rap

(argot américain don't give me this rap, sors pas ton baratin)

Style de musique soutenant un chant aux paroles, improvisées ou non, scandées sur un rythme très martelé.

Les origines

          

RAP

1950

Influences :
Jazz, Be Bop, Scat, Radio Disc Jockeys

1960

Soul, rhythm and blues :
James Brown

1970

Poésie militante :
Last Poets
 
Funk, P-Funk :
George Clinton, Bootsy Collins

1980

Rap "old school" :
Grandmaster Flash, Kurtis Blow, Afrika Bambaataa

Côte Est

Côte Ouest/Texas

Run-DMC
Schoolly D (Philadelphie)
 
Label Def Jam :
Public Enemy
LL Cool J
Beastie Boys
Slick Rick
Rap Cool :
De La Soul
Jungle Brothers
A Tribe Called Ouest

Ice-T
Kid Frost
 
Geto Boys (Houston)
NWA (Ice Cube, Eazy-E, Dr Dre)

1990

Jazz Rap :
Roots (Philadelphie)
Gang Starr
US 3
Dream Warriors
Mobb Deep :
Wu-Tang Clan
U-God
Gangsta Rap :
Snoop
Ol' Dirty Bastard
Prince Rakeem
Too Short
MC Hammer (Oakland)
Doggy Dogg
2 Pac
G-Funk :
Domino
Warriors

 

Né en 1975 dans les quartiers new-yorkais du Bronx, du Queens ou de Brooklyn lors des fêtes de quartier (black parties) ou de soirées, le rap puise ses racines dans la culture parlée afro-américaine, avec les « dozens », ces joutes verbales pratiquées dans les rues (ou les prisons), les comiques noirs américains (Rudy Ray Moore, Richard Pryor), ainsi que les pionniers Last Poets, qui, dès 1970, pratiquent une poésie urbaine militante sur fond de percussions.

Les premiers DJ du mouvement rap apparaissent à la fin des années 1970. Le Jamaïquain Kool Herc ou Grandmaster Flash sont parmi ceux qui, les premiers, ont familiarisé le public à cette façon de concevoir la musique, en mixant sur deux platines des disques que l'on scratche et qui servent de base rythmique au rapper.

Les premiers rappers

Le trio Sugarhill Gang, poulains de la productrice Sylvia Robinson, sont les premiers à être homologués sur vinyle en 1979. Dès 1980, la première vague des rappers déferle : influencés par le doo-wop (Force MD's) ou le funk (Teacherons Three, West Street Mob), ces pionniers parlent le plus souvent d'eux-mêmes, et les paroles des raps évoquent les fantasmes de luxe des rappers. En 1982, The Message de Grandmaster Flash & The Furious Five lance le rap social, racontant des histoires noires de pauvreté au quotidien.

En 1984, le premier album de Run DMC et, surtout, le 45 tours Rock Box, marquent un tournant dans l'histoire du hip-hop (nom de la culture de rue dont le rap est une composante aux côtés de la danse, du graffiti et de l'art des platines). Le rap abandonne ses oripeaux funky pour redevenir une musique brute, à base de machines et de scratch. Alors que Sylvia Robinson, patronne de Sugarhill Records, employait un groupe de studio pour accompagner les rappers (remplaçant leur habituel DJ par le bassiste Doug Wimbish, le batteur Keith LeBlanc et le guitariste Skip McDonald, alias le Sugarhill Band), Run DMC a pratiquement abandonné l'orchestration traditionnelle. Afrika Bambaataa et Soulsonic Force, Jonzun Crew, Planet Patrol, Newcleus et de nombreux autres groupes de rap explorent alors les possibilités de l'électronique et de la technologie.

Bambaataa fait figure de précurseur en reprenant un thème du groupe allemand Kraftwerk pour l'historique Planet Rock de 1982. En 1986, l'association de Run DMC avec Aerosmith scelle le mariage provisoire entre rap et hard-rock avec la reprise de Walk This Way. En 1991, c'est Public Enemy qui s'alliera à Anthrax pour une tournée et un disque en commun.

Le rap se diversifie

Dans la seconde moitié des années 1980, il y a les Fatboys, qui font du rap comique pour un public enfantin, les rappers classés X comme Blowfly ou Two Live Crew, les rappers pop comme Tone-Loc, qui vend cinq millions de Wild Thing, single sur fond de guitare hard (emprunté aux Troggs). Il y a aussi les gangsters de la côte pacifique. Après quelques années de suprématie new-yorkaise, le rap passe à l'ouest avec l'apparition des Californiens comme Ice-T, 7A3, Digital Underground, Boo-Yaa Tribe- groupe de six frères des îles Samoa et ex-membres des gangs de Los Angeles- ou encore NWA (Niggers With Attitude), venus du ghetto de South Central, infesté par les gangs meurtriers. Sur le modèle de NWA, des dizaines de rappers apparaissent à Los Angeles : des Chicanos (Kid Frost, qui glorifie « La Raza », la race mexicaine), des Cubains (Mellow Man Ace, qui rappe en espagnol et en anglais), tous racontant les mêmes histoires terrifiantes de guerre des gangs et de violence urbaine. En 1989, les premiers rappers français sortent de l'anonymat. Reproduisant le phénomène américain, des jeunes banlieusards de tous horizons s'inventent une culture et racontent leur quotidien sur fond d'instrumentaux empruntés au funk américain. Le phénomène rap touche l'ensemble de la planète, et des groupes apparaissent en Afrique du Sud (Prophets Of Da City), au Sénégal (Positive Black Soul, qui a sorti son premier album international, Salaam, sur le label Island), en Allemagne (Die Fantastischen Vier), en Angleterre (London Posse, Gunshot) et en Italie (Sangue Misto, Articolo 31).

