Enfin, en février 1981, parmi les explications de l'insolite prise de contrôle du groupe Empain-Schneider par la banque de Paribas, l'une d'elles soulignait l'importance que pouvaient représenter à l'avenir les départements de mécanique et de machines-outils de la compagnie du Creusot une fois vivifiés par des capitaux et des gestionnaires venus de l'extérieur.

Ambitieux

Ce ne sont là que des faits d'exception, mais qui traduisent cependant un mouvement plus profond des idées et des comportements vers une robotique que soutiennent les pouvoirs publics et que les syndicats ouvriers ne contestent pas. Pour l'instant, le pari semble ambitieux. Dans un contexte national souvent décrit comme peu industrialisé, la construction mécanique française est particulièrement faible face à ses rivales allemandes, japonaises, américaines et même suédoises. Elle est également gênée par de nombreux préjugés technico-professionnels, par un enseignement général peu favorable aux technologies et aux choses de l'industrie.

Si la France « n'aime pas son industrie », comment pourrait-elle se convertir à ce comble du processus industriel qu'est la robotique ? En réalité, dans un tissu industriel moins dense qu'ailleurs, où la présence d'abondantes mains-d'œuvre immigrée et féminine freine le recours aux innovations mécaniques, des pôles de modernisation tels que le nucléaire et l'aéronautique incitent les producteurs et les utilisateurs de biens d'équipement à étudier avec beaucoup plus d'attention les possibilités des automatismes.

De l'avis même des spécialistes japonais, qui s'y réfèrent fréquemment, les automates de soudure, de peinture, de manipulation, etc., élaborés dans les laboratoires français, ne souffrent d'aucun retard sur les appareils étrangers les plus avancés. C'est à la production et à la diffusion de machines simples et bon marché, accessibles à toutes les catégories d'entreprises, que la construction mécanique française s'adapte mal. Il est vrai que l'atelier robotisé suppose un système composé d'ordinateurs, de machines à commande numérique et de robots auquel le petit industriel français hésite à recourir, faute à la fois de moyens financiers, du personnel approprié et d'une culture électronique et informatique suffisante.

Rythme

Le groupe italien Fiat utilisait 250 robots fin décembre 1980, et son parc en réunira 380 fin décembre 1981 : tel est le rythme prévisible de l'essor de la nouvelle technologie, dont les progrès sont désormais très rapides. Dès ce printemps 1981, l'une des chaînes automobiles de ce groupe, à Rivalta, était équipée de robots flexibles (capables d'exécuter des travaux très différents en changeant les outils et les programmes) et intelligents (associés à des caméras de télévision qui informent l'ordinateur des défauts éventuels des pièces). Dans la transformation des matières plastiques, domaine de la petite et moyenne entreprise assujettie aux contraintes du travail en continu, l'atelier automatique est apprécié comme une solution à l'agaçant problème de l'équipe de nuit, toujours difficile à recruter. Dans la pratique, le robot ne réduit guère les frais de fabrication proprement dits. Il travaille lentement et impose l'intervention d'une main-d'œuvre peut-être moins nombreuse, mais plus qualifiée, donc plus coûteuse. Son avantage est dans la réduction des faux frais, dans le maintien d'une qualité égale, dans sa capacité de travailler sans interruption à condition d'être alimenté correctement en pièces.

Son inconvénient, psychologique et considérable, est de priver le technicien traditionnel de son tour de main et le patron mécanicien de son autorité sur les produits et les méthodes de production. Autorité qu'il doit partager avec le fournisseur de logiciel et l'architecte en robotique. Ce n'est pas le moindre obstacle que la construction mécanique française devra écarter.

Automobile

Tendance très préoccupante

L'industrie automobile française a subi en 1980 un profond retournement de conjoncture, comme ses grandes concurrentes européennes et américaines. Seul le Japon a été épargné par la crise. Mais la France est parvenue à limiter les dégâts, et parler, en ce qui la concerne, de crise de l'automobile serait exagéré puisque les reculs globaux ont été limités par rapport aux niveaux records atteints en 1979.