guerres d'Italie
Conflits dont l'Italie a été l'enjeu de 1494 à 1559.
1. Les causes
1.1. L'Italie, enjeu de la lutte pour l'hégémonie européenne
À la fin du xve siècle, fragmentée en de nombreuses entités politiques distinctes, l'Italie apparaît comme un ensemble riche et densément peuplé. Les capitaux et les marchands des différents États italiens dominent l'Europe au plan économique, tandis que les réalisations intellectuelles et artistiques des maîtres italiens fascinent toutes les cours. Dans la péninsule, seuls le royaume de Naples, le duché de Milan, les républiques de Venise, de Florence et les États pontificaux représentent une certaine importance. Perpétuellement en conflit les uns avec les autres, les princes des riches États italiens n'hésitent pas à faire appel à des mercenaires étrangers commandés par des condottiere, voire, ponctuellement, à des puissances étrangères pour emporter la victoire, qu'elles n'arrivent jamais à atteindre complètement.
1.2. La « grande entreprise » de Charles VIII
Dans ce contexte, le testament du roi de Naples René d'Anjou (1480), qui, sans héritier, lègue à la France ses possessions, porte en germe le déclenchement des guerres d'Italie car la souveraineté de René d'Anjou sur Naples n'est que nominale. Ce n'est qu'en 1492 que le roi de France Charles VIII, héritier direct de la maison d'Anjou, décide de faire valoir ses droits sur Naples, et prépare une expédition militaire vers « son » État. Il est alors amené à accorder à ses voisins d'importantes concessions, pour s'assurer de leur neutralité envers la France. Ainsi, Henri VIII d'Angleterre reçoit une importante somme d'argent, Maximilien d'Autriche récupère l'Artois, la Franche-Comté et le Charolais pris une quinzaine d'années plus tôt par Louis XI à Charles le Téméraire, dont le nouvel empereur germanique est l'héritier par sa femme, Marie de Bourgogne ; enfin Ferdinand II d'Aragon retrouve le Roussillon et la Cerdagne, abandonnés un temps par son père au royaume de France.
2. Les expéditions françaises (1494-1516)
2.1. L'échec de Charles VIII
À la tête d'une puissante armée, Charles VIII descend en Italie (septembre 1494) et conquiert sans difficulté le royaume de Naples (février 1495) où il se fait couronner roi. Mais une coalition, la Saint Ligue (mars 1495), qui regroupe le duc de Milan, le pape Alexandre VI, le roi d'Espagne Ferdinand II d'Aragon (qui possède le titre de roi de Sicile) et l'empereur Maximilien, l'oblige à abandonner sa conquête et à rentrer en France, après avoir bousculé les coalisés à Fornoue (→ bataille de Fornoue,juillet 1495). Le succès de cette première expédition est nul : le roi de France a préservé son armée et son trône, mais Naples est perdue.
2.2. Les prétentions de Louis XII
La deuxième expédition est dirigée par Louis XII, héritier des prétentions sur Naples de Charles VIII et des droits sur le duché de Milan de sa grand-mère Valentine Visconti. Le roi s'empare du Milanais (décembre 1499), le perd, le reconquiert (Novare, avril 1500), capture Ludovic Sforza le More, duc de Milan, puis s'empare du royaume de Naples (septembre 1501) avec l'aide de l'Aragon. Mais cette entente de circonstance ne dure pas. Les Espagnols se retournent contre Louis XII et celui-ci doit céder le royaume récemment conquis à l'Espagne (1504) en dépit des exploits de Bayard (→ Garigliano, décembre 1503).
En butte à la Sainte Ligue (octobre 1511), formée contre lui par le pape Jules II, il perd le Milanais (1512) malgré les succès de Gaston de Foix (→ Ravenne, avril 1512). Dans le même temps, les Suisses, membres de la coalition, envahissent la Bourgogne, et les Anglais le nord du royaume de France. Louis XII meurt en 1515.
2.3. La victoire de François Ier à Marignan
Par la victoire de Marignan (septembre 1515), François Ier, successeur de Louis XII, reconquiert le duché de Milan, reconnu possession de la France par le traité de Noyon (août 1516), qui laisse Naples à l'Espagne. Sont également signés le traité dit de la Paix perpétuelle avec la Suisse, puis le concordat de Bologne, qui scelle la réconciliation entre la France et la papauté. Ces trois traités n'empêcheront cependant pas l'éclatement des conflits ultérieurs pour la possession du Milanais.
3. L'extension du conflit (1519-1559)
3.1. L'entrée en guerre de Charles Quint
Jusqu'alors limitée à l'Italie, la lutte s'élargit aux dimensions d'un conflit européen après l'élection à l'Empire de Charles Quint (1519), qui convoite le Milanais mais aussi la Bourgogne et rêve, en outre, d'imposer son hégémonie sur le continent. François Ier, battu à Pavie (→ bataille de Pavie, 24 février 1525), perd le Milanais, tandis que les troupes impériales étendent leur domination sur la péninsule et mettent Rome à sac (1527).
Malgré la ligue de Cognac contre l'empereur, le traité de Cambrai (3 août 1529) confirme l'hégémonie espagnole sur l'Italie. François Ier mènera encore deux guerres (1536-1538 ; 1542-1544) sans pouvoir reprendre pied dans le Milanais.
3.2. Saint-Quentin, ultime bataille
Son fils, Henri II, reprendra le rêve italien, mais devra contenir sur le territoire français les assauts des troupes de Philippe II d'Espagne (défaite de Saint-Quentin, 1557). Le conflit qui oppose désormais les Valois et les Habsbourg s'achèvera par les traités du Cateau-Cambrésis (avril 1559), par lesquels la France renonce à l'Italie, où l'Espagne, maîtresse du royaume de Naples et du duché de Milan, sera désormais prépondérante.
4. Les conséquences des guerres d’Italie
4.1. De nouvelles armes
Les guerres d'Italie voient s'opérer une mutation importante dans l'art de faire la guerre. Si les armes anciennes et les charges de cavalerie médiévales sont encore de mise à Fornoue (1495), on assiste à la diffusion rapide des armes à feu, comme l'illustre le rôle décisif de l'artillerie française à Marignan. Par ailleurs, l'infanterie, armée d'arquebuses, commence à prendre le pas sur la cavalerie.
4.2. L'éclosion de la Renaissance française
Si les guerres d'Italie constituent les dernières grandes aventures féodales d'une monarchie française en mutation et n'apportent que peu de résultats politiques, elles influencent considérablement le goût et la sensibilité de la noblesse de France. En effet, le raffinement des mœurs italiennes et la beauté des œuvres d'art contribuent pour beaucoup à l'éclosion de la Renaissance des arts et des lettres en France.