minéralogie
(de minéral)
Branche de la géologie qui vise à recenser et à définir les espèces minérales, en étudiant leurs propriétés physiques et chimiques, leurs conditions de formation et d'apparition.
Comme de nombreux domaines des sciences de la Terre, la minéralogie est une science pluridisciplinaire qui associe des concepts et des techniques de chimie, de physique du solide et de métallurgie. Par conséquent, l’histoire de la minéralogie est étroitement liée à celle de ces trois domaines.
1. Historique de la minéralogie
L’étude et les collections de minéraux sont des activités très anciennes qui remontent à l’Âge de pierre (→ préhistoire) il y a au moins 3,3 millions d’années, date des premiers outils en pierre taillée retrouvés sur le site archéologique de Lomekwi au Kenya. Ces savoirs et savoir-faire se sont étendus par la suite aux métaux (fer, cuivre, or, etc.) à l’Âge de fer, puis ont traversé les millénaires et les civilisations à travers l’ensemble du globe.
Parmi les Grecs de l’Antiquité, Aristote est l’un des premiers à ébaucher une classification des minéraux en deux classes : les métaux et les minéraux non métalliques.
De leur côté, les naturalistes arabes, et en particulier le philosophe et médecin Avicenne, classent les minéraux en quatre groupes : pierres et gemmes, minerais, combustibles, et sels.
Il faut attendre le xvie siècle pour voir apparaître les théories minéralogiques modernes avec les travaux du savant allemand Agricola qui décrit les minéraux à partir de leurs propriétés physiques observables (couleur, éclat, dureté, densité, goût, odeur...).
La caractérisation des minéraux s’améliore grandement avec la découverte et l’utilisation du microscope au xviie siècle. Mais la discipline prend véritablement son envol à la fin du xviiie siècle sous l’impulsion des minéralogistes français Jean-Baptiste Romé de l’Isle et René-Just Haüy qui démontrent l'existence de réseaux cristallins périodiques au sein des cristaux et fondent ainsi la cristallographie.
En 1912, le physicien allemand Max von Laue réalise la diffraction d'un faisceau de rayons X par un cristal, ouvrant la voie à la classification rationnelle des cristaux (il obtiendra le prix Nobel de physique en 1914 pour cette découverte).
Des méthodes modernes d'analyse (analyse thermique différentielle, nouvelles méthodes de diffraction, microscopie électronique à balayage ou en transmission) complètent actuellement les moyens d'investigation traditionnels (optique, analyse chimique) des minéralogistes.
2. Objectifs et applications de la minéralogie
Les minéraux sont présents dans les roches de la croûte terrestre ou d’autres corps célestes du Système solaire, comme les planètes, les satellites naturels et les météorites.
Les minéralogistes cherchent à identifier, décrire, puis distinguer les minéraux parmi les 4 400 espèces recensées. La description des minéraux (minéralogie descriptive) permet de connaître leur origine, leur mode de formation, leur évolution, leur composition chimique, leur structure, ainsi que leurs propriétés physiques et chimiques. L’identification des minéraux selon les propriétés chimiques, physiques et cristallographiques est l’objet de la minéralogie déterminative.
Par ailleurs, une minéralogie de type industriel s’est développée au cours du xxe siècle, dans le but de répondre à une demande très forte de certains minéraux présents en trop faible quantité dans la nature. Ainsi, des méthodes de synthèse ont été mises au point pour fabriquer de manière artificielle certains minéraux comme les diamants ou les rubis, utilisés en joaillerie mais aussi en optique (laser à rubis).
