur les autres genres.

Après la Première Guerre mondiale, le café-concert laisse la place au music-hall. Le Casino de Paris, qui a été reconstruit par Léon Volterra, connaît son âge d'or avec Mistinguett et M. Chevalier, puis avec J. Baker.

Les traditions d'après-guerre

Les lendemains de la guerre, c'est aussi l'époque où les chanteuses réalistes triomphent, telles Fréhel et Damia, Lys Gauty et Marie Dubas. Dans les années 1930, grâce à l'apparition de la radio et à l'essor du microsillon, la chanson devient plus populaire encore. Tandis que Ray Ventura et ses Collégiens font danser la France entière aux rythmes du swing, Mireille et Jean Nohain rompent avec la chanson conventionnelle – sous l'influence américaine. Jean Sablon crée la surprise en chantant avec un micro.

Dès la seconde moitié des années 1930, deux noms illustrent le prestige artistique acquis par la chanson : ceux de C. Trenet, auteur-compositeur qui va devenir le « Fou chantant », et É. Piaf, chanteuse des faubourgs touchée par la grâce.

L'apogée des années 1950 et 1960

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, et tout au long des années 1950, une nouvelle génération chante la liberté retrouvée et l'esprit nouveau qui souffle sur le pays. Après Y. Montand et Francis Lemarque, c'est au tour de G. Brassens, de J. Brel, de L. Ferré, de G. Bécaud, de C. Nougaro, de C. Aznavour, de J. Ferrat de renouveler en profondeur le langage de la chanson française. Venus des cabarets parisiens, J. Gréco, Catherine Sauvage, les Frères Jacques, les Compagnons de la chanson, G. Béart, puis Barbara connaissent à leur tour la consécration, tout comme S. Gainsbourg, déjà au sommet de son art en 1958.

Gainsbourg, d'ailleurs, assure parfaitement le lien entre la chanson à texte traditionnelle et la nouvelle vague des années 1960 : ainsi, après la déferlante rock'n'roll incarnée par J. Hallyday et E. Mitchell, la génération yé-yé (C. François, Sylvie Vartan, France Gall, Françoise Hardy), puis la génération pop (J. Dutronc, M. Polnareff, Antoine, Christophe, Nino Ferrer, Michel Delpech) sont l'une et l'autre redevables à Gainsbourg, qui, paradoxalement, considérait la chanson « comme un art mineur ».

Les nouvelles sensibilités

Après les soubresauts de mai 1968, la chanson française se partage en deux grands courants. Il y a, d'un côté, les artistes populaires, qui ont le soutien des médias (Adamo, Joe Dassin, Mike Brant, Michel Sardou, Serge Lama, Gérard Lenorman, P. Perret) ; de l'autre, des interprètes, le plus souvent aussi auteurs et compositeurs, qui portent les espoirs et la révolte de la jeune génération (J. Clerc, Gérard Palaprat, Michel Fugain, Maxime Le Forestier, Yves Simon, Véronique Sanson). Cette seconde « école », à laquelle se rattachent aussi M. Berger, A. Souchon, Laurent Voulzy, Michel Jonasz, William Sheller, permet à la chanson de franchir un cap. Ainsi, dans les années 1980, qui sont marquées par la légalisation des radios libres et par la naissance de chaînes musicales, la scène française a gagné en maturité. Renaud, J.-J. Goldman, A. Bashung, Francis Cabrel, Alain Chamfort, Daniel Balavoine y ont également pris toute leur part, de la même façon que Jacques Higelin, Téléphone, Indochine et les Rita Mitsouko ont permis au rock français de sortir de son ghetto.

Depuis les années 1990, la chanson française continue d'élargir son influence. Le talent de Goldman, de par sa collaboration avec C. Dion, est reconnu dans le monde entier. Il en est de même, grâce à leurs prouesses scéniques et vocales, pour Mylène Farmer ou pour Patricia Kaas. Parallèlement, une nouvelle génération a éclos et a confirmé une démarche authentiquement originale – originale dans le sens où, après Gainsbourg, elle a confirmé que la langue française s'adaptait parfaitement aux rythmes de la pop anglo-saxonne. On trouve parmi elle Stephan Eicher, Étienne Daho, Vanessa Paradis, Axelle Red, Zazie, Pascal Obispo, Gérald De Palmas, auxquels il faut ajouter MC Solaar, qui enrichit le rap d'une bonne dose de poésie. Dans une veine plus intimiste, la relève de la chanson à texte est aujourd'hui assurée par des personnalités aussi diverses que Miossec, M, Dominique A, Arthur H, Yann Tiersen ou Keren Ann.

Depuis les années 2000, des artistes comme Christine and the Queens, qui chantent aussi bien en français qu'en anglais, mènent une carrière internationale, toujours à la recherche d'une esthétique musicale innovante.

Par l'influence des grandes productions américaines, et notamment le style R'n'B, on assiste à une contamination culturelle et musicale en France et plus largement en Europe, qui occulte la pluralité des genres musicaux.

La chanson québécoise

Pour des raisons qui relèvent à la fois de l'histoire et de la langue, la chanson québécoise a trouvé son public en France. F. Leclerc, dès les années 1950, a joué à cet égard un rôle pionnier. G. Vigneault et R. Charlebois, dans les années 1960, puis, au cours de la décennie suivante, la « nébuleuse » Starmania – L. Plamondon (parolier de la comédie musicale de ce nom composée par M. Berger) et les chanteuses D. Dufresne et Fabienne Thibault – ont largement contribué à l'heureuse réputation dont jouit la scène musicale québécoise. Aujourd'hui, la relève est assurée par C. Dion, qui triomphe partout dans monde, mais aussi par Lara Fabian (naturalisée canadienne), Richard Desjardins, Garou, Isabelle Boulay et Lynda Lemay.

