population
(anglais population, du moyen français populacion, du bas latin populatio, -onis)
Ensemble des habitants d'un pays, d'une région, d'une ville, etc..(Pour en savoir plus, voir l'article population mondiale.)
DÉMOGRAPHIE
1. Définition : une notion évolutive
Dans son acception la plus générale, le mot « population » désigne un ensemble d'êtres vivants (humains, animaux, mais aussi végétaux) ayant des caractéristiques communes. Dans son usage le plus courant, il renvoie à un groupe humain résidant sur un même territoire (ville, région ou nation, voire l'ensemble de la planète). Mais il peut s'appliquer aussi à une partie de l'ensemble ainsi constitué, à l'intérieur duquel on opère des distinctions en fonction de critères biologiques (on parle ainsi de population masculine ou féminine, de population adulte) ou sociaux.
L'analyse de la population et des populations est aujourd'hui au cœur des études de prospective.
1.1. L'influence de l'économie et de la politique
Les conditions d'existence de la population, ses structures et son évolution sont largement influencées par l'économie et par la politique.
– L'économie : l'accroissement et la santé de la population dépendent du degré de développement de la production ; en retour, l'existence d'une main-d'œuvre disponible pour le travail industriel et agricole est une condition de la croissance.
– La politique : la capacité d'action d'un État dépend pour une grande part du dynamisme de son peuplement ; à l'époque de la mondialisation des activités humaines, des problèmes comme celui que pose la faim (dans les régions où l'augmentation de la population excède les ressources immédiatement disponibles) ont des incidences sur les rapports entre gouvernements.
1.2. Un outil pour lire l'avenir
Seule une étude rigoureuse de la répartition, de la composition et des tendances d'évolution des populations peut permettre de formuler des prévisions, à partir de projections des données anciennes et actuelles sur l'avenir.
Des décisions capitales pour chaque État aussi bien que pour l'ensemble de l'humanité dépendent de la capacité à déterminer si le nombre d'êtres humains prévisible pour le milieu du xxiesiècle sera compatible avec les capacités de production, si l'accroissement de la population mondiale est susceptible de provoquer des atteintes graves à l'environnement, ou encore si la concentration de la population dans des villes de plus en plus surchargées ne risque pas d'entraîner de graves déséquilibres.
L'urgence croissante de ces questions est à l'origine de la naissance d'une discipline de recherche qui, depuis ses premiers pas, a connu un approfondissement constant, la démographie, qu'on appelle fréquemment dans les pays anglo-saxons population study (« étude de la population »).
2. Historique d’une réflexion
La réflexion sur les problèmes de population est ancienne. On en trouve les échos chez des penseurs qui vivaient dans des États fortement structurés (Platon dans l'Athènes classique [date approx.] Vesiècle av. J.-C., Confucius dans l'Empire chinois [date approx.]).
Toutefois, c'est seulement à l'époque moderne de l'histoire européenne que cette réflexion a pris les caractères d'une recherche scientifique. Le premier travail d'ensemble sur la question a été publié, en 1662, par le statisticien britannique John Graunt (Observations naturelles et politiques sur les bulletins de mortalité), qui a étudié systématiquement les décès dans la ville de Londres, pour en tirer des conclusions sur « le gouvernement, la religion, le commerce ».
2.1. L’entrée dans la modernité
L'entrée dans la modernité, à partir du xvie s., s'exprime par le développement d'un désir de connaissance et d'un esprit de recherche qui s'appliquent à tous les domaines. Il est parallèle à une expansion économique qui, à la suite de la généralisation du commerce international, va entraîner l'industrialisation et l'urbanisation des sociétés européennes. Ces bouleversements posent des questions nouvelles aux hommes d'État et aux intellectuels. Le contact avec des civilisations différentes (de l'Asie et de l'Amérique) est lui aussi source d'interrogations, de même que les guerres et les épidémies.
