Ces deux lois comportent, fort heureusement, leurs exceptions. Ainsi le premier semestre de 1978 a-t-il été relativement satisfaisant au niveau de l'activité. Les clients du textile (confectionneurs, détaillants), devant reconstituer des stocks tombés au plus bas, ont nettement augmenté leurs commandes, ce qui fait qu'au total la production pourrait retrouver, en 1979, son niveau de 1977. Le résultat est certes maigre et s'explique par la mollesse de la demande finale : la consommation est la première victime de l'amputation du pouvoir d'achat opérée par le relèvement des cotisations sociales.
Sur le plan du commerce extérieur, on s'aperçoit que les points de fermeté du secteur restent le tissage et l'habillement, alors que la bonneterie ou le linge de maison, naguère considérés comme des activités porteuses, s'effondrent actuellement devant les coups de boutoir assénés par les Italiens, les Grecs, les Américains et les Portugais. On craint qu'en 1979, pour la première fois de son histoire, la balance commerciale de l'ensemble textile et habillement ne soit globalement déficitaire. On comprend ainsi les réticences des industriels à voir la Grèce, puis, à moyen terme, l'Espagne et le Portugal devenir partenaires à part entière des Communautés européennes.
Actions concertées
Cela dit, un fait nouveau paraît porteur d'espoir : pour la première fois, dans le cadre du Comité international du textile (qui regroupe les fabricants européens), Étienne Davignon, commissaire responsable de la politique industrielle à Bruxelles, a reconnu qu'il fallait, après la sidérurgie et la construction navale, déterminer un ensemble d'actions concertées destinées à revigorer un secteur en déclin tendanciel.
Dans le paysage éternellement mouvant qu'est celui du textile, la restructuration industrielle se poursuit. Les Willot ont totalement absorbé les activités industrielles de Boussac, fusionnées avec celles de Saint-Frères, pour former un groupe qui pèse 2 milliards de F. Et il n'y avait pas encore eu de casse sociale au printemps 1979. Dollfus-Mieg a totalement absorbé Texunion, qu'elle contrôlait déjà.
Des « canards boiteux » comme André Daniel (confection) ou la SPLI (bonneterie) ont trouvé des ailes protectrices. Bidermann est toujours à l'affût d'une bonne affaire en difficulté, mais l'amélioration de la conjoncture et les efforts permanents de rationalisation ont tari le flot de dépôts de bilan.
Provisoirement, certes, car rien n'est encore joué : n'oublions pas que les pays en voie de développement représentent 8 % du potentiel industriel mondial, mais 55 % de la capacité de production d'articles textiles. À terme, l'épée de Damoclès est là.
Transports
Retour au libéralisme
Déréglementation, libre concurrence, vérité des tarifs... Le vent du libéralisme a soufflé fort sur le secteur des transports. Deux grandes entreprises, Air France et la SNCF, y ont été particulièrement exposées, quoique dans des conditions bien différentes.
Dans le transport aérien, c'est une réelle révolution qui s'est produite. On a vu, en effet, voler en éclats les deux règles sur lesquelles s'était fondée la fantastique expansion du secteur depuis près de trente-cinq ans : d'une part, la soumission des transporteurs à un arbitre international, l'IATA (Association internationale du transport aérien), qui fixait jusqu'ici les règles du jeu, imposait les conditions de la concurrence et suggérait les tarifs ; d'autre part, la toute-puissance des États sur leur espace aérien, chasse gardée dont ils régentent l'accès en accordant des droits de trafic.
L'offensive est venue des États-Unis, où la montée du pouvoir consumériste et le renouveau du libéralisme économique ont abouti, en 1978, à ce qui fut appelé la dérégulation du transport aérien : sur le marché intérieur, abolition de la réglementation régissant l'activité des compagnies américaines, afin de faire jouer au maximum les lois du marché.
Concurrence
À l'extérieur, grandes manœuvres aboutissant, à l'automne 1978, à la réforme de l'IATA, qui rend à ses membres une large liberté, et renégociation systématique des droits de trafic avec les États — en priorité, avec les plus riches, c'est-à-dire les pays européens — pour obtenir l'open sky, le ciel ouvert. Tous ne l'accordent pas de bon cœur, mais tous lèvent au moins certaines restrictions.