Du rejet à l'intégration

Objet de violentes attaques venues de la Moral Majority (notamment de la militante noire des droits civiques Dolores Tucker, qui mène une croisade anti-gangsta'rap avec le sénateur républicain Bob Dole), le rap américain n'a cessé de se radicaliser, se voyant apposer pour l'occasion une marque d'infamie (ou d'authenticité, c'est selon) avec le sticker Parental Advisory/Explicit Lyrics (« avertissement aux parents : paroles explicites ») créée à la fin des années 1980 sous l'impulsion de Tipper Gore, femme du futur vice-président des États-Unis et pasionaria du PMRC, un organisme prônant le retour aux valeurs morales. Le « CNN de la rue », comme le décrit Chuck-D, est passé sous le contrôle de multinationales.

En devenant une industrie, le rap a perdu une part de son autonomie, mais a imposé ses canons à l'industrie du disque. Les producteurs de rap tels que Pete Rock, Prince Rakeem (du fameux Wu-Tang Clan, ce groupe de Staten Island qui a redéfini le genre), Dr Dre (producteur de Snoop Doggy Dog) ou Teddy Riley (qui a toujours eu une approche hip-hop, même s'il a surtout été catalogué new jack swing) ont amené dans les grands studios leurs recettes de bricoleurs des platines et en ont fait profiter le monde entier. Malgré une course au profit qui a engendré une génération de rappers sans talent particulier, uniquement préoccupés par les passages radio, le rap demeure la plus puissante voix de la communauté noire.

Comme le disait KRS-One en 1990 : « Le rap est la dernière forme d'expression du peuple noir. Le peuple noir a créé toutes les musiques que vous entendez dans la rue, elles ont toutes des racines africaines. La musique rap est un engin révolutionnaire pour changer les fondements racistes de la société américaine. »

Le rap français

Dynamisme et créativité

Début 1996, l'hebdomadaire américain Newsweek consacrait un long reportage au « seul art qui compte en France : l'art de la rue » et estimait que « la langue française s'adapte très bien au rap, mieux qu'au rock ». Même si ce compliment avait pour autre effet de dévaloriser le reste de la culture française, force est de reconnaître que le diagnostic était juste quant à l'art de la rue : le rap français se singularise par son dynamisme et sa créativité, allant jusqu'à intéresser les publics étrangers.

Une nouvelle forme d'expression

Dès le début des années 1980, un certain nombre d'artistes et d'animateurs de radio s'intéressent à cette nouvelle forme d'expression et commencent à rapper des textes sur les ondes. En 1983, Gérard Presgurvic écrit pour le groupe Chagrin d'amour l'amorce d'un premier rap à la française, Chacun fait c'qui lui plaît, qui rencontre un très grand succès. Sur Radio Nova, le DJ Dee Nasty encourage toutes les formes d'expression de la culture hip-hop naissante et, en 1984, TF1 accueille- brièvement- une émission intitulée Hip Hop. En 1990 sort l'album Rapattitude, une compilation regroupant une dizaine de groupes (NTM, Assassin, Tonton David, etc.) représentatifs de la scène rap et raggamuffin hexagonale, tandis que sur M6 Olivier Cachin crée et présente (jusqu'en 1993) l'émission Rapline. En 1990 également, MC Solaar sort son premier titre Bouge de là, aussitôt plébiscité et bientôt suivi de l'énorme impact de son album Qui sème le vent récolte le tempo, et NTM étonne par sa violence hard-core comme par sa critique virulente des institutions. Toutefois, la banlieue parisienne (Saint-Denis pour NTM, Villeneuve-Saint-Georges pour MC Solaar, Sarcelles pour Ministère A.M.E.R., Montfermeil pour Démocrates D, etc.) n'est pas le seul creuset du rap français. Celui-ci se pratique aussi, et avec talent, à Marseille avec IAM ou Massilia Sound System, à Toulouse avec les rappers occitans de Fabulous Trobadors et dans bien d'autres villes et banlieues de province.

Symptôme

Collé à l'exemple américain, le rap made in France sait toutefois trouver sa langue originelle, par le succès auprès du grand public de Doc Gyneco, la préciosité de MC Solaar, la « tchatche » ensoleillée d'IAM ou des Trobadors et le verlan des autres. Il est tout à la fois l'expression d'une richesse et d'une crise, celles du modèle d'intégration républicaine à la française.

Cypress Hill, DJ Muggs, octobre 1995
Cypress Hill, DJ Muggs, octobre 1995
Ministère Amer, Kenzy, octobre 1995, interview au téléphone
Ministère Amer, Kenzy, octobre 1995, interview au téléphone
  • 2000 Le chanteur de rap américain Eminem, dont l'album The Marshall Mathers se vend à 2 millions d'exemplaires en une semaine, apporte au rap, culture urbaine, la reconnaissance internationale.