Le siècle des Lumières (siècle des révolutions en Amérique et en France) voit la naissance d'une réflexion sur la politique de la population, c'est-à-dire sur les mesures qu'il convient d'adopter pour que l'accroissement du nombre d'êtres humains s'accomplisse dans les meilleures conditions. Il faut d'ailleurs noter que c'est aux environs de 1750 que le terme « population » remplace le vocable « peuplement » dans la langue française, qui s'inspire en l'occurrence de l'anglais.
Le débat qui prend forme alors va se poursuivre jusqu'à nos jours, opposant ceux qui, à l'instar des Encyclopédistes et de Condorcet, croient en la possibilité d'un développement harmonieux à ceux, dont Malthus est le représentant le plus célèbre, qui estiment indispensable une limitation de la population.
2.2. Les moyens d'information sur la population
L'existence officielle de l'état civil (enregistrement obligatoire des naissances, des mariages et des décès) constitue le premier de ces moyens. En France, il est instauré par la Révolution française, en remplacement des registres où, dans chaque paroisse, étaient consignés baptêmes et autres cérémonies religieuses. Les recensements réguliers viennent compléter les données de base ainsi recueillies. Ils fournissent des indications d'ordre sociologique (profession, niveau d'instruction, logement, etc.).
Le premier recensement moderne est effectué en Prusse, en 1725. La Suède (1749), l'Autriche (1754), les États-Unis (1790) suivent le mouvement. L’Angleterre, la France, la Norvège et le Danemark y procèdent en 1801, mais on considère généralement que, en ce qui concerne la France, le premier recensement répondant aux exigences d'une recherche méthodique ne date que de 1836.
Une administration efficace est, de toute évidence, la condition indispensable de la fiabilité des résultats fournis par l'état civil et les recensements. C'est dire que le développement des études de population est indissolublement lié à l'État, dont le rôle s'est constamment renforcé depuis le xviiie s.
Au xxe siècle – tout particulièrement après la crise économique des années 1930 et la Seconde Guerre mondiale –, l'État a rempli des fonctions économiques (secteur public) et sociales (Sécurité sociale) qui ne lui incombaient pas jusqu'alors. Ainsi s'explique l'apparition, dans la plupart des pays développés, d'instituts officiels qui ont pris en charge les études démographiques.
En France, l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), fondé en 1946, comporte une section « population ». Mais il faut surtout signaler l'existence de l'Institut national des études démographiques (INED) : cet organisme public autonome, créé le 24 octobre 1945, a été placé pendant de longues années sous la direction d'Alfred Sauvy, un des pionniers de la démographie française, qui a notamment publié notamment une revue bimestrielle, Population, qui fait référence en son domaine.
3. L'état de la population
Les études de population ont un double objectif : présenter l'état de la population à un moment donné (nombre, répartition géographique, répartition par âge, par sexe, etc.) et apprécier le mouvement de la population (son évolution, en fonction du rythme des naissances et des décès, des migrations, etc.). Ces tâches ne se résument donc pas à un simple dénombrement ; comme l'écrit Alfred Sauvy, « le total de la population ne présente de signification que rapporté à d'autres données ».
Les recherches sur l'état de la population portent sur trois domaines principaux : l'âge, la répartition sociogéographique, et la répartition par profession.
3.1. Âge
L'étude de l'âge d'une population permet d'aboutir à l'établissement d'une pyramide des âges, soit une représentation graphique où sont inscrits en ordonnée tous les âges de la vie humaine, de la naissance (comptée comme point zéro) à 100 ans environ, et en abscisse les effectifs dénombrés pour chaque âge, en distinguant hommes et femmes.
3.2. Répartition géographique
La répartition géographique de la population donne une vision précise de l'occupation du territoire, qu'il s'agisse d'une région, d'un État, d'un continent ou de l'ensemble du monde. Le calcul de la densité (nombre d'habitants par kilomètre carré) fournit un des indices les plus révélateurs : il contribue à montrer concrètement quelles zones connaissent une croissance économique, quelles autres demeurent oubliées du développement.
