Mais les BR repassent à l'action en enlevant successivement un notable démocrate-chrétien le 27 avril 1981, à Naples ; le directeur d'une filiale de Montedison le 20 mai, à Venise ; un cadre des usines Alfa Romeo le 3 juin, à Milan ; et, le 10 juin, Roberto Peci, frère du terroriste repenti Patrizio Peci.

L'automne voit éclater une double crise. Sociale d'abord, avec l'affaire Fiat, politique ensuite avec la chute du gouvernement Cossiga. À Turin, le géant de l'automobile annonce, à la mi-septembre 1980, 15 000 licenciements. Aussitôt les ouvriers, encouragés par le parti communiste, bloquent la production. Enrico Berlinguer, secrétaire général du PC, apporte aux grévistes son soutien personnel, en déclarant qu'il les appuiera s'ils occupent les usines.

Après trente-cinq jours de conflit, un compromis est finalement trouvé. Les licenciements sont suspendus, mais 23 000 salariés sont mis au chômage par roulement jusqu'à l'été 1981. Cette solution a été en partie obtenue sous la pression d'une majorité d'employés, dont plus de 40 000 ont défilé le 14 octobre dans les rues de Turin, quatre jours après une grève nationale destinée à soutenir l'action des grévistes.

À Rome, le 27 septembre 1980, un vote à bulletin secret des députés renverse le gouvernement. Francesco Cossiga (Journal de l'année 1979-80), trahi par 32 francs-tireurs, est obligé de donner sa démission. Trois semaines plus tard, le 18 octobre, Arnaldo Forlani parvient à constituer une équipe soutenue par la démocratie chrétienne, le parti socialiste — de retour au pouvoir après six ans d'absence —, le parti républicain et le parti social-démocrate.

À 56 ans, Arnaldo Forlani, docteur en droit et journaliste, compte trente-trois ans au service de la démocratie chrétienne, et il a participé depuis 1969 à plusieurs gouvernements, notamment comme ministre des Affaires étrangères dans le cabinet de Giulio Andreotti Son programme prévoit une réduction de l'inflation et un assainissement général des finances publiques.

L'échec de cette politique oblige le gouvernement à adopter, le 22 mars 1981, un programme d'austérité. La lire, dans le cadre du système monétaire européen, est dévaluée de 6 % ; le taux d'escompte passe à 19 %. But de l'opération : permettre une croissance annuelle du PNB de 3 %.

Sur le tableau de bord de l'économie italienne, tous les clignotants sont rouges. L'inflation dépasse les 21 % par an et le déficit de la balance commerciale a atteint 93 milliards de F en 1980.

La loge P2

Le scandale P2 (du nom de la loge maçonique Propaganda due) a raison, le mardi 26 mai, du 40e gouvernement formé depuis la guerre. Le parti socialiste refuse de soutenir plus longtemps Arnaldo Forlani, qui est obligé de présenter sa démission au président Pertini.

Depuis plusieurs semaines, la magistrature a remis au président du Conseil des documents qui prouvent à quel point cette loge a voulu s'ériger en véritable état dans l'État.

Autour de lui, Licio Gelli, qui a pris la fuite en Amérique du Sud, a réuni des hommes qui comptent en Italie. Ils viennent de tous les milieux, à l'exception du parti communiste. Dans la liste de 962 personnes qui ont adhéré à la loge, on relève les noms de trois ministres, 42 généraux, 51 colonels, ceux de plusieurs hauts fonctionnaires, des hommes d'affaires ou encore des journalistes. Inculpé pour association de malfaiteurs, Licio Gelli est soupçonné d'avoir voulu créer en Italie un véritable contre-pouvoir autoritaire, destiné à remplacer un État jugé défaillant.

La plupart des personnalités concernées nient leur participation aux activités de la loge ; très rares sont ceux qui admettent avoir effectivement rejoint cette société secrète.

Dans un premier temps l'instruction vise à établir quels liens existent entre la loge et ce qui a fait l'actualité des dernières années en Italie : essentiellement les scandales et la subversion d'extrême droite.

Laïc

Accusé par ses alliés socialistes d'avoir trop tardé à dire au pays ce qu'il savait, Arnaldo Forlani est obligé de démissionner.