Les chansons populaires

Voir art populaire, partie musique.

Alain Bashung
Alain Bashung
Albert Vaguet, le Temps des cerises, 1909
Albert Vaguet, le Temps des cerises, 1909
Céline Dion
Céline Dion
Ferdinand Gabin, Pauvre Ouvrier, vers 1896
Ferdinand Gabin, Pauvre Ouvrier, vers 1896
Henri de Toulouse-Lautrec, Aristide Bruant dans son cabaret
Henri de Toulouse-Lautrec, Aristide Bruant dans son cabaret
Isidore Pils, Rouget de Lisle chantant la Marseillaise pour la première fois
Isidore Pils, Rouget de Lisle chantant la Marseillaise pour la première fois
Jacques Dutronc
Jacques Dutronc
Marie Dubas, Son voile qui volait, 1932
Marie Dubas, Son voile qui volait, 1932
Ninon Vallin, Plaisir d'amour, 1927
Ninon Vallin, Plaisir d'amour, 1927
Thibaut IV le Chansonnier, Chansons notées
Thibaut IV le Chansonnier, Chansons notées
Yves Montand
Yves Montand
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  • deuxième moitié du XVIe s. R. de Lassus compose de nombreux motets et chansons.
  • vers 1760 Plaisir d'amour, chanson de Florian sur une musique de J.-P. Martini.
  • 1828 Ma grand-mère, chanson de P. J. Béranger.
  • 1860 La Garonne, chanson de G. Nadaud.
  • 1867 Le Temps des cerises, chanson de J.-B. Clément, sur une musique de A. Renard. Elle sera en 1871 un des chants de la Commune.
  • 1884 Mad'moiselle, écoutez-moi donc !, chanson de A. Bruant et J. Jouy.
  • 1898 La Paimpolaise, chanson de T. Botrel et É. Feautrier.
  • 1908 Gloire au 17e !, chanson de Montéhus.
  • 1909 Rose blanche (Rue Saint-Vincent), chanson de A. Bruant.
  • 1914 Sous les ponts de Paris, chanson de J. Rodor et V. Scotto.
  • 1920 Composition de la chanson Mon homme, interprétée par Mistinguett.
  • 1925 Valentine, chanson de A. Willemetz et H. Christiné, interprétée par M. Chevalier.
  • 1930 Parlez-moi d'amour, chanson de J. Lenoir.
  • 1930 L'Ange bleu, film de J. von Sternberg avec M. Dietrich, d'après H. Mann. L'actrice y interpréte la chanson Lili Marlène.
  • 1930 J'ai deux amours, chanson de G. Koger et V. Scotto, interprétée par J. Baker.
  • 1935 Tino Rossi interprète Marinella.
  • 1938 Y a de la joie, chanson de C. Trénet et M. Emer.
  • 1945 La Mer, chanson de C. Trenet.
  • 1946 Tino Rossi interprète Petit Papa Noël.
  • 1947 Y. Montand interprète les Feuilles mortes de J. Prévert et J. Kosma.
  • 1947 La Vie en rose, chanson de É. Piaf.
  • 1951 Moi, mes souliers, chanson de F. Leclerc.
  • 1954 L. Ferré compose un oratorio sur la Chanson du Mal-Aimé d'Apollinaire.
  • 1954 Chanson pour l'Auvergnat, de G. Brassens.
  • 1956 Quand les hommes vivront d'amour, chanson de R. Lévesque, interprétée par F. Leclerc, G. Vigneault et R. Charlebois en 1974, lors d'un festival.
  • 1956 Lady Sings The Blues, chanson interprétée par B. Holiday.
  • 1956 Blueberry Hill, chanson de F. Domino.
  • 1956 J. Brel chante Quand on n'a que l'amour.
  • 1957 La chanson de G. et I. Gershwin,Summertime, est interprétée par E. Fitzgerald.
  • 1958 Didn't it rain, gospel de Mahalia Jackson.
  • 1959 What I'd Say, chanson de R. Charles.
  • 1960 Ma môme, chanson de J. Ferrat.
  • 1961 Retiens la nuit, chanson de J. Hallyday, composée par C. Aznavour.
  • 1961 Non, je ne regrette rien, chanson de M. Vaucaire et C. Dumont, interprétée par É. Piaf.
  • 1964 The Sounds of Silence, chanson de P. Simon et A. Garfunkel.
  • 1964 I Get Around, chanson des Beach Boys.
  • 1964 Que c'est triste Venise, chanson de C. Aznavour.
  • 1965 Satisfaction, chanson des Rolling Stones.
  • 1965 La Montagne, chanson de J. Ferrat.
  • 1966 Les Ruines (Al Atlal), album interprété par O. Kalsoum (poèmes de I. Nagy mis en musique par R. al Sanbati).
  • 1966 Strangers in The Night, chanson interprétée par F. Sinatra.
  • 1966 Hey Joe, chanson de J. Hendrix.
  • 1966 Suzanne, chanson de L. Cohen.
  • 1967 Respect, chanson de A. Franklin.
  • 1967 The Dock of The Bay, chanson de O. Redding.
  • 1967 Light My Fire, chanson de The Doors.
  • 1967 G. Brassens reçoit le grand prix de poésie de l'Académie française.
  • 1968 Lucille, chanson de B. B. King.
  • 1968 Il est cinq heures, Paris s'éveille, chanson de J. Dutronc.
  • 1969 Y. Montand interprète la Bicyclette.
  • 1969 L. Ferré interprète C'est extra.
  • 1969 Je t'aime moi non plus, de S. Gainsbourg.
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