Mais cette répartition dans l'espace peut être aussi interprétée en termes sociologiques ; on établira alors les rapports entre population urbaine et population rurale. L'indication ainsi obtenue permet, elle aussi, d'apprécier le stade d'évolution auquel est parvenu un pays : la modernisation économique et politique s'accompagne toujours d'une croissance des villes, et un fort pourcentage d'êtres humains résidant à la campagne est, le plus souvent, l'indice d'un retard dans le développement (selon les critères imposés par l'économie moderne et le marché mondial).
3.3. Population active et démographie « sociale »
La dimension sociale des recherches sur la population se révèle pleinement dans l'étude de la population active : il s'agit de l'ensemble des personnes exerçant habituellement une activité professionnelle, salariée ou non. On la calcule en général en chiffres absolus et en pourcentage de la population totale. Sont comptés dans la population active celles et ceux qui sont momentanément sans activité, pour cause de maladie, de formation ou de chômage n'excédant pas une certaine durée. Cette inclusion des sans-travail dans les statistiques a déterminé l'usage d'une catégorie complémentaire, la population active « occupée », qui rassemble toutes les personnes effectivement au travail.
3.3.1. Les catégories socioprofessionnelles
La connaissance de la population active ne revêt une pleine utilité – pour l'État et les employeurs privés – que si elle s'accompagne d'une étude de la répartition professionnelle de ladite population. On a donc créé une nomenclature des métiers ou des professions.
En France, cette liste, établie en 1947, puis révisée en 1954, comportait 12 000 activités rassemblées en 1 130 métiers. Une modification, opérée par l'INSEE lors du recensement de 1982, a abouti à un resserrement de l'éventail et à la définition de 455 professions. Pour éviter la trop grande dispersion qu'impliquerait pour la recherche la prise en compte des seules professions, les organismes responsables ont élaboré la notion de catégorie socioprofessionnelle (C.S.P.).
Pour définir les C.S.P., plusieurs critères sont retenus : la profession, le secteur d'activité économique auquel se rattache la profession (agriculture, commerce, services, etc.), le statut (salarié ou non salarié), la qualification professionnelle, la position dans la hiérarchie (cadre moyen ou supérieur, contremaître, etc.), et l'importance de l'entreprise (nombre de salariés). Ce regroupement en catégories permet une meilleure vue d'ensemble de la répartition professionnelle, à condition cependant de comprendre que les CSP ne correspondent pas à des classes sociales, mais à des groupes de classement, établis à partir d'enquêtes.
Depuis 1982, on a procédé, en France, à une révision du code des catégories socioprofessionnelles, pour mieux l'adapter aux évolutions du travail. C'est ainsi qu'est apparue la catégorie des « professions intermédiaires », qui regroupe, entre autres, instituteurs, techniciens, cadres B de la fonction publique. En conséquence, on parle maintenant de professions et catégories socioprofessionnelles (PCS). On compte ainsi 8 grandes PCS, qui se subdivisent en 24, puis 42 postes.
3.3.2. L'âge et le sexe
Pour parvenir à une vision plus fine encore, il est nécessaire d'introduire les variables de l'âge et du sexe. On a pu remarquer en effet entre hommes et femmes de nombreuses différences – du point de vue de la qualification et du salaire – que ne justifie pas le travail effectué. De la même façon, l'expansion du chômage se traduit d'abord par une perte d'emploi chez les femmes, les jeunes de moins de 25 ans et les immigrés.
Les statistiques doivent rendre compte de cet état de fait, ce qui implique une définition du travailleur sans emploi : faut-il englober dans cette catégorie tous les salariés qui ont perdu leur poste ? Ou seulement ceux qui bénéficient de l'allocation chômage ? Comment classer ceux qui sont sous contrat temporaire ou qui suivent un stage de recyclage, sans garantie d'embauche ? Les avis et les critères divergent. Et si la plupart des pays adoptent les normes du Bureau international du travail (B.I.T.), la grande diversité des classements opérés illustre la complexité des problèmes concernant la population active à l'heure de la crise économique.