Quant aux minéraux abondants et à forte valeur ajoutée tels que les argiles, les carbonates, la silice, le kaolin, le quartz, le talc, le mica ou le feldspath, ils entrent dans la composition de très nombreux produits de consommation courante : papiers, peintures, plastiques, électronique, arts de la table, cosmétiques, agriculture, alimentation animale, médicaments…
3. Minéralogie physique
La minéralogie physique permet de décrire les propriétés physiques des minéraux. Certaines de ces propriétés peuvent être déterminées à l’œil nu à partir de tests relativement simples. C’est le cas de la dureté, du clivage et de la cassure, de la couleur, du trait, de l’éclat, des macles, des agrégats de minéraux, de la coloration de la flamme, de la densité, de la luminescence et du magnétisme. Mais de nombreuses autres propriétés peuvent également être déterminées en laboratoire : la solubilité, la ténacité, la radioactivité, la conductivité électrique, etc.
3.1. Dureté
La dureté d’un minéral permet de connaître sa résistance à la rayure (cohésion). L’échelle de Mohs, proposée en 1822 par le minéralogiste allemand Friedrich Mohs, distingue 10 degrés de dureté :
1. le talc (se raye avec l’ongle) ;
2. le gypse (se raye avec l’ongle) ;
3. la calcite (se raye avec un couteau) ;
4. la fluorine (se raye avec un couteau) ;
5. l’apatite (se raye avec un couteau) ;
6. l’orthose (raye le verre) ;
7. le quartz (raye le verre) ;
8. le topaze (raye le verre) ;
9. le corindon (raye le verre) ;
10. le diamant (raye le verre).
La majorité des minéraux ont des duretés comprises entre 2 et 4. Les faces des minéraux n’ont cependant pas forcément la même dureté (par exemple, le disthène présente des duretés comprises entre 4 et 7 selon les faces).
3.2. Clivage et cassure
Le clivage et la cassure permettent respectivement de connaître la fragmentation des minéraux suivant une surface plane (plan de clivage) ou une surface irrégulière (surface de cassure). Le plan de clivage dépend de la structure cristalline. Un minéral avec un plan de clivage parfait est très difficile à briser suivant les autres directions.
3.3. Couleur
La couleur permet de connaître la réaction d’un minéral à la lumière. Un minéral peut être :
• achromatique (incolore) lorsque la lumière le traverse parfaitement (cas du diamant) ;
• idiochromatique (coloration intrinsèque) lorsque sa couleur est due à un élément chimique spécifique (cas du bleu-vert pour le cuivre) ou à une liaison structurale spécifique (structure polymorphe du carbone en diamant transparent ou en graphite noir) ;
• allochromatique (coloration empruntée) lorsque sa couleur provient d’imperfections dans le réseau cristallin ou d’impuretés ;
• pseudochromatique (apparemment coloré) lorsque sa couleur résulte de phénomènes optiques tels que les interférences, la diffraction et la réfraction de la lumière au sein du minéral (cas de l’opale).
Si la couleur permet de caractériser certains minéraux (comme l’azurite et la malachite), elle ne constitue pas un critère de détermination très fiable car de nombreux minéraux apparaissent sous plusieurs couleurs (par exemple la fluorine).
3.4. Trait
Le trait correspond à la couleur de la poudre de minéral obtenue en frottant celui-ci sur de la porcelaine non vernie. Cette propriété permet de connaître la véritable couleur des minéraux car les impuretés influent peu sur le trait. Ainsi, la couleur du trait permet de différencier les minéraux comme l’hématite (trait rouge-brun) et la goethite (trait jaune-ocre).
3.5. L’éclat
L’éclat renseigne sur la capacité du minéral à réfléchir la lumière. Les deux grands types d’éclats sont les éclats métalliques (éclats les plus forts, caractéristiques des minéraux opaques comme les métaux natifs, les oxydes, les sulfures et les sulfosels) et les éclats non métalliques (éclats plus pâles que la couleur du minéral).
Par ailleurs, la lumière se réfléchit de façon différente selon les faces du minéral, produisant divers types d’éclats non métalliques : adamantin (fort éclat, comme le diamant), vitreux (semblable au verre, comme le quartz), gras (inégalité de la surface, comme l’opale), nacré (clivage en feuillets, comme le gypse), soyeux (minéraux fibreux, comme l’asbeste), ou mat (éclat faible et apparence terreuse, comme la kaolinite).
3.6. Macles
Les macles sont des associations de cristaux de même nature suivant des symétries spécifiques (par rapport à un plan ou à un axe de rotation). Il existe différentes sortes de macles, selon leur mode de formation. L’étude cristallographique des macles est alors essentielle pour l’identification des minéraux.
3.7. Agrégats
Les agrégats de minéraux sont des associations de minéraux formant un ensemble de taille allant du centimètre au mètre ; toutefois, ils ne contiennent que rarement de grands minéraux. Leur structure interne peut être granuleuse (assemblage de grains visibles à l’œil nu), massive (assemblage de grains non visibles à l’œil nu), oolithique (assemblage de petites sphères), bacillaire (minéraux disposés dans le sens de la longueur), feuilletée (minéraux disposés en lamelles) ou spathique (plans de clivage lisses et généralement brillants).
Leur surface extérieure peut être concrétionnée (lisse, souvent brillante et formée de petites sphères), stalactiforme (surfaces en bourrelets), en rosettes (minéraux lamellaires disposés en rosette), fasciculée (minéraux allongés groupés) ou dendritique (minéraux ramifiés).
3.8. Coloration de la flamme
La coloration de la flamme permet de connaître la composition chimique d’un minéral. En effet, certains éléments chimiques colorent la flamme qui les brûle (→ combustion) ; par exemple, la couleur de la flamme du calcium est rouge, celle du sodium est jaune-orange, et celle du potassium est violette.
3.9. Densité
La densité est le rapport entre le poids du minéral et la même masse d’un volume d’eau. La majorité des minéraux sont plus denses que l’eau.
3.10. Luminescence
La luminescence est la propriété de certains minéraux à émettre de la lumière. Il existe trois types de luminescence :
• la triboluminescence, qui correspond à une émission de lumière du minéral soumis à un choc mécanique (par exemple, lorsqu’on frotte entre eux deux minéraux de quartz) ;
• la thermoluminescence, qui correspond à une émission de lumière après chauffage d’un minéral soumis au préalable à une irradiation naturelle ou artificielle (par exemple, le quartz ou le corindon, chauffés à une température comprise entre 250 °C et 500 °C, libèrent l’énergie accumulée par irradiation sous forme de lumière ;
• la photoluminescence (fluorescence ou phosphorescence), que l’on observe sur des minéraux soumis à un rayonnement ultraviolet (par exemple, l’autunite de couleur jaune émet de la lumière fluorescente verte lorsqu’elle est soumise à un rayonnement UV).
Des minéraux non fluorescents peuvent le devenir s’ils contiennent des impuretés.
3.11. Magnétisme
Le magnétisme permet de distinguer les minéraux qui sont attirés par des aimants (paramagnétiques) de ceux qui ne le sont pas (diamagnétiques).
Seuls deux minéraux sont naturellement magnétiques : la magnétite et la pyrrhotite.
4. Minéralogie chimique
La minéralogie chimique (ou cristallochimie) étudie les relations entre la composition chimique des minéraux, l’arrangement géométrique des atomes qui les composent et les forces qui relient les atomes entre eux.
Selon la classification de Strunz, les minéraux sont classés en dix grandes classes en fonction des éléments chimiques qui les composent (sulfures, halogénures, oxydes, carbonates, borates…). Les constituants chimiques des minéraux sont généralement déterminés au moyen d’analyses par microscopie électronique.
5. Cristallographie
Comme la majorité des minéraux se présentent sous une forme cristalline, lorsque les conditions de formation sont favorables, cristallographie et minéralogie sont deux disciplines intimement liées. Toutefois la cristallographie, qui étudie la formation, la croissance, la forme géométrique, la structure interne et les propriétés physiques des cristaux, est devenue peu à peu une matière à part entière, avec ses propres enjeux et